Francesco Primaticcio fut probablement formé par Innocenzo da Imola et Bartolommeo Ramenghide dit Bagnacavallo. Il fut ensuite, à Mantoue, l’élève de Giulio Romano où il travailla à la décoration du Palais du Te, expérience fondatrice au cours de sa formation.
Créateur génial aux talents multiples, il consacre l'essentiel de sa vie à servir par son œuvre la France et ses rois, de François Ier à Charles IX (dynastie des Valois).
Le roi de France envoie alors Primatice à Bruxelles superviser la transcription de ces petits patrons à l’échelle définitive.
La destinée du peintre bolonais est dès lors liée à celle des derniers Valois.
Il retrouve à la cour de France un autre italien, Rosso Fiorentino, arrivé en 1530 sur la recommandation de l’Arétin.
Fontainebleau est alors un centre artistique en pleine effervescence.
Sous la direction du Florentin, une vaste équipe d’artistes œuvre à la décoration de la galerie François Ier, tandis que Primatice est chargé de celle des appartements royaux.
La mort soudaine de Rosso en 1540 laisse le champ libre pour trente ans à Primatice. Rival autoritaire et affiché du peintre florentin, il supprime à sa mort, sous prétexte d'agrandissement ou de sa prédilection pour la sculpture en piédestal, nombre de ses œuvres décoratives.
Primatice est un des maîtres incontestés de l’École de Fontainebleau, le premier à mettre en scène la Cour.
Il imagine fêtes et mascarades, multiplie les décors intérieurs (la Galerie Basse, l’Appartement des Bains, la chambre de la duchesse d'Étampes, le cabinet du roi, etc.) mais aussi dans le jardin du château de Fontainebleau (pavillon de Pomone, fontaine d'Hercule, grotte des Pins).
Le chantier de la Galerie d’Ulysse s’ouvre dans les années 1540 et se poursuit au-delà de la mort de son concepteur, en 1570. La galerie ayant été détruite en 1738, du travail de Primatice ne nous sont parvenues que des gravures[1].
Au cours de séjours réguliers en Italie, il fait venir des œuvres antiques ou leurs moulages, et importe les dernières inventions du maniérisme italien.
Sous le règne d’Henri II, les réalisations se multiplient dans le domaine de la sculpture funéraire (tombeau des Guise, urne du cœur de François Ier…). À Fontainebleau, il dirige Nicolò dell’Abate dans la décoration de la Salle de Bal.
Il consacre principalement ses dernières années au monument funéraire d’Henri II et à la rotonde des Valois à Saint-Denis.
Peintre du roi, à la fois dessinateur, sculpteur[2], architecte, le Primatice fait évoluer l’art en introduisant en France le raffinement et le maniérisme italiens, l'héroïsme épique (en référence permanente à la mythologie, dieux et héros) créant ainsi un style personnel, un style primaticien, dont l'influence va gagner toute l'Europe.
Beaucoup de ses peintures, décors et costumes ont disparu mais il reste une très grande collection de ses dessins préparatoires.
À sa mort, le , le Primatice est remplacé par Tristan de Rostaing au poste de surintendant des maisons royales.
Œuvre
Située dans l’aile sud du château de Fontainebleau, la Galerie d'Ulysse formait une grande promenade menant de la terrasse du Pavillon des Poêles au jardin de l’étang et aboutissait à un escalier ouvrant directement sur la grotte des Pins. La réalisation de son décor prit plus de trente ans, commencée sous le règne de François Ier et terminée sous celui de Charles IX en 1571.
Sans aucune reconnaissance esthétique ou souci de préservation du patrimoine, mais par la volonté de construction de nouveaux logements pour la Cour, Louis XV ordonne que les cent-cinquante mètres de galerie peinte à fresque par les maîtres italiens soit purement détruite.
