Lors des guerres de Religion, il se montre un obéissant commandant de l'armée royale. Il prend Brouage, place forte huguenote lors de la sixième guerre de Religion (1577)[4], enlève La Mure aux protestants du Dauphiné en 1580 lors de la septième[5] et mène avec difficulté le long et violent siège de Castillon-la-Bataille en 1586.
Le Ligueur
Dès 1584, Henri de Guise refonde la Ligue pour en prendre la tête[6]. Ses frères dont le duc de Mayenne le soutiennent. Ensemble, ils signent le mystérieux traité de Joinville le , une alliance entre l'Espagne et les Guise dans le but de soutenir les prétentions du cardinal de Bourbon à la succession au trône de France[7],[8]. Pour les conjurés, il est hors de question d'accepter le protestant Henri de Navarre comme successeur.
Le roi Henri III maintient toutefois Charles dans un commandement militaire. Accompagné de Matignon, le Ligueur est envoyé combattre les protestants dans l'Ouest et le Sud-Ouest (Dordogne, Montségur). Il se trouve en Dauphiné quand il apprend l'assassinat de ses deux frères les 23 et . Après s'être assuré du soutien de la Bourgogne, son gouvernement, il se dirige vers Paris, où les Ligueurs, en quête d'un nouveau chef, l'attendent impatiemment[9].
Dans la capitale, le duc de Mayenne, paré du titre inédit de lieutenant général de l'État et Couronne de France, met en place un véritable contre-État ligueur, notamment en s'entourant d'un conseil de gouvernement[9],[10]. Il s'appuie sur le Conseil général de l'Union, cinquante-quatre représentants de la noblesse, du clergé et du tiers état. Henri III essaie de négocier avec ce nouveau chef de la Ligue. En vain. Le roi faillit même être capturé par son adversaire à Tours. Le duc de Mayenne échoue cependant à empêcher le souverain et Henri de Navarre à s'approcher de Paris pour en faire le siège. Il se résout, semble-t-il, à organiser l'assassinat d'Henri III, par le religieux Jacques Clément[11]. Le roi meurt d'un coup de couteau le . Le contesté Henri de Navarre lui succède sous le nom d'Henri IV.
Henri IV vainc Charles de Mayenne à Arques (1589) et à Ivry (1590) mais le duc, aidé par des secours espagnols, tient le principal : Paris. Encore doit-il gérer son alliance avec les autorités parisiennes, notamment le Conseil des Seize. En décembre 1591, il fait pendre les dirigeants les plus extrémistes de la Ligue parisienne qui, eux, venaient de faire pendre Barnabé Brisson, premier président du Parlement de Paris, scellant ainsi la rupture entre la Ligue nobiliaire et la Ligue urbaine. En , il convoque les états généraux qui se réunissent à Paris en 1593 afin de désigner un souverain catholique à la place d'Henri IV. Mayenne aurait présenté sa candidature[7]. Ses manœuvres échouent notamment parce que le Béarnais fait savoir son désir de se convertir.
L'abjuration d'Henri IV réduit les oppositions, notamment celle des Parisiens. Charles de Mayenne abandonne la capitale, qui ouvre ses portes au roi le .
Le Ligueur se réfugie dans son gouvernement de Bourgogne qu'il espère transformer en fief héréditaire. En 1595, une grosse armée espagnole que rejoint la petite troupe de Mayenne entre en Bourgogne. Face aux deux alliés, Henri IV remporte une nouvelle victoire, à la bataille de Fontaine-Française, près de Dijon (). Cette défaite, la perte de la Bourgogne et le ralliement de nombreux princes incitent Mayenne à faire acte de soumission solennelle à Henri IV en novembre 1595. Ce ralliement, négocié, donne lieu à un traité : l'édit de Folembray (). Par ce texte, Mayenne et les princes de Lorraine sont lavés de l'accusation de régicide à l'encontre d'Henri III[12]. Le gouvernement de la Bourgogne est retiré à l'ancien chef de la Ligue en contrepartie de celui d'Île-de-France, moins Paris. Une belle compensation financière[13], la remise de trois places de sûreté (Seurre, Soissons, Chalon-sur-Saône) pour six ans[14] et le maintien de son titre honorifique de grand chambellan assurent une sortie honorable au rebelle. Preuve de son retournement, dès l'année suivante il combat ses anciens alliés, les Espagnols, près d'Amiens[15].
Au point de vue militaire, c'est un capitaine expérimenté mais dépourvu de génie[3]. Ses défaites lors des batailles d'Arques et d'Ivry en dépit d'une nette supériorité numérique, démontrent de piètres qualités militaires mais, à sa décharge, la faible qualité de ses soldats, notamment les milices urbaines, ne l'aide pas dans ces moments critiques[16]. Au fil de sa carrière, le duc s'affirme de plus en plus brutal.
Bien que Charles se montre solidaire de ses frères, Louis de Guise et Henri de Guise, dans la défense du lignage et le combat politique, une sourde rivalité point entre ce dernier et lui à partir de 1584[3]. Autant Henri a du charisme et des manières agréables, autant Charles séduit difficilement les foules d'autant qu'il s'empâte et acquiert une réputation de pingrerie[17],[18]. Sans grand sens politique, ni esprit de décision, il est défiant et rusé[19].
Selon un souvenir de Sully, Henri IV s'amusa lors de la soumission de Mayenne à lui faire visiter le château de Montceaux au pas de charge. Le duc, obèse et souffrant d'une sciatique, en perdit le souffle[20].
↑Les historiens ont donné à ce duc le titre de Charles II car il est le deuxième Charles à être seigneur de Mayenne. Le précédent était Charles Ier, duc baillistre de Bretagne et baron de Mayenne, également appelé Charles de Blois (fils du comte de Blois).
Jacqueline Boucher, « Mayenne, Charles de Lorraine, duc de », dans Arlette Jouanna, Jacqueline Boucher, Dominique Biloghi et Guy Le Thiec, Histoire et dictionnaire des guerres de Religion, Robert Laffont, coll. « Bouquins », (ISBN2-221-07425-4), p. 1088-1092.
Arlette Jouanna, « Le temps des guerres de Religion en France (1559-1598) », dans Arlette Jouanna, Jacqueline Boucher, Dominique Biloghi et Guy Le Thiec, Histoire et dictionnaire des guerres de Religion, Robert Laffont, coll. « Bouquins », (ISBN2-221-07425-4), p. 3-440.