Le Dernier des Mohicans (The Last of the Mohicans) est un roman historique américain de James Fenimore Cooper, publié pour la première fois en janvier 1826, notamment par un éditeur apprécié et diffusé à l'époque, nommé Carey & Lea[3]. Deuxième[4] des cinq ouvrages composant le cycle des Histoires de Bas-de-Cuir (Leatherstocking), il se situe entre Le Tueur de daims (The Deerslayer) et Le Lac Ontario (The Pathfinder).
En , Montcalm remonte le lac Champlain et se dirige avec des soldats « aussi nombreux que les feuilles de la forêt » vers le fort William Henry, tenu par le colonel Munro qui dispose de faibles moyens de défense. C’est le moment que choisissent Cora et Alice, les filles de Munro, pour s’en aller rejoindre leur père. Elles sont accompagnées de David La Gamme, maître en psalmodie, du major Duncan Heyward et d’un guide indien, Magua, qui a tôt fait de les égarer.
Fort heureusement les voyageurs rencontrent le chasseur blanc Œil-de-Faucon et ses deux amis mohicans : Chingachgook et son fils, Uncas. Le guide, Magua, est objet de soupçons. Il prend la fuite.
Réfugiée pour la nuit dans une caverne du rocher de Glen, la petite troupe est assaillie par des Hurons menés par Magua. Œil-de-Faucon et les deux Mohicans arrivent à fuir. Les deux jeunes filles et leurs deux compagnons sont capturés et emmenés.
Magua, ou Renard Subtil, est un chef huron qui cherche à se venger de Munro. Il propose à Cora de l’épouser, car il a besoin de quelqu’un pour tirer son eau, cultiver son maïs et cuire son gibier. Cora refuse. Au moment où les captifs vont être exécutés, ils sont délivrés par Œil-de-Faucon et les deux Mohicans. Tous gagnent le fort William Henry assiégé. Mettant la brume à profit, ils parviennent à s’y glisser.
Quelques jours plus tard, un courrier du général anglais Webb est intercepté par Montcalm. Webb y annonce à Munro qu’il ne lui enverra pas de renforts et qu'il lui conseille de se rendre. Montcalm montre le courrier à Munro et lui propose une reddition acceptable : tous les occupants pourront quitter le fort avec les honneurs militaires, en gardant armes et drapeaux. Une escorte française tiendra les alliés hurons à distance, jusqu’à l’arrivée au fort Edward (en), à cinq lieues plus au sud. Munro accepte. Magua fait savoir à Montcalm qu’il n’est pas satisfait d’une telle issue : le général français avait promis aux Hurons les scalps des Anglais.
À peine les défenseurs ont-ils quitté le fort qu’ils sont massacrés par les Hurons, tandis que l’escorte prévue n’apparaît pas. Au plus fort du massacre, Magua enlève Alice. Il est poursuivi par Cora et David La Gamme.
Trois jours plus tard, Œil-de-Faucon, les deux Mohicans, le major Heyward et le colonel Munro trouvent la piste de Magua. Ils s’élancent à sa poursuite, d’abord en canoë sur le lac Horican, puis à pied à travers la forêt. Ils retrouvent David, qui a été épargné, car les Indiens le prennent pour un fou. Les deux captives ont été séparées, selon l’usage indien : Alice se trouve dans une tribu de Hurons et Cora dans une tribu qui est une branche des Delawares (ces derniers sont traditionnellement ennemis des Hurons, mais la tribu en question s’est alliée aux Hurons par les hasards des troubles que suscite la présence européenne). Œil-de-Faucon, Uncas et le major Heyward pénètrent dans le camp huron, délivrent Alice, et trouvent refuge chez les Delawares.
Magua vient exiger que ses ennemis lui soient tous livrés. Mais les Delawares reconnaissent bientôt en Uncas un chef au sang pur, un chef des Mohicans, la tribu « grand-mère des nations[5] ». Magua ne peut emmener que Cora.
Uncas prend la tête des Delawares, qui partent en guerre contre les Hurons. L'histoire se termine dramatiquement par la mort d’Uncas, de Cora [6], et puis celle de Magua.
Personnages
Louis-Joseph de Montcalm, figure historique, maréchal de camp français pour les opérations en Nouvelle-France. Cooper lui reconnaît de grandes qualités, mais lui attribue néanmoins la responsabilité du massacre des occupants du fort par les autochtones américains, pour n'être pas intervenu[7]. Il s'agit de la vision du romancier, contredite par l'historiographie y compris anglo-saxonne.
