Le don des vaisseaux correspond aux souscriptions des provinces, des villes, des corps constitués ou des individus données à l'État français pour construire des navires de guerre. Ces dons se renouvelèrent à plusieurs reprises, d'abord en 1761-1766 sous Louis XV, puis en 1782-1790 sous Louis XVI et enfin sous la Révolution et l'Empire.
Les fortes sommes offertes permettent la construction de dix-huit vaisseaux.
Appel aux dons
Tout commence avec la demande en 1761 du duc de Choiseul (alors secrétaire d'État à la Marine) à son ami le comte de la Roche-Aymon (alors archevêque de Narbonne et président des États de Languedoc) de proposer aux délégués du Languedoc« d'offrir à Sa Majesté un vaisseau de ligne de 74 pièces de canon et de donner par cette démarche au reste de la France (...) le signal de ce que peuvent et doivent faire les sujets véritablement dignes du meilleur des maîtres (...). Il n'est point de bon Français qui ne se sente animé du désir de tout sacrifier pour concourir aux efforts du roi et du ministre sage et éclairé pour restaurer la marine française »[2].
Cet exemple est suivi dès l'année suivante par les États d'autres provinces (Bretagne, Bourgogne, Artois, Flandres...), des villes (Paris, Bordeaux, Montpellier, Marseille, etc.), des institutions (les Postes, les marchands de Paris, les fermiers généraux, les chambres de commerce...) et de simples particuliers. L'émulation, le patriotisme et la fierté font que chaque donateur veut que son vaisseau soit plus grand que celui des autres ; le financement se fait par des emprunts et par des dons.
« Non seulement les provinces donnèrent, dans cette occasion, des marques distinguées d'un zèle rare, mais M. de Choiseul m'a dit qu'il recevait journellement des lettres de particuliers qui lui offraient de l'argent. Il en eut une entre autres d'un simple gentilhomme de Champagne du nom duquel malheureusement il ne s'est pas souvenu, et qui lui mandait que n'étant pas riche et ayant des enfants, il n'était pas trop en état de donner ; que cependant, comme ils étaient en bas âge, il pouvait se passer de mille écus qu'il avait amassés et qu'il les lui envoyait pour être employés au service du roi. M. de Choiseul lui répondit que sa Majesté, après les avoir acceptés, les lui restituait pour qu'ils aidassent à l'éducation de ses enfants, qui ne pouvaient manquer, avec un tel père, de lui rendre de grands services. »
Sur les trente vaisseaux lancés dans la décennie 1760-1769, dix-sept sont financés par les dons (un total de 13 millions de livres), notamment les deux seuls trois-ponts français (la Ville de Paris et la Bretagne) employés au début de la Guerre d'Amérique :
Martine Acerra et André Zysberg, L'essor des marines de guerre européennes : vers 1680-1790, Paris, SEDES, coll. « Regards sur l'histoire » (no 119), , 298 p. [détail de l’édition] (ISBN2-7181-9515-0, BNF36697883)
Jean-Michel Roche (dir.), Dictionnaire des bâtiments de la flotte de guerre française de Colbert à nos jours, t. 1, de 1671 à 1870, éditions LTP, , 530 p. (lire en ligne)