Marc Antoine Baudot

Marc Antoine Baudot
Illustration.
Portrait de Marc Antoine Baudot par André Dutertre, (1753-1842) . Illustrateur
Fonctions
Député de Saône-et-Loire

(2 mois et 10 jours)
Gouvernement Assemblée législative
Député de Saône-et-Loire

(3 ans, 1 mois et 22 jours)
Gouvernement Convention nationale
Biographie
Date de naissance
Lieu de naissance Liernolles (Allier)
Date de décès (à 72 ans)
Lieu de décès Moulins (Allier)
Nationalité Drapeau de la France Française
Profession Médecin
députés de Saône-et-Loire

Marc Antoine Baudot, né à Liernolles (Allier) le , mort à Moulins le , est un révolutionnaire français, député à l'Assemblée législative puis à la Convention.

Biographie

Issu d'une famille bourgeoise de Dijon[1], Marc Antoine Baudot naît à Liernolles (Allier), le . Il est le fils de Jean-Marie Baudot, fermier du domaine de la Forest de Viry[2],[1], propriété noble[1], et de Claudine Deshaires[2]. Son parrain est Marc-Antoine Durand, docteur en médecine, procureur du roi et syndic de la ville de Paray-le-Monial ; il exerce une grande influence sur lui et l'incite à embrasser la carrière médicale[1].

Médecin à Charolles, en Saône-et-Loire, il adhère au début de la Révolution à la société des Amis de la Constitution de Charolles, dont il est secrétaire en [2], peu après y avoir été admis ()[3].

Mandat à la Législative

La France devient une monarchie constitutionnelle en application de la constitution du 3 septembre 1791. Marc Antoine Baudot est élu député suppléant du département de la Saône-et-Loire, le premier sur quatre, à l'Assemblée nationale législative. Il est appelé à siéger à la faveur de la démission de Charles Desplaces[4]. En août 1792, il vote en faveur de la mise en accusation du marquis de Lafayette[5].

Mandat à la Convention

La monarchie prend fin à l'issue de la journée du 10 août 1792 : les bataillons de fédérés bretons et marseillais et les insurgés des faubourgs de Paris prennent le palais des Tuileries. Louis XVI est suspendu et incarcéré à la tour du Temple.

En septembre, Marc Antoine Baudot est réélu député de la Saône-et-Loire, le septième sur onze, à la Convention nationale[6].

Il siège sur les bancs de la Montagne. Dès octobre 1792, il appuie la proposition de mettre en accusation le général Arthur Dillon, qu'il accuse d'avoir « offert la paix à ces brigands qui ont si cruellement, et contre toutes les lois de la guerre, bombardé Thionville »[7].

Lors du procès de Louis XVI, il vote la mort et rejette l'appel au peuple et le sursis à l'exécution[8]. En avril 1793, il est absent lors de la mise en accusation de Jean-Paul Marat. En mai, il est également absent lors du scrutin sur le rétablissement de la Commission des Douze.

L'envoyé en mission

Le 12 avril 1793, Marc Antoine Baudot est envoyé en mission à Bayonne auprès de l'armée des Pyrénées aux côtés de Guillaume Chaudron-Rousseau et de Joseph-Étienne Projean[9]. Il est rappelé à Paris en juin[10].

Le 26 juillet, Baudot est envoyé en mission dans le département du Lot pour remplacer ses collègues Jean-Baptiste-Charles Mathieu-Mirampal et Jean-Baptiste Treilhard[11]. Il écrit, avec son collègue Claude-Alexandre Ysabeau, au Comité de Salut public de La Réole fin août[12].

Début septembre, Baudot est envoyé en mission dans les départements de l'Ariège et de la Haute-Garonne[13]. Le 8 octobre, il écrit de Toulouse avec son collègue Chaudron-Rousseau pour demander au Comité de Salut public quel conduite tenir face aux commissaires du Conseil exécutif : « Certains commissaires du Conseil exécutif et les agents du Comité de salut public entravent notre marche, rivalisent de pouvoirs avec nous et nous font naître mille difficultés que vous devez expliquer pour le salut de la chose publique et l'uniformité des mesures qu'il faut prendre pour l'opérer. Un agent du Comité de salut public peut-il se dire notre adjoint ? »[14] Le 21 du même mois, il écrit, avec ses collègues Chaudron-Rousseau, Ysabeau et Jean-Lambert Tallien que « les commissaires du Conseil exécutif, presque tous les intrigants, et ceux que vous avez envoyés dans le Midi, prennent le titre de représentants du peuple et se conduisent avec une insolence sans égale »[15]. L'historien Michel Biard, spécialiste de la Convention nationale et des représentants en mission, estime que cette dualité contribue à la désorganisation[16].

