Fils de Désiré Caën, employé, et de Céline Feize, couturière, fille de graveur, le critique et romancier Ernest La Jeunesse, figure littéraire très présente dans le paysage intellectuel français de la Belle Époque, fut parfois injustement oublié[1].
En 1898, il lance le journal Ouste ! (« texte et icônerie d'Ernest La Jeunesse »), vendu 10 centimes.
En 1906, Guillaume Apollinaire, qui l'appréciait, le présente à Max Jacob[2]. D'autres grands témoins de l'époque parlent de La Jeunesse, pas toujours en termes positifs, tels Paul Léautaud ou Jules Renard ; plus tard André Billy le cite comme l'un des brillants chroniqueurs de son temps[3].
S'essayant très jeune à devenir un dramaturge, mais sans trop y croire, il est défendu par Octave Mirbeau qui, toujours prompt à défendre les opprimés, ne supporte pas que l'on agresse ce jeune-homme à cause de son physique. Il avait une voix de fausset, des excentricités vestimentaires. Il fut gentiment caricaturé par Alfred Jarry sous le nom d'« Allmensch Severus » dans Les Jours et les Nuits. Découvrant ses origines juives, Léon Daudet voit en lui, dans Au temps de Judas, « un épouvantail ». Selon Edmond de Goncourt, beaucoup de ses notoires contemporains craignent sa langue de vipère et la délicatesse méchante de son ironie[4].
En 1907, il publie chez Bosc et Cie, Le Forçat honoraire, roman immoral dans lequel c'est l'assassin qui prend la parole. Dans sa préface, La Jeunesse s'attaque à la littérature policière qui commence à fleurir, avec ses détectives, surhommes qui toujours punissent le méchant, littérature qui « endort », avec ses héros de papier, « chiures d'encre », toujours dans « le Camp des bourgeois »[5].