Warneton signifie clos de Warnes[3] ou encore ferme close de Warin. Provenant de l'ingévon oriental (saxon) thun, germanique *tûna « enclos », et de la contraction avec la dénomination des Warnes ou un anthroponyme saxon ou franc (implantation saxonne à l'époque mérovingienne)[4],[5],[6].
Une autre interprétation germanique serait enceinte fortifiée (du saxonwaeren « protéger, défendre » etthun, germanique *tûna « enclos »)[7]. Cette signification a été réévaluée en 1972 pour lui préférer la précédente[3].
Des fouilles archéologiques de la motte castrale de Warneton datent les premières occupation au Ve millénaire avant notre ère[8]. En 2017, des fouilles identifieront les vestiges d'un site gallo-romain[9]. Warneton étant situé sur les limes de l'Empire romain, ces vestiges confortent l'hypothèse d'une occupation du territoire positionné stratégiquement sur la voie romaine Cassel-Tournai et, plus tard, l'axe commercial Ypres-Lille. La date de la fondation de Warneton est indéterminée.
Moyen Âge
La petite agglomération urbaine s'est développée dès le XIe siècle et se composait d'une église ainsi que d'une structure fortifiée[10]. Vers 1080, un chapitre de chanoines séculiers est fondé par le seigneur de Warneton, sous l'influence de Jean Ier de Warneton[11], évêque du diocèse de Thérouanne. L'église obtiendra le statue d'abbaye en 1138 lié à la congrégation d'Arrouaise. Quelques établissements comme une boucherie et un marché sont cités au XIIe siècle, mais il faut attendre le XIIIe siècle pour que la ville devienne bourgeoise.
Warneton a été fortifié très tôt, avant 1127, puisque celles-ci ont été détruites lorsque Bertulphe Errembault se réfugia chez son cousin Alard de Warneton après le meurtre de Charles Ier de Flandre[12]. Une enceinte fortifiée est visible sur les plus anciens sceaux de la ville en 1226, et une charte du comte de Flandre confirme la présence de cette fortification. En 1382, après destruction, une reconstruction de grande ampleur a lieu sur ordre de Yolande de Bar, reconstruisant également le château. Ce plan de 1382 est conservé aux Archives du Royaume[13].
Les seigneurs possédaient un château au pied d'un promontoire dans l'angle formé par la Lys et la Douve. Ce site archéologique est nommé Motte Castrale. D'abord dirigé par la famille de Péronne, la seigneurie passa aux de Béthune lors du mariage d'Alix de Péronne (en 1105), dame de Warneton depuis le décès de son père Robert II de Péronne en 1101, avec Robert IV Le gros de Béthune[14]. En 1246, Mahaut de Béthune épouse Gui de Dampierre qui devient Comte de Flandre. Il décidera d'établir un Bailli comtal afin d'assurer la gestion de Warneton, ce qui mènera à la formation de la châtellenie de Warneton au moins en 1250[15].
Warneton a souvent été la résidence de comtes de Flandre dont Robert de Cassel qui y est enterré dans l'abbatiale en 1331, miraculeusement retrouvé lors de la Reconstruction de l'église de Warneton[16].
L'activité économique de la draperie s'y développa aux XIIIe et XIVe siècles à la suite de la création d'un axe commercial reliant Ypres à la Lys, puis jusqu'à Lille, au détriment de la ville voisine Comines qui jouait ce rôle jusqu'au XIIIe siècle[17].
La châtellenie de Warneton
La seigneurie devient châtellenie vers 1250 et comprend la paroisse de Warneton, la ville, sa bourgeoisie, ses faubourgs. La rive sud de Warneton, actuellement situé à Warneton-Sud faisait également partie de ce territoire jusqu'en 1713, occupé par quelques fermes. Le périmètre incluait également la paroisse foraine composée de sept gildes dont l'une portait le nom de Plockster, l'actuelle Ploegsteert. A ceci s'ajoutait enfin les paroisses de Kemmel et Wulverghem. Une portion exclavée de la châtellenie se trouvait entre Merville et Armentières et fut cédé à la France en 1769 en l'échange des paroisses de Neuve-Église et Dranoutre. Au plus fort de sa superficie, la châtellenie mesurait environ 80km²[10].
