Élevé à la dignité de maréchal d'Empire en 1804 mais trop âgé pour mener campagne (il a cinquante ans), il n'exerce plus sous le régime impérial que des fonctions administratives : il est ainsi gouverneur général des États de Parme et de Plaisance (1806) puis gouverneur et commandant en chef des troupes françaises à Naples (1808). Sénateur et comte de l'Empire, il se rallie à la monarchie après la chute de l'Empereur et devient gouverneur de Paris. Également fait marquis par Louis XVIII, le maréchal meurt le 25 décembre 1818 à soixante-quatre ans.
Biographie
Début de carrière sous l'Ancien Régime
Issu d’une famille aisée établie dans le Languedoc (Grenade) depuis le XVIe siècle et dont une branche a été anoblie par le capitoulat de la ville de Toulouse en 1706, Pérignon entreprend après de bonnes études une carrière militaire. Il obtient un brevet de sous-lieutenant dans le corps des grenadiers royaux en Guyenne en 1769. L'année suivante, il est aide de camp du comte de Preissac. L'édit de Ségur bloquant l'avancement militaire des roturiers et des anoblis récents, il démissionne de ses fonctions et retourne sur ses terres. Il épouse le 14 février 1786, Hélène-Catherine de Grenier ; ils auront onze enfants[1].
Sous la Révolution
Rentré depuis quelque temps déjà dans la vie civile, avec la maturité de l'exercice et des années, il ne tarde pas à s'associer au nouvel ordre des choses. Il accueille les événements de 1789 avec bienveillance et en épouse les idées. Il accepte les fonctions de juge de paix du canton de Montech. C'est dans l'exercice de cette magistrature nouvelle et populaire que les électeurs du département de la Haute-Garonne viennent le prendre pour l'envoyer comme leur représentant élu député à l'Assemblée législative en 1791. Il est alors âgé de trente-sept ans ; il a servi comme officier et siégé comme juge. Ces précédents influeront sur le reste de sa vie et lui enlèveront, soit dans les camps, soit dans les affaires, le caractère de la spécialité. Il siège à la Législative à droite, est membre du comité militaire, mais démissionne au premier cri de guerre pour devenir lieutenant-colonel d'infanterie dans la Légion des Pyrénées.
Il est élu par la Haute-Garonne au Conseil des Cinq-Cents. Le 4messidoran III (), le traité de Bâle réconcilie la France et l'Espagne, et Pérignon, ambassadeur à Madrid, est chargé de cimenter les relations amicales que ses victoires ont rétablies, et de conclure une alliance offensive et défensive. Cette alliance est formalisée par le traité de Saint-Ildefonse en août 1796. Deux ans plus tard, le vice-amiral Truguet le remplace à ce poste important. À la suite d'une liaison avec une espionne royaliste, il est rappelé par le Directoire en 1797 et placé au traitement de réforme.
Remis en activité en 1799, il se voit confier le commandement des troupes de Ligurie. Il reprend son rang de bataille à l'armée d'Italie. Il commande l'aile gauche à la bataille de Novi ; ses deux divisions, aux ordres des généraux Grouchy et Lemoine, gardent les vallées de la Bormida et du Tanaro. Pérignon défend le village de Pasturana mais accablé par le nombre, il tombe couvert de blessures aux mains de l'ennemi le 15 août 1799. Ce n'est qu'en 1800, que les Russes le rendent à la France. Le vainqueur de la bataille de Marengo accueille l'intrépide et malheureux soldat de Novi ; mais déjà âgé de quarante-sept ans, Pérignon ne peut pas prendre place dans le cortège de jeunes capitaines qui se pressent autour du jeune héros.