Le 13 brumaire an II (), il est envoyé par décret en mission aux armées du Rhin et de la Moselle avec Ehrmann, Lacoste et Lémane[17], participe à la bataille de Kaiserslautern[18] et s'oppose à Saint-Just et à Le Bas et d'autres commissaires de la Convention arrivés après lui, après qu'il a nommé Lazare Hoche général en chef de ces deux armées réunies, alors que ses collègues préféraient Jean-Charles Pichegru.

Le 19 brumaire an II (), il prend avec Lémane un arrêté qui affirme : « Les phrases longues appartiennent aux monarchistes, le laconisme est le propre de la République. Dix lignes suffisent pour chaque objet de pétition : ceux qui en écriront davantage seront suspectés de vouloir mettre des longueurs à la Révolution »[19].

Le 6 frimaire an II (), il écrit au Journal des Hommes libres, pour témoigner de sa déception devant l'attitude des juifs d'Alsace et de la région bordelaise :

« La race juive, mise à l'égale des bêtes de somme par les tyrans de l'ancien régime, aurait dû sans doute se dévouer tout entière à la cause de la liberté qui les rend aux droits de l'homme. Il n'en est cependant rien. Les juifs nous ont trahis dans plusieurs petites villes et villages du côté de Wissembourg. On serait en peine pour en compter dix reconnus patriotes dans les départements du Haut et Bas-Rhin... Partout ils mettent la cupidité à la place de l'amour de la patrie et leurs ridicules superstitions à la place de la raison... Ne serait-il pas convenant de s'occuper d'une régénération guillotinière à leur égard[20],[21],[22] ? »

À Paris avec Lacoste le 25 nivôse an II (), il retourne aux armées peu après. Le 8 pluviôse (27 janvier), les deux hommes prennent à Strasbourg un arrêté réclamant à la population 30 000 souliers et 3 000 manteaux, dans un souci permanent d'approvisionner les troupes. Le 21 ventôse (11 mars), Baudot est encore à Metz[23].

En germinal (mars), Baudot est élu secrétaire de la Convention aux côtés Jacques-Augustin Leyris, Jean-Pascal Charles de Peyssard et Charles-Albert Pottier sous la présidence de Tallien[24].

Le 25 messidor (13 juillet), Baudot obtient un congé de trois décades[25]. Il est absent lors du 9 thermidor. Dans ses Mémoires, il déclare que la fête de l'Être suprême est marquée par des incidents et de l'hostilité vis-à-vis de Robespierre : celui-ci aurait fait l'objet d'injures de la part de ses collègues Laurent Lecointre, Louis Maribon de Montaut, Pierre Ruamps et Didier Thirion.

Il est nommé par décret le 30 thermidor (17 août) à l'armée des Pyrénées-Occidentales avec Delcher et Garrau. Remplacé par décret du 21 ventôse an III () par et Picqué, qui ne s'y rend pas, il est encore à cette armée le 19 germinal (8 avril)[17]. Après cette ultime mission, il se retire en Saône-et-Loire[1].

La réaction thermidorienne

Le 13 prairial an III (), à la suite des dénonciations des députés Georges Frédéric Dentzel et Balthazar Faure examinées par le Comité de législation[26], la Convention le décrète d'arrestation pour répondre de sa mission aux armées du Rhin et de la Moselle. Il fait partie d'un groupe de conventionnels accusés lors du mois de prairial qui comporte Lacoste, Alard, Dartigoeyte, Javogues, Lejeune, Mallarmé, Monestier du Puy-de-Dôme, Sergent et Maure. Il fait publier un droit de réponse le 2 thermidor an III afin de récuser les accusations portées contre lui. Baudot parvient à s'échapper et trouve refuge à Venise où il demeure jusqu'au [1],[26].

Ayant regagné Paris en vendémiaire an IV, il voyage, semble-t-il, à Vérone, en Suisse et aux États-Unis[1]. Marc-Antoine Baudot est amnistié par la loi du 4 brumaire an IV.

Le Directoire et l'Empire

En messidor an VII[1], il est nommé chef de division au ministère de la guerre sous Bernadotte. Lors du retrait de ce ministre (), il part avec lui et reprend sa profession de médecin[18].

Pendant les Cent-Jours, il accepte un poste de lieutenant de police extraordinaire à Morlaix[1].

L'exil

Après un premier exil sous la Restauration, il revient en France pendant les Cent-Jours. Baudot est emprisonné pendant la terreur blanche. La Seconde Restauration le bannit en , à la suite de la loi contre les régicides ; il passe en Suisse, où il est mal reçu[18]. Après une pérégrination de six semaines pour trouver chaque jour un asile pour dormir, un médecin de Lausanne le prend sous sa protection et lui trouve une retraite à Avenches dans une maison dédiée aux aliénés. Il se retire ensuite à Bruxelles et à Liège, où il fréquente ses anciens collègues conventionnels, mais se moque des anciens dignitaires impériaux, qu'il appelle les « magnats », comme Sieyès et Cambacérès[1].

