Laurent de La Hyre, né le à Paris[1] dans le milieu de la bourgeoisie marchande, reçoit une éducation soignée. Il a brièvement été l'élève de Georges Lallemant, peintre lorrain installé à Paris pratiquant un maniérisme tardif, et a étudié les œuvres de Francesco Primaticcio (Le Primatice) lors d'un séjour au château de Fontainebleau, mais n'aurait jamais visité l'Italie.
Ses premières œuvres, dans les années 1620, sont marquées par un maniérisme tardif, d'inspiration bellifontaine, comme La Tuile (Paris, musée du Louvre). Les années 1630 sont marquées par l'expérimentation de plusieurs manières avec une progression vers une peinture assagie et classicisante. À partir des années 1640, son style évolue vers un classicisme épuré qui fit sa réputation tandis que les dernières années de son activité, de la fin des années 1640 à sa mort en 1656, sont marquées par une prédilection pour les peintures de paysages.
La Hyre est considéré comme le plus parfait exemple de l'atticisme parisien (ce terme fait référence à la région de Grèce nommée l'Attique où s'était développé durant l'Antiquité un courant rhétorique fondé sur la pureté de la langue grecque), c'est-à-dire un art plein de retenue et de mesure, fondé sur le dessin et l'harmonie de couleurs clairs et pures, tout à l'opposé des tendances baroques de Vouet, rentré d'Italie en 1627. Ce courant fleurit dans les années 1640, à Paris, après le passage de Nicolas Poussin, présent dans la capitale entre 1640 et 1642.
Mais La Hyre est surtout célèbre pour ses peintures de paysage qui intègrent des scènes souvent tirées de l'Antiquité classique. Il représente régulièrement des arrière-plans de ruines traités de manière très précise et transcrivant avec un grand souci d'exactitude la texture de la pierre et les jeux de la lumière sur sa surface. Ses compositions sont épurées, avec une lumière claire qui baigne la scène de manière raffinée, et se basent sur un dessin très soigneux tout en faisant preuve d'une réelle qualité d'observation bien que ses paysages soient purement imaginaires, mettant en scène une nature idéalisée qui se veut être une image de l'Arcadie antique, à l'opposé du paysage topographique des Hollandais à la même époque. Ses paysages sont rarement des paysages purs, dénués de personnages. Ce sont le plus souvent des paysages historiques, représentant des scènes bibliques ou mythologiques dans un cadre naturel mais qui a, chez La Hyre, autant sinon plus d'importance que l'épisode narratif dépeint.
Laurent de La Hyre a connu de son vivant la célébrité, ce qui lui a valu de figurer, en 1648, parmi les douze membres fondateurs de l'Académie royale de peinture et de sculpture, au sein de laquelle on retrouvait les principaux tenants du courant atticiste de la peinture, notamment Eustache Le Sueur.
Laurent de La Hyre est mort le à Paris[1]. Après sa mort, malgré la réputation dont il avait joui de son vivant, il est moins considéré que les autres grands peintres de son temps, tels Vouet, Champaigne ou Le Sueur, du fait du jugement négatif porté sur son œuvre par les historiographes de la fin du XVIIe siècle.
Il est le père du scientifique Philippe de La Hire, qu'il forma à la peinture.
Œuvre
Hercule et Omphale
Thésée
Paysage avec la Paix embrassant la Justice, 1654, Musée d'art de Toledo
Adonis Mort
Le rapt d'Europe
Job
Jugement de Salomon
L'Apparition du Christ aux pèlerins d'Emmaüs, 1656, musée de Grenoble
Saint Pierre guérissant
La Conversion de saint Paul, 1637, Chapelle Saint-Anne.
Allégorie de l'astronomie, 1649, Musée d'Orléans
Allégorie de la Grammaire, 1650, National Gallery de Londres
Allégorie de la Régence d'Anne d'Autriche, 1648, Chateau de Versailles
Allégorie de l'Arithmétique
Cyrus
Vierge à l'Enfant au coussin
Laurent de la Hyre (1606-1656), Abraham et son fils se rendant au lieu du sacrifice, huile sur toile (47 x 68 cm), don de Ligeret du Cloiseau en 1851 au musée de Semur-en-Auxois
Deux religieux dans la solitude, vers 1630, musée du Louvre, Paris
Dessins
Le Sacrifice d'Abraham, pierre noire et lavis d'encre de Chine. H. 0,233 ; L. 0,334 m[6]. Paris, Beaux-Arts de Paris. Ce dessin date vraisemblablement de la fin des années 1640. L'artiste fait preuve d'une grande liberté dans la manière et la composition de cette feuille. Le trait et le positionnement des figures sont spontanés, le volume des drapés est indiqué de manière très linéaire. L'artiste utilise peu d'estompe mais joue magistralement avec les réserves de papier blanc pour suggérer l'espace[7].
