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L’animation, dans le domaine de l’audiovisuel, est un ensemble de techniques qui ont été mises au point à partir du XIXe siècle, d'abord par la reprise du principe de la bande dessinée et l'utilisation de procédés optiques et mécaniques ne dépassant pas deux secondes dans leur représentation