François Naville suit ses études secondaires à Genève, à l'issue desquelles il obtient la maturité en 1901. Contre l'avis des siens, il décide de faire des études de médecine à l'université de Genève et dans d’autres universités, suisses et étrangères. Il fait des stages à Paris et Munich, et obtient son doctorat en 1910 après une thèse sur l'aliénation mentale[5]. Il se spécialise alors en neurologie et en psychiatrie infantile. Il s'oriente ensuite vers la criminologie clinique, et devient professeur de médecine légale en 1928, puis directeur de l’Institut de médecine légale à l’université de Genève en 1934, ce qui lui vaudra d'être un des experts intervenant dans l'affaire de Katyn en 1943, et d'entrer ainsi dans l'histoire. Son cursus se poursuit comme président du Conseil de surveillance psychiatrique et médecin-inspecteur des classes d’enfants anormaux du canton de Genève, ainsi que président de la Société suisse de neurologie entre 1930 et 1932, et doyen de la faculté de médecine de Genève de 1948 à 1950.
Retiré en 1956, il est cependant appointé comme expert dans l'affaire Jaccoud qui se déroule entre 1958 et 1960, et procède à l'autopsie de la victime[6].
« Le 13 avril 1943 la radio allemande communique la découverte du charnier contenant des cadavres d’officiers polonais dans la forêt de Katyn, près de Smolensk. Les recherches ultérieures montrent qu’il s’agit d’officiers emprisonnés par les Russes en automne 1939, qui n’avaient pas donné de leurs nouvelles depuis le printemps 1940. Le CICR refuse de s’occuper de cette affaire sans accord préalable de l’Union soviétique. À la suite de ce refus, les Allemands, de leur propre gré, réunissent une commission d’experts internationale et chargent celle-ci d’examiner les fosses communes à Katyn »[2].
Le professeur François Naville, directeur de l’Institut de médecine légale de l’Université de Genève, sans avoir ni le soutien ni l'interdiction du Conseil fédéral, accepte cette invitation, attiré par l'intérêt scientifique que présente cette affaire sur le plan médico-légal[3].
« [Il] est le seul expert vraiment neutre dans cette commission. Fin avril 1943 ses membres visitent les fosses communes à Katyn et concluent que les exécutions ont eu lieu au printemps 1940, c’est-à-dire dans la période où ce territoire se trouvait sous contrôle soviétique »[2].
En avril 1946, appelé à la barre de Nuremberg par Göring afin de réaffirmer l’innocence des Allemands à Katyn, il refuse de s'y rendre, sans toutefois revenir sur ses conclusions, malgré de nombreuses pressions, en particulier de la part des Soviétiques[3],[7].
« Le , au Conseil d’État de Genève, le député du parti du travail (communiste) M. Jean Vincent pose la question sur le rôle joué par le professeur Naville, dans « l’Affaire de Katyn ». M. Vincent lui reproche d’avoir accepté de se rendre à Katyn et prétend que le massacre de Katyń était l’œuvre des Allemands eux-mêmes. Dans sa réponse le professeur Naville décrit les conditions d’appel et d’acceptation de sa mission et maintient les conclusions d’expertise de 1943. Il déclare qu’en signant le rapport sur Katyn il n’a « nullement cherché à rendre service aux Allemands, mais exclusivement aux Polonais et à la vérité ».
Il ne trouve, malheureusement, ni compréhension, ni soutien de la part du CICR et du Département politique fédéral. Ces institutions ont agi d’une façon strictement pragmatique, avec le seul but de ne pas offenser le gouvernement soviétique et d’éviter les complications diplomatiques. Elles voulaient « ne pas savoir » qui était responsable du massacre de Katyn. C'est seulement en 1990[8] que la découverte du professeur Naville est acceptée et confirmée par les autorités soviétiques »[2],[3].
Cette affaire l'aura marqué à tel point qu'il déclarait « avoir souffert toute sa vie d'avoir participé en 1943 à la Commission constituée par l'Allemagne pour déterminer les auteurs du massacre de Katyn et ayant révélé la vérité, alors niée par l'URSS »[9].
Après sa mort, sa famille verse au CICR ses archives relatives à sa participation à cette commission d'enquête internationale constituée en 1943 (28-30 avril) par l'Allemagne[10].
Publications médicales
1910 : Du rôle des classes spéciales dans l'éducation des enfants anormaux et de leur organisation actuelle, à Genève en particulier
1914 : L'éducation des enfants anormaux en Suisse
1917 : Étude anatomique du névraxe dans un cas d'idiotie familiale amaurotique de Sachs
1919 : Notice nécrologique sur le docteur Paul-Louis Ladame, de Genève
1924 : Titres et publications du Dr François Naville
1925 : Note sur l'arriération mentale du type malais (variété de l'arriération mongolienne)
1926 : Note sur quelques cas de paragraphie infantile
1928 : Institute of Legal Medicine at Geneva
1932 : L'action des électrocutions industrielles sur le système nerveux
1932 : Symptômes neurologiques consécutifs aux électrocutions industrielles : rapport présenté au Congrès international de neurologie de Berne
1935 : Contribution à l'étude des équivalents épileptiques chez les enfants
1937 : Aperçu sur l'histoire de la médecine à Genève
1937 et 1938 : Aperçu sur l'histoire de la médecine à Genève
1938 : Résumé des publications de F. Naville, professeur ordinaire de médecine légale à l'Université de Genève
Un film documentaire polonais de 2014 réalisé par Grażyna Czermińska, intitulé Poświęcając życie prawdzie (« Consacrer sa vie à la vérité »), traite du sort des membres de la commission d'enquête internationale Katyń après 1943, notamment de François Naville[15].
Notes et références
↑(en) International Katyn Commission, « Commission Findings », Transcript, Smolensk 30 April 1943, Warsaw Uprising by Project InPosterum, (consulté le ).
↑ abcde et fVincent Monnet, Université de Genève, « Tête chercheuse : François Naville, un savant face à l’histoire », Campus – Le magazine scientifique de l'UNIGE, no 88, novembre 2007 – janvier 2008 (lire en ligne, consulté le )..
↑WorldCat Identities, « Naville, François » (Liste de publications), sur www.worldcat.org (consulté le ).
↑Le président Kaczyński périra le à Smolensk dans l'accident de l'avion qui le menait aux cérémonies commémorant le 70e anniversaire du massacre de Katyn.
Vincent Monnet, Université de Genève, « Tête chercheuse : François Naville, un savant face à l’histoire », Campus – Le magazine scientifique de l'UNIGE, no 88, novembre 2007 – janvier 2008 (lire en ligne, consulté le )..