Colonel George Monro, figure historique (lieutenant-colonel George Monro (1700-1757), commandant du fort britannique William Henry.
Général Daniel Webb, figure historique (mort en 1773), commandant les armées du roi d’Angleterre dans les provinces du Nord. Il aurait pu mettre dix mille hommes en ligne contre Montcalm pour sauver le fort William Henry, mais il ne le fait pas.
David La Gamme, maître en psalmodie.
Magua, ou Renard Subtil, chef huron, chassé de sa tribu pour alcoolisme, fouetté par le colonel Monro pour la même raison.
Duncan Heyward, né sur le sol américain, en Virginie, major au 60e régiment du roi d’Angleterre, amoureux d'Alice.
Natty (Nathanaël) Bumppo, dit Œil-de-Faucon, ou Bas-de-Cuir, ou La Longue Carabine (en français dans le texte), blanc élevé chez les Indiens (il rappelle à longueur d'ouvrage « la pureté de son sang »), chasseur, éclaireur des Anglais.
Chingachgook, ou Grand Serpent, chef et sagamore mohican.
Uncas, ou Cerf Agile, fils de Chingachgook. Il est « le dernier des Mohicans » (ce qui est faux historiquement, dit Agnès DeraiI-Imbert, puisqu’il y a toujours des Mohicans[8]).
Tamenund, vieux sage des Delawares.
Critique
Le Dernier des Mohicans est une méditation nostalgique sur la disparition des Amérindiens, tout en étant une annonce de la naissance des États-Unis[9]. Il eut un énorme retentissement en Europe, dès sa publication, comme en avaient les romans contemporains de Walter Scott. Le premier titre des Chouans de Balzac, paru trois ans plus tard, lui fait allusion : Le Dernier Chouan ou la Bretagne en 1800[10].
Le style de Cooper est parfois relâché[11] : Mark Twain s’applique à en dénoncer la simplicité et la naïveté[12]. Mais une action soutenue, le dépaysement profond, le charme de la vie sauvage, la fascination qu’exercent les Indiens emportent tout. Cet ouvrage romantique brille par les multiples rebondissements de l'intrigue, ainsi que par les descriptions de la nature[11] dans la région frontalière des États-Unis et du Canada (l'actuel État de New York).
Comme Mark Twain le souligne encore dans son Fenimore Cooper's Literary Offences[13], le livre est marqué par de nombreuses invraisemblances : ainsi quand l'auteur tente de faire croire au lecteur que le major Heyward prend un étang peuplé de castors pour un village lacustre indien.
Soixante-trois ans après la parution, Edmond de Goncourt note : « La petite diligence jaune me rappelle encore une de mes plus profondes émotions. C'était cette fois en rotonde, je revenais tout seul, à douze ans, de mes premières vacances à Bar-sur-Seine et j'avais acheté les livraisons à quatre sous contenant le roman de Cooper : Le Dernier des Mohicans. Postillon, conducteur, voisin de rotonde, endroits où l'on s'arrêtait pour relayer, auberges où l'on mangea, je ne vis rien, mais rien, des choses de la route. Non, jamais je ne fus aussi absent de la vie réelle pour appartenir si complètement à la fiction. »
Adaptations
Peinture
Le peintre américain Thomas Cole (1801-1848) a rencontré Fenimore Cooper et s'est inspiré de son livre dans plusieurs tableaux :
Paysage avec figures : scène du « Dernier des Mohicans », 1826[14]
Paysage avec une scène du « Dernier des Mohicans » : la mort de Cora, 1827[15]
↑Kaser, Messrs. Carey and Lea, p. 17-9,39 - Vezina, Simon (2014). Henry C. Carey et le système américain d’économie contre l’impérialisme du libre-échange britannique : Son passage au New York Tribune (Mémoire de maîtrise inédit). Université de Montréal. Mémoire sur Henry Charles Carey - page 50
↑Dans l'ordre chronologique du récit qui diffère de l'ordre de publication.
↑Fenimore Cooper, Le Dernier des Mohicans, Alger, Dinesco, 1944, p. 26.
↑« Le massacre continuait sans obstacle. De tous côtés des malheureux fuyaient devant leurs bourreaux, pendant que l’armée française laissait faire sans intervenir. Cette conduite étrange, qui n’a jamais été expliquée, laisse une tache sur la mémoire du général français. » Le Dernier des Mohicans, éd. citée, p. 143.
↑Agnès Derail-Imbert, « The Last of the Mohicans ou l’Incarnat de la nation », p. 3, sur cairn.info