La châtellenie possédait également des fiefs exclavés de leur territoire comme Kerkhove et Waarmaarde dont l'autorité et le produit de la dîme revenaient au château de Warneton. Cette partie se prénommait Nouveau Bien ou Nieuwgoed[18].
Plusieurs conflits ravagent la ville en 1527, 1554 et 1566. Le plan de Jacques de Deventer révèle que les fortifications n'existent plus. Le château, l'abbaye et l'église sont à l'écart du bourg et de l'Hôtel de Ville. Après 1577, le seigneur Guillaume de Bar fait construire de nouveaux fossés et une nouvelle porte. En 1593, Philippe II autorise le magistrat de Warneton à lever un impôt spécial pour améliorer les fortifications. Le château sera progressivement laissé à la ruine comme l'atteste le croquis de Sanderus dédié à Jean-François Desideratus de Nassau-Siegen qui était alors seigneur de Warneton. L'hôtel de Ville dessiné sur la Grand Place survivra jusqu'à la Première Guerre mondiale[10].
En 1645, la ville est prise par les armées de Louis XIV. Elle sera occupée et renforcée. En 1689, la reprise des hostilités avec la Ligue d'Augsbourg et de nouveaux remparts sont érigés sur l'ordre du maréchal d'Humières, gouverneur de Lille. Ce nouveau fossé, adossé à la Douve, protège le nord de la ville.
En 1706, à la suite de la bataille de Ramillies, la garnison française est renforcée et travaillera pendant trois mois aux remparts. Le , ils évacuent Warneton avant que celle-ci ne soit prise par les armées hollandaises. Plusieurs prises se succèdent jusqu'au . Ils quitteront définitivement celle-ci en 1713, à la suite des Traités d'Utrecht qui délimiteront de nouvelles frontières. Le Traité de la Barrière (1715) intègrera Warneton à la structure des garnisons des Provinces-Unies. Un commandant et un détachement de 20 hommes y résideront désormais.
Lors du déclenchement de la Guerre de Succession d'Autriche, les armées françaises pénètrent les Pays-Bas autrichiens par Warneton. Le Duc d'Aumale Louis-Charles de Bourbon fait travailler 1000 prisonniers dès le lendemain de la capture afin d'ériger de nouvelles fortifications[10].
Après cette guerre, elles disparaitront définitivement et ne laisseront leur trace que dans la toponymie de deux rues.
Trois épizootie de peste bovine sont également à noter au XVIIIe, dont les plus importantes de 1744 à 1746 et de 1770 à 1776[20].
L'abbé Courouble appartient vient d'une famille d'ouvriers et d'artisans mouscronois.Il naît le 16 juin 1840 et sera ordonné à 24 ans. Dès 1869, il devient vicaire de Warneton et publie six ans plus tard son ouvrage de référence[N 1]. C'est grâce à son travail d'historien que le culte de Jean Ier de Warneton est réinstauré en 1875, l'année de la publication de son Histoire de Warnêton[21].
Critiques et réserves
La violence de la Première Guerre mondiale dans la région a provoqué la disparition de nombreuses sources citées par l'abbé Courouble. La qualité de son travail, sur les seigneurs de Warneton, est médiocre[N 2] et comporte plusieurs erreurs. Certains points, comme l'origine de la châtellenie ne sont pas abordés. L'ouvrage est à considérer comme un important témoin du XIXe siècle d'archives et sources aujourd'hui inexploitables[22].
La ligne de front traverse Warneton durant le conflit. La partie ouest de la ville est occupée par les britanniques et la partie est occupée par les allemands. La stabilisation du front conduit à la destruction progressive de la ville et de toute la région.
Un vaste réseau de tunnels profonds de 8 à 10 mètres est creusé sous les ruines. Ces couloirs menaient à des abris à l'épreuve des bombes et ils seront comblés après la guerre.
Les habitants qui avaient été évacués sont revenus après la guerre mais ont dû rester dans des logements provisoires jusqu'à ce que la reconstruction s'achève selon un nouveau plan. Aucun bâtiment datant d'avant la première guerre mondiale n'a survécu au conflit.