En 1830, il rentre en France après les Trois Glorieuses[18] et s'installe à Moulins, où il meurt le . Ses obsèques sont célébrées civilement[1].

La postérité

En 1811, la famille d'Edgar Quinet s'installe à Charolles, où elle se lie d'amitié avec Baudot. L'historien décrira plus tard sa rencontre avec l'ancien conventionnel :

« Jamais il ne parlait de la Révolution. C'était là aussi un sujet interdit, soit qu'il craignit de ne pas être compris, soit que lui-même fut importuné de ce souvenir. Je l'entendis pourtant dire un mot qui me frappa : "D'autres hommes ont la fièvre pendant vingt-quatre heures ! Moi, Madame, je l'ai eue pendant dix ans". Quelle pouvait être cette fièvre ? Ce mystère m'attirait. Car le silence profond gardé sur les grands évènements par ceux même qui les avaient faits était alors un des traits de la France. Si j'interrogeais, on me répondait tout bas par le mot de Terreur. Je supposais alors des histoires effroyables ; mais en rencontrant le lendemain sur l'escalier cette même figure si gracieuse, si souriante, si charmante, la plus aimable peut-être que j'ai vue, je ne savais plus que penser. »

À sa mort, ce dernier lègue ses mémoires à l'historien, qui n'en reçoit le manuscrit qu'en 1863, alors qu'il est en exil dans le canton de Vaud et qu'il a pratiquement achevé son histoire de La Révolution ; il en intègre des passages dans son texte. Puis, en 1893, sa veuve publie les Notes historiques avec une préface de sa main symboliquement datée du . Cet ouvrage comporte de nombreux portraits, satiriques (Sieyès), indulgents (Barère, David), ou animés par une émotion républicaine (Romme, Goujon, Soubrany, qu'il appelle « les derniers des Romains »[1]). Il expose son mépris pour les femmes engagées politiquement dans la Révolution[27] et son admiration, pour les raisons inverses, pour les femmes des États-Unis d’Amérique[28].