Déploration sur le Christ mort, devant un hôpital, 1645, musée du Louvre, Paris[8]
La Lapidation de saint Étienne, pierre noire et lavis d'encre de Chine. H. 0,325 ; L. 0,402 m[9]. Paris, Beaux-Arts de Paris. Ce dessin est préparatoire à un épisode de la Tenture de l'histoire de saint Étienne, commandée entre 1646 et 1648. La Hyre ne fournit que des dessins aux commanditaires entre 1646 et 1647. Il propose une lecture fortement antiquisante du sujet. Il est fortement possible que le commanditaire lui ait demandé de modifier sa composition, ce qui expliquerait la présence au Louvre d'un dessin présentant une autre version de cette iconographie[10].
L'apparition du Christ à Madeleine, pierre noire et lavis d'encre de Chine. H. 0,230 ; L. 0,257 m[11]. Paris, Beaux-Arts de Paris. C'est en 1656 qu'il entre en relation avec les chartreux et réalise l'Apparition du Christ aux pèlerins d'Emmaüs et l'Apparition du Christ à Madeleine, dont ce dessin est une étude préparatoire, le dernier dessin en date de la main de La Hyre. La rigueur formelle à l’œuvre dans cette feuille traduit l'aspiration à un art monumental, dépouillé voire austère, caractéristiques en adéquation avec la règle et les préoccupations de l'ordre commanditaire, la Grande Chartreuse. On note que le Christ est encore muni de la pelle, attribut du jardinier, conformément aux traditions anciennes[12].
Saint Luc, vers 1630, pierre noire, plume et encre noire, lavis gris sur papier vergé, 13,7 x 22,7 cm, Orléans, musée des Beaux-Arts[13].
Prophète (Jérémie ? Jonas ?), vers 1630, pierre noire, plume et encre noire, lavis gris sur papier vergé, 20,7 x 22,7 cm, Orléans, musée des Beaux-Arts[14].
Marie de Médicis fuyant Blois (d’après Rubens), pierre noire et lavis brun sur papier vergé, 28,9 x 22,6 cm, Orléans, musée des Beaux-Arts[15].
↑Brugerolles, Emmanuelle, Le Dessin en France au XVIIe siècle dans les collections de l’Ecole des Beaux-Arts, Paris, Ecole nationale supérieure des beaux-arts éditions, 2001, p. 244-247, Cat. 61.
↑Brugerolles, Emmanuelle, Le Dessin en France au XVIIe siècle dans les collections de l’Ecole des Beaux-Arts, Paris, Ecole nationale supérieure des beaux-arts éditions, 2001, p. 239-243, Cat. 60.
↑Brugerolles, Emmanuelle, Le Dessin en France au XVIIe siècle dans les collections de l’Ecole des Beaux-Arts, Paris, Ecole nationale supérieure des beaux-arts éditions, 2001, p. 247-251, Cat. 62.
↑Dominique Brême et Mehdi Korchane, Dessins français du musée des Beaux-Arts d’Orléans. Le Trait et l’Ombre, Orléans, musée des Beaux-Arts, (ISBN9 788836 651320), n°12
↑Dominique Brême et Mehdi Korchane, Dessins français du musée des Beaux-Arts d’Orléans. Le Trait et l’Ombre, Orléans, musée des Beaux-Arts, (ISBN9 788836 651320), n°13
↑Dominique Brême et Mehdi Korchane, Dessins français du musée des Beaux-Arts d’Orléans. Le Trait et l’Ombre, Orléans, musée des Beaux-Arts, (ISBN9 788836 651320), n°14
Pierre Rosenberg, Jacques Thuilier, Laurent de La Hyre, Cahiers du Dessin Français, n° 1, de Bayser éditeur, 1985.
Pierre Rosenberg, Jacques Thuillier, catalogue de l'exposition, Laurent de La Hyre, Grenoble, Rennes et Bordeaux, 1989-1990.
Pierre Rosenberg et Jacques Thuillier, Laurent de La Hyre, 1606-1656, Skira, , 383 p. (ISBN978-2-6050-0134-7).
Marianne Le Blanc, "La notion d'atticisme français à l'épreuve de la perspective", dans L'artiste et l'œuvre à l'épreuve de la perspective, M. Cojannot-Le Blanc, M. Dalai Emiliani, P. Dubourg Glatigny ed., Rome, 2006, p. 431-448.
Madeleine Pinault Sorensen, Laurent de la Hyre : Illustrated édition, 5 Continents, , 83 p. (ISBN978-8-8743-9528-6).