Source : INS, Note : 1831 à 1970 = recensement, 1976 = population au 31 décembre
1856 : séparation de Ploegsteert en 1850
1920 : déclin de la population dû à la Première Guerre mondiale
Bibliographie
Jean-Marie Duvosquel, Histoire de Warneton et de Ploegsteert, réédition et analyse du texte original de Jean-Baptiste Courouble, Mémoires de la Société d'Histoire de Comines Warneton, T.IV - 1, 1974
Jean-Baptiste Courouble, Histoire de Warnêton, Suivie de la vie du Bienheureux Jean, évêque de Thérouanne, Vandenberghe-Denaux, Bruges, 1875
↑qualitatif employé par J-M Duvosquel dans sa réédition.
Références
↑Jean Germain, Guide des gentilés : les noms des habitants en Communauté française de Belgique, Bruxelles, Ministère de la Communauté française, (lire en ligne).
↑ a et bJacques Devleeschouwer, « L'étymologie de Warneton. Lettre de M. J. Devleeschouwer du 3 juin 1972. », Revue internationale d'onomastique, vol. 24, no 3, , p. 229–232 (lire en ligne, consulté le )
↑(nl) Maurits Gysseling, Toponymisch Woordenboek van België, Nederland, Luxemburg, Noord-Frankrijk en West-Duitsland (vóór 1226), Tongres, Belgisch Interuniversitair Centrum voor Neerlandistiek, (lire en ligne)
↑Jules Herbillon, Les noms des communes de Wallonie, Bruxelles, Crédit communal, coll. « Histoire » (no 70),
↑A. Vincent, Les noms de lieux de la Belgique, Bruxelles,
↑E. Mannier, Etudes étymologiques, historiques et comparatives sur les noms de villes, bourgs et villages du département du Nord, Paris, 1861
↑J. Bourgeois, « Warneton : fouilles dans la motte du Château », L'Archéologie en Hainaut Occidental (1983-1988),
↑J. Bourgeois, Un nouveau site gallo-romain à Warneton ?, Mémoires de la Société d'Histoire de Comines-Warneton T.48, 2018
↑ abc et dJean-Marie Duvosquel et Claire Lemoine-Isabeau, La région de Comines-Warneton : sept siècles de documents cartographiques et iconographiques, Crédit communal, coll. « Histoire Pro civitate », (lire en ligne)
↑Bernard Delmaire, « L’organisation religieuse de la vallée de la Lys entre Aire et Comines au Moyen Âge », Revue belge de Philologie et d'Histoire, vol. 89, no 1, , p. 239–253 (DOI10.3406/rbph.2011.8170, lire en ligne, consulté le )
↑Galbert de Bruges (10 ?-1134) Auteur du texte, Histoire du meurtre de Charles Bon, Cte de Flandre (1127-1128) / par Galbert de Bruges. suivie de poésies latines contemporaines / publ. d'après les ms, avec une introd. et des notes, par Henri Pirenne,..., (lire en ligne), p. 178 et 181
↑Bruxelles, Archives générales du Royaume, Trésor de Flandre, 1ère série, n°1381
↑Henri Ernest Adolphe Nowé, « Plaintes et enquêtes relatives à la gestion des baillis comtaux de Flandre aux XIIIe et XIVe siècles », Revue belge de Philologie et d'Histoire, vol. 3, no 1, , p. 75–105 (DOI10.3406/rbph.1924.6275, lire en ligne, consulté le )
↑Richard Leson, « RECONSTITUTION DE LA TOMBE DE ROBERT DE CASSEL À WARNETON », Mémoires de la Société d’Histoire de Comines-Warneton et de la région, (lire en ligne, consulté le )
↑Jean-Marie Duvosquel, « Le chemin d'Ypres à Comines au début du XIVe siècle ou l'accès des Yprois à la Lys. », Revue du Nord, vol. 76, no 305, , p. 255–273 (DOI10.3406/rnord.1994.4901, lire en ligne, consulté le )
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↑R. De Herdt, La peste bovine et le cheptel de la châtellenie de Warneton au XVIIIe siècle, Mémoires de la Société d'Histoire de Comines-Warneton et sa région, 1976
↑Jean-Marie Duvosquel, Histoire de Warneton et de Ploegsteert - nouvelle édition, Comines, Mémoires de la Société d'Histoire de Comines Warneton, T. IV - 1, , 240 p., p. 9-19