Œuvre

Notes et références

  1. a b c d e f g h i j k et l François Brunel (2005), p. 98-99.
  2. a b et c Paul Montarlot (1904), p. 245-246.
  3. Lucien Taupenot (alias Luc Hopneau), « Deux médecins dans la Révolution », Images de Saône-et-Loire, n° 102, septembre 1995, p. 7-9.
  4. Pionnier, Constant (1857-1924), « Archives parlementaires de 1787 à 1860, Première série, tome 34, Liste des députés » Accès libre, sur www.gallica.bnf.fr, (consulté le )
  5. Pionnier, Constant (1857-1924), « Archives parlementaires de 1787 à 1860, Première série, tome 47, séance du 8 août 1792 » Accès libre, sur www.gallica.bnf.fr, (consulté le )
  6. Ducom, André Jean (1861-1923), Lataste, Lodoïs (1842-1923) et Pionnier, Constant (1857-1924), « Archives parlementaires de 1787 à 1860, Première série, tome 52, Liste des députés par départements » Accès libre, sur www.gallica.bnf.fr, (consulté le )
  7. Ducom, André Jean (1861-1923), Lataste, Lodoïs (1842-1923) et Pionnier, Constant (1857-1924), « Archives parlementaires de 1787 à 1860, Première série, tome 52, séance du 11 octobre 1792 » Accès libre, sur www.gallica.bnf.fr, (consulté le )
  8. Froullé, Jacques-François (≃1734-1794), « Liste comparative des cinq appels nominaux. Faits dans les séances des 15, 16, 17, 18 et 19 janvier 1793, sur le procès et le jugement de Louis XVI » Accès libre, sur www.gallica.bnf.fr, (consulté le )
  9. Aulard, François-Alphonse (1849-1928), « Recueil des actes du Comité de salut public, avec la correspondance officielle des représentants en mission et le registre du conseil exécutif provisoire. Tome 3 » Accès libre, sur www.gallica.bnf.fr, 1889-1951 (consulté le )
  10. Aulard, François-Alphonse (1849-1928), « Recueil des actes du Comité de salut public, avec la correspondance officielle des représentants en mission et le registre du conseil exécutif provisoire. Tome 5 » Accès libre, sur www.gallica.bnf.fr, 1889-1951 (consulté le )
  11. Aulard, François-Alphonse (1849-1928), « Recueil des actes du Comité de salut public, avec la correspondance officielle des représentants en mission et le registre du conseil exécutif provisoire. Tome 5 » Accès libre, sur www.gallica.bnf.fr, 1889-1851 (consulté le )
  12. Aulard, François-Alphonse (1849-1928), « Recueil des actes du Comité de salut public, avec la correspondance officielle des représentants en mission et le registre du conseil exécutif provisoire. Tome 6 » Accès libre, sur www.gallica.bnf.fr, 1889-1951 (consulté le )
  13. Aulard, François-Alphonse (1849-1928), « Recueil des actes du Comité de salut public, avec la correspondance officielle des représentants en mission et le registre du conseil exécutif provisoire. Tome 6 » Accès libre, sur www.gallica.bnf.fr, 1889-1951 (consulté le )
  14. Aulard, François-Alphonse (1849-1928), « Recueil des actes du Comité de salut public, avec la correspondance officielle des représentants en mission et le registre du conseil exécutif provisoire. Tome 7 » Accès libre, sur www.gallica.bnf.fr, 1889-1951 (consulté le )
  15. Michel Biard (2002), p. 60 et 64.
  16. Michel Biard, « La « Convention ambulante ». Un rempart au despotisme du pouvoir exécutif ? », Annales historiques de la Révolution française, no 332,‎ , p. 55–70 (ISSN 0003-4436, DOI 10.4000/ahrf.823, lire en ligne, consulté le )
  17. a et b Michel Biard (2002), p. 455.
  18. a b c et d Adolphe Robert et Gaston Cougny (1889), p. 204.
  19. Félix Martha-Beker, Le Général Desaix : étude historique, Didier, , 544 p. (lire en ligne), p. 102.
  20. Béatrice Philippe, Être juif dans la société française du Moyen Âge à nos jours, Éditions Complexe, , 471 p. (lire en ligne), p. 154.
  21. Jean-Clément Martin, Contre-révolution, révolution et nation en France (1789-1799), Le Seuil, , 367 p., p. 215.
  22. Claude Manceron et Anne Manceron, La Révolution française, Renaudot, , 571 p., p. 58.
  23. Michel Biard (2002), p. 309 et 455.
  24. Bouloiseau, Marc (1907-1999) et Reinhard, Marcel (1899-1973), « Archives parlementaires de 1787 à 1860, Première série, tome 87, séance du 1er germinal an II (21 mars 1794) » Accès libre, sur www.persee.fr, (consulté le )
  25. Alquier, Aline et Brunel, Françoise, « Archives parlementaires de 1787 à 1860, Première série, tome 93, séance du 25 messidor an II (13 juillet 1794) » Accès libre, sur www.persee.fr, (consulté le )
  26. a et b M. Prevost et Roman d'Amat, Dictionnaire de Biographie française : 6. Baudot (Marc-Antoine), p. 864
  27. "Il faut que les femmes soient femmes et qu’elles ne se fassent point chefs de parti dans les discussions qui doivent se terminer par le glaive, puisqu’elles ne peuvent pas le porter." In Notes historiques, pp. 110-111.
  28. "En Amérique, la femme semble occuper son véritable rang dans l’ordre social. (…) Retirée dans les limites sacrées de sa sphère, elle y est à l’abri de la corruption qui naît d’un commerce trop fréquent avec le monde." In Notes historiques, p. 285.

Voir aussi

Bibliographie

  • Michel Biard, Missionnaires de la République, CTHS, .
  • Françoise Brunel et Albert Soboul (dir.), Dictionnaire historique de la Révolution française, Paris, PUF, coll. « Quadrige », , « Baudot Marc-Antoine », p. 98-99.
  • Adolphe Robert et Gaston Cougny, Dictionnaire des parlementaires français de 1789 à 1889, vol. 1, Paris, Edgar Bourloton, 1889-1891 (lire en ligne), p. 204.
  • Paul Montarlot, Mémoires de la Société éduenne des lettres, sciences et arts, vol. 32, Autun, Imprimerie Dejussieu père et fils, (lire en ligne), « Les députés de Saône-et-Loire aux assemblées de la Révolution », p. 245-246.
  • Antoine Trimoulier, Marc-Antoine Baudot, un missionnaire de 93 : son rôle politique, ses missions, ses mémoires ou notes historiques, Dorbon aîné, , 157 p.
  • Sergio Luzzatto, Mémoire de la Terreur, Lyon, Presses universitaires, 1991..
  • Anne de Mathan, Girondins jusqu'au tombeau, une révolte bordelaise dans la Révolution, Bordeaux, Éditions Sud-Ouest, 2004, 317 p. (ISBN 287901543X)
  • Jean Tulard, Jean-François Fayard et Alfred Fierro, Histoire et dictionnaire de la Révolution française. , Paris, éd. Robert Laffont, coll. « Bouquins », , [détail des éditions] (ISBN 978-2-221-08850-0)

Liens externes