Sous le Consulat
Bonaparte le fait nommer vice-président du Sénat conservateur en 1801. Retiré de l'armée active, Pérignon rentre ainsi dans la carrière législative par la première magistrature de la République. Le premier Consul le jugeait déjà trop mûr pour le champ de bataille. On peut marquer ici le terme de sa vie militaire. Lorsque le chef de l'État lui rendit l'épée du commandant, ce fut plutôt pour un service de représentation que d'activité. Le traité du 12 septembre 1796 ayant laissé des incertitudes sur la limite entre la France et l'Espagne, Pérignon (qui avait signé ce traité) reçoit le 11 septembre 1802 la mission de régler ces difficultés, en qualité de commissaire extraordinaire. Il se montre très actif au Sénat en faveur du Consulat à vie et de la promulgation de l'Empire. Président du collège électoral de la Haute-Garonne le 10 mars 1804, il présente le 6 mai de la même année au Premier Consul une députation du collège, et termine ainsi son discours :
« Ô Napoléon ! lorsque le monde reste dans le silence de l'admiration en présence de votre renommée, les trente-cinq millions de Français pourraient-ils ne pas consacrer cette si grande prédilection dont le ciel les a favorisés en vous plaçant à leur tête ! Qu'ils vous portent sur le pavois entouré de tous les attributs dignes d'eux et de vous ; qu'en même termes toute votre famille y soit portée, saisie d'un pacte héréditaire indissoluble, et que la postérité soit ainsi forcée à reconnaître que la génération présente sut tester glorieusement et utilement en faveur des générations futures. »
Dix jours plus tard, le Sénat allait saluer Napoléon du titre d'Empereur. Pérignon est mis en possession de la sénatorerie de Bordeaux par disposition consulaire en 1803, avec un revenu annuel de 25 000 francs[2].
Le maréchal Pérignon au service de l'Empire
Le lendemain de son élévation à l'Empire, Napoléon rend un décret (19 mai 1804)[note 1], désignant quatorze maréchaux de France, auxquels sont adjoints, avec le même titre, quatre sénateurs ayant commandé en chef, parmi lesquels Pérignon[3]. Déjà âgé lors de sa nomination, le parcours militaire de Pérignon est derrière lui lorsqu'il reçoit son bâton de maréchal. Lors de la cérémonie du Sacre, Pérignon porte le sceptre de Charlemagne[4]. L'impératrice Joséphine dit à propos de Pérignon dans une lettre adressée à la sœur de ce dernier : « l'Empereur l'aime beaucoup et je lui suis très attachée »[5].
Le reste de sa carrière est essentiellement voué à des tâches administratives. Le maréchal sénateur devient, le 25 prairial an XIII, grand officier de la Légion d'honneur et grand aigle le 13 pluviôse an XIII (1805). Gouverneur de Parme et de Plaisance en 1806, il reçoit en 1808, l'ordre d'aller prendre le commandement en chef des troupes françaises dans le royaume de Naples en remplacement du maréchal Jourdan. La même année, il est nommé grand dignitaire de l'ordre des Deux-Siciles et comte de l'Empire (1808). Il ne quitte Naples qu'au moment où le roi se déclare contre la France. Il commande l'armée napolitaine de Murat pendant ses absences. Il s'éloigne de Murat dès les premiers signes de défection du prince en 1813. Ne conservant plus dès lors que sa sénatorerie, il assiste impuissant aux campagnes de 1813 et de 1814, qui précipitent la chute de l'Empire[4].
Le comte Pérignon avait adhéré aux actes du Sénat ; aussi le nouveau souverain le nomme commissaire extraordinaire dans la 1re division militaire, président de la commission chargée de vérifier les titres des anciens officiers de l'armée des émigrés, et enfin pair de France[4]. Il est par ailleurs fait chevalier de Saint-Louis. Nommé en 1815 gouverneur de la 10e division militaire, il cherche au mois de mars, de concert avec le baron de Vitrolles, à organiser dans le Midi un plan de résistance contre Napoléon[4]. Il n'y réussit pas et reste éloigné des affaires pendant les Cent-Jours. L'Empereur le raye de la liste des maréchaux[4]. Réintégré à la seconde Restauration le 10 janvier 1816, il passe avec le même titre dans la 1re division militaire, et reçoit le 3 mai suivant la croix de commandeur de l'ordre de Saint-Louis, gouverneur militaire de Paris, puis marquis en 1817.