La Porte Dorée ornée en 1534 de deux scènes de l’Histoire d'Hercule, et de six scènes, dont plusieurs tirées de l’Iliade. Beaucoup des dessins préparatoires sont conservés au Musée du Louvre mais aussi dans d'autres musées[3].
Les Bains aménagés, en 1534, au rez-de-chaussée de l'aile qui porte aujourd'hui son nom, furent décorés de stucs, de grotesques et de fresques, dont certaines étaient dues au Primatice. Des dessins conservés au Musée du Louvre et aux Offices de Florence.
Le Cabinet du Roi (1543-1545), décoré à partir de dessins de Primatice, consistaient en représentation de Héros et de Vertus, associés par couple sur les portes des armoires. Deux tableaux de mêmes dimensions étaient accrochés l’un au-dessus de l’autre sur la cheminée : Le Maître de la Maison de Joseph faisant fouiller les bagages de ses frères et Les Cyclopes fabriquant les armes des amours dans la forge de Vulcain[3],[10]. Devenu grand cabinet en 1737, la pièce est aujourd'hui décorée dans le style Louis XV. Il nous reste les études préparatoire du Primatice[3] conservées au Louvre.
Le Plafond du Cabinet du Roi qui a été modifié au fil du temps en fonction de l’agrandissement de la pièce, a toujours été un plafond à caisson. Les remaniements n’ont pas empêché que, de réfection en réfection, l’iconographie du décor de la pièce ait été maintenue. L’actuel plafond peint par François Boucher en 1751 reprend la découpe et le sujet d’une composition de Primatice, datant de 1561 connue par deux dessins (La Course des chars du Soleil et de la Lune)[3].
La Galerie d'Ulysse (1545-1546) comportait près de 58 tableaux connus aujourd'hui par les dessins préparatoires du Primatice conservés principalement au Musée du Louvre[3], mais aussi dans d'autres musées. Elle se trouvait dans l'aile sud du château, surélevée d'un étage vers 1545-1546. Elle est devenue aujourd'hui, l'aile Louis XV.
La Salle de bal à Fontainebleau (1552-1556) dont la construction débuta sous François Ier, et fut achevée sous Henri II. Encore conservée de nos jours, elle consiste en une double loggia au premier étage entre la porte Dorée et la chapelle Saint-Saturnin. Elle a été peinte par Nicolò dell'Abate, sur des dessins du Primatice. Son programme iconographique, encore incomplètement expliqué, exalte l’Amour, l’Harmonie et la Concorde[3].
La Chambre du Roi (1570[3] nouvellement décorée sous Charles IX, par Primatice qui en avait conçu le décor sous François Ier. Il fit de nouveaux dessins pour les grandes peintures représentant des sujets tirés non plus de l’histoire de Proserpine mais de l’Iliade et, en 1570, Nicolò dell’Abate fut payé pour leur réalisation. L’ancien décor fut pour le reste conservé. Les dessins préparatoires sont conservés au Musée du Louvre et au British Museum de Londres.
On retrouve également des dessins de statues, de Muses, de costumes pour les mascarades.
Aucun document n’atteste que Primatice a travaillé pour le château d’Anet, construit par Philibert Delorme pour la favorite d’Henri II, Diane de Poitiers. Mais un de ses dessins, annoté a annet (Phèdre et Hippolyte), est sans doute un projet pour les vitraux commandés au maître verrier Nicolas Beaurain en 1548. Une description de ceux-ci, écrite au XVIIIe siècle par un visiteur anonyme, mentionne la représentation de sujets rares, tels que la mort de Chioné, dont il existe – ce n’est sans doute pas un hasard – des dessins par Primatice. À Anet, le style de Primatice était également visible dans les anges porteurs de instruments de la Passion sculptés en bas-reliefs à la voûte de la chapelle (in situ) et dans le groupe de la Diane chasseresse qui surmontait l’une des fontaines (aujourd’hui au Louvre)[3].
Les émaux des douze apôtres pour François Ier et Henri II, 1546-1547[3].
En , peu après la mort de François Ier, le peintre Léonard Limosin livra à Saint-Germain-en-Laye douze apôtres peints en émail d’après des cartons en couleur de Michel Rochetel eux-mêmes faits d’après des dessins de Primatice (Étude de drapé pour saint Paul et Étude de drapé pour saint Thomas). Selon les souhaits de François Ier, dont les plaques émaillées portent le « F », ces douze apôtres auraient dû orner les douze pilastres de la chapelle Saint-Saturnin du château de Fontainebleau[11]. Le nouveau roi, Henri II, en décida autrement et les fit placer dès 1552 dans des boiseries la chapelle du château d'Anet. Ils sont aujourd’hui au musée des beaux-arts de Chartres. Leurs cartons servirent pour la réalisation d’une seconde série non plus au chiffre de François Ier mais à celui de Henri II
Étude de drapé pour saint Paul, sanguine, rehauts de blanc (oxydés), musée du Louvre
Étude de drapé pour saint Thomas, sanguine, rehauts de blanc (oxydés), musée du Louvre
Ce bâtiment est aujourd’hui pris dans l’ensemble des bâtiments des Archives nationales.
Primatice a eu la responsabilité des peintures des étuves et de celles de la chapelle dont il a remanié le gros-œuvre.
Il confie la réalisation de ces dernières à partir de ses dessins à Nicolò dell'Abate qui ne commença à y travailler qu’en .
Ce décor a été détruit sous l’époque napoléonienne[3].
Thèmes particuliers traités
L’Histoire de Cadmus, vers 1541-1544
Dix dessins et estampes témoignent du fait que Primatice a imaginé un cycle de l’histoire du fils du roi Agénor de Tyr, Cadmus, qui partit à la recherche de sa sœur, Europe, enlevé par Jupiter, et qui, lors de ses pérégrinations, fonda la ville de Thèbes en Béotie et épousa Harmonie, la fille de Mars et de Vénus.
La destination de ces compositions, qui formaient un cycle, demeure inconnue.
L’importance de l’architecture dans chacune des scènes a amené les spécialistes à envisager l’intervention ou l’influence d’un architecte, Serlio ou Vignole, mais on ne doit pas exclure une réalisation personnelle de Primatice[3].
↑Carmelo Occhipinti, Primaticcio e l'arte di gettare le statue di bronzo. Il mito della 'seconda Roma' nella Francia del XVI secolo, Roma 2010
↑ abcdefghijklm et nDossier de presse de l'exposition L’Italie à la cour de France - Primatice, maître de Fontainebleau, 1504 -1570, Paris, musée du Louvre, 25 septembre 2004 - 3 janvier 2005 (les descriptions et compléments en sont repris quasi intégralement)
↑Autrefois attribué à Parmigianino, à Pontormo, à Bertoja ou à Tibaldi, mais mentionné dès 1606 dans une collection parisienne sous le nom de Primatice, cette peinture est un des très rares tableaux conservés de l’artiste.
↑Grâce à une nouvelle interprétation des Comptes des Bâtiments du roi, publiés en 1877-1880 par Léon de Laborde, la date des travaux de décoration du cabinet du Roi a pu être restreinte à une fourchette 1543-1545, contre 1541-1546 auparavant. Thomas Clouet, « Fontainebleau de 1541 à 1547. Pour une relecture des Comptes des Bâtiments du roi », dans Bulletin monumental, 2012, p. 206-207 (résumé)
↑Thomas Clouet, « Fontainebleau de 1541 à 1547. Pour une relecture des Comptes des Bâtiments du roi », dans Bulletin monumental, 2012, p. 218-219 (résumé).
Sylvie Béguin, « Primatice et Bologne », dans Giovanna Perini (dir.), Il luogo ed il ruolo della città di Bologna tra Europa continentale e Mediterranea, actes du colloque du CIHA, Bologne, , Bologne, Nuova Alfa, 1992, p.245-263.