Sa fondation daterait de peu après celle d’une association semblable : la Cour amoureuse à Paris, érigée le . Coigneau[2] pense que la chambre bruxelloise Den Boeck serait le « complément » de cette société parisienne. Les deux auraient été initialement des institutions prestigieuses et élitaires : paraître sur la liste de membres affirmerait alors la valeur symbolique de l’appartenance à une société prestigieuse. Coigneau rappelle que le mot moyen néerlandais « boeck » a été employé comme nom de cette société pour cause de ses connotations : à la fois il désigne un livre d’un type particulier, le registre, et renvoie au Livre de Vie dans lequel sont inscrits les noms des élus de Dieu.
Le milieu social dont sont issus les membres de Den Boeck se situe proche de la cour. Ainsi, en février 1417, la société participe à un bal avec banquet à la cour de Brabant. Pour la première fois, les « compagnons du livre » - gesellen van den Bouke - sont mentionnés dans les comptes de la cour de Brabant à l’occasion de l’affiliation du duc Jean IV de Brabant, le ; Philippe le Bon, un de ses successeurs bourguignons portant le titre de duc de Brabant, deviendra également membre de cette chambre de rhétoriquenéerlandophone, en 1437[3]. Le , le duc offre aux compagnons un repas honoré par la présence de sa personne ainsi que de celle de courtisans. Le , le règlement de cette compagnie est approuvé par le duc. Trois postes des comptes de la cour indiquent que le duc bénéficiait des services de pipers, des joueurs d’instruments à vent liés au Boeck, qui jouaient pour le duc ou remplissaient des devoirs à son compte. Ces musiciens auraient même joué pour le duc toute une année durant. Les indices sont toutefois insuffisants pour affirmer avec certitude que Den Boeck soit déjà une société rhétoricienne à cette époque.
Quoi qu’il en soit, la société appelée dans les comptes de la ville de 1485-1486geselscap van der Tyteloizen était devenue, sans contredit, une chambre de rhétorique disposant de ses propres locaux (speelhuys) mais, toutefois, n’apparaissant dans les comptes de la ville de Bruxelles pour la première fois qu’en 1498-1499 sous le nom Den Boeck.
Fonction sociale et caractéristiques
Comparé aux nouvelles chambres de rhétorique érigées à partir des années 1470 dans le contexte d’un mouvement urbain de démocratisation et recrutant vraisemblablement auprès de couches sociales moins élevées que celles qui avaient fondées le Boeck, ce dernier, en tant que société poétique particulièrement élitiste et dont les activités semblent s’être concentrées presque exclusivement autour des concours de « refrains », a raté l’évolution des chambres vers l'assistance à l’organisation de toutes sortes de manifestations, festivités et célébrations urbaines. En outre, la Grande guilde des arbalétriers était devenue, à partir de 1488, un concurrent important quant au genre théâtral, puisque c’est en cette année-là que celle-ci obtint le privilège d’organiser le plus important événement théâtral patronné par la ville : la représentation annuelle, le jour de la procession, d’une des sept Joies de Marie[4].
En 1512, la chambre organisa un concours de louanges auquel aurait participé Anna Bijns. Le , la chambre organisa un concours de refrains de tendance particulièrement calviniste à une époque où la ville de Bruxelles était gouvernée par les calvinistes[6].