Il vote la mort lors du procès de Ney et meurt le à Paris, couvert d'honneurs. Il repose au cimetière du Père-Lachaise, 24e division. Le nom de Pérignon figure sur l’arc de triomphe de l’Étoile.
D'azur, à un bélier passant d'argent, accorné d'or, la tête sommée d'une croix patriarcale du même[6],[7] ; au canton des ComtesSénateurs brochant.[8] Devise: FAYRE PLA LAYSSA DIRE.
Recueil de décrets, ordonnances, traités de paix, manifestes, proclamations, discours, etc, etc, de Napoléon Bonaparte : contenant les dites pièces sous le gouvernement impérial commençant le 15 mai, 1804 jusqu'à la fin de l'année 1806, (lire en ligne)
↑Après la restauration du trône des Bourbons, le duc de Valmy, au nom des quatre maréchaux sénateurs, adressa la réclamation suivante.
À Monsieur, comte d'Artois, lieutenant-général du royaume.
Paris, . « Monseigneur,
Je viens, au nom de mes collègues, maréchaux-sénateurs, et au mien, comme doyen des maréchaux de France, réclamer près de Votre Altesse Royale contre l'ordre dans lequel on nous a placés par rapport aux autres maréchaux.
Nous quatre, maréchaux-sénateurs, Kellermann, Lefebvre, Pérignon et Serrurier, avons été nommés des premiers et avant tous les autres, sans doute à cause de l'ancienneté de nos services et de nos grades de généraux en chef ou de division. Les autres maréchaux, même le maréchal Berthier, n'ont été nommés qu'après.
Nous prions Votre Altesse Royale, lieutenant-général du royaume, d'avoir la bonté de nous faire rétablir dans l'ordre dans lequel nous devons être placés, et qui doit précéder MM. les maréchaux nommés depuis ces sénateurs.
Entré au service comme cadet au régiment de Lowendal en 1752, chevalier de Saint-Louis avant l'âge prescrit par les règlements, j'ai passé par tous les grades. Nommé par Sa Majesté Louis XVIcordon rouge en 1791, lieutenant-général, général d'armée au commencement de 1792, j'ai commandé en chef les armées actives et de réserve jusqu'à ce jour. Doyen des maréchaux de France, je prie Votre Altesse Royale de me faire jouir des prérogatives attachées à ce titre, comme sous l'ancien ordre de choses.
Je suis, etc.
Le maréchal-sénateur,
KELLERMANN, duc de Valmy. »
À cette demande qui paraîtra au moins fort singulière à ceux qui auront lu le décret reproduit plus haut. Monsieur fait répondre :
À M. le maréchal Kellermann, duc de Valmy.
au palais des Tuileries, . « M. le Maréchal, -
Son Altesse Royale Monsieur, lieutenant-général du royaume, à qui j'ai eu l'honneur de soumettre votre lettre du 15 de ce mois, me charge de faire connaître que la réclamation qu'elle contient pour vous, Monsieur le Maréchal, et pour MM. les maréchaux Lefebvre, Pérignon et Serrurier, est d'une trop haute importance pour que Son Altesse Royale puisse prendre une décision avant l'arrivée de Sa Majesté Louis XVIII.
Aussitôt que Sa Majesté sera arrivée, Son Altesse Royale lui mettra sous les yeux votre réclamation.
Veuillez agréer, etc. »
Références
↑Max Reyne, Les 26 Maréchaux de Napoléon: Soldats de la Révolution, gloires de l'Empire, Créations 1963. Certaines biographies lui attribuent à tort la paternité de Catherine Louise Appoline Perignon épouse du général Louis Tirlet (qui est en fait la fille de Pierre Perignon). Archives nationales, Minutier central des notaires, CVIII 1043, 16 mars 1830, notoriété après le décès de Pierre Perignon indiquant que ses héritiers sont ses trois enfants, Catherine Louise Appoline Perignon épouse Louis Tirlet, Pierre Paul Désiré Pérignon et Louis Alfred Perignon. Document numérisé sur le site famillesparisiennes.