Alkaphrah est aujourd’hui le nom approuvé pour κ UMa par l’Union astronomique internationale (UAI)[8]. C’est un terme qui vient de l’arabe mais qui exige que l’on s’y prenne en deux temps.
Au départ, nous avons l’arabe الفزة al-Qafza’, « le Saut »[9],[10], plus précisément en l’occurrence الثانية القفزة al-Qafzat al- Ṯāliṯa, « le Troisième Saut », qui en peut se comprendre que si l’on se réfère à la série des الظباء قفزات Qafzāt al-Ẓibā’, « les Sauts de Gazelles », dans le ciel arabe traditionnel, tel qu’il est décrit par ᶜAbd al-Raḥmān al-Ṣūfī (964). On nomme ainsi, selon lui, les six étoiles situées sur les trois pieds de l’Ourse touchant le sol : ν et ξ UMa forment al-Ūla, soit « le Premier [Saut] », λ et μ UMaal-Ṯāniyya, « le Second », et ι et κ UMa « le Troisième », ce qui nous mène à κ UMa. Chaque « Saut » ressemble à la trace du pied fendu des gazelles, et, toujours al-Ṣūfī donne à ce propos ce dicton arabe[11],[12] :
« Les Gazelles sautèrent lorsque le Lion frappa la terre de sa queue. »
Le nom arabe الثانية القفزة al-Qafzat al-Ṯāliṯa, « le Troisième Saut », est à l’origine de deux appellations pour cette étoile, qui résultent de la troncation de ce nom :
Talitha Australis. On trouve Talitha pour ι UMa chez Richard Hinckley Allen[13], ce qui a autorisé Julius D. W. Staal, désormais repris par plusieurs catalogues sur la toile, de désigner les deux étoiles du couple ι et κ UMa par leur position : ι UMa de Borealis et κ UMa d’Australis[14],[15].
El Kaphzah. À partir de Thomas Hyde (1665) qui transcrit ‘AlKáphza’ Prima le nom donné pour ν et ξ UMa dans le Catalogue d’al-Tīzīnī[16]. Édité en complément des زيجِ سلطانی Zīğ-i Sulṭānī ou « Tables sultaniennes » d’Uluġ Bēg (1437)[17], le philologueFriedrich Wilhelm Lach écrit notamment ‘el-kaphzah’ pour les couples λ/μ UMa et ν/ξ UMa, mais en oubliant ι et κ UMa[18], ce dont s’empare Johann Elert Bode pour affecter le nom El Kaphzah pour le couple ι et κ UMa dans son Uranographia (1801)[19].
Alkaphrah, qui reprend la transcription de Thomas Hyde en substituant un /r/ au /z/ de ‘AlKáphza’, ignoré par Richard Hinckley Allen (1899), est relevé dans New Standard Dictionary de Funck & Wagenalls en 1947, et dans le Webster, International Dictionary de 1949 par Paul Kunitzsch (1959)[20],[21].
↑(ar/fr) Hans Karl Frederik Christian Schjellerup, Description des étoiles fixes composée au milieu du Xe siècle de notre ère par l'astronome persan Abd-al-Rahman Al-Sûfi. Traduction littérale de deux manuscrits arabes de la Bibliothèque royale de Copenhague et de la Bibliothèque impériale de Saint-Pétersbourg…, Saint-Pétersbourg : Eggers et Cie, 1874, repr. Fuat Sezgin, Islamic mathematics and Astronomy, vol. XXVI, Frankfurt am Main : Institut für Geschichte der arabisch-islamischen Wissenschaft an der Johann Wolfgang Goethe-Universität, 1997, pp. 58-59 (fr.), p. 60 (ar.).
↑(la) Johann Elert Bode, Uranographia, sive astrorum descriptio viginti tabulis aeneis incisa ex recentissimis et absolutissimis astronomorum observationibus, Berlin : apud autorem, 1801, pl. VI.
↑(de) Paul Kunitzszch, Arabische Sternnamen in Europa, Wiesbaden : Otto Harrassowitz, 1959, pp. 24-125.
↑Roland Laffitte, Héritages arabes. Des noms arabes pour les étoiles, Paris : Geuthner, 2005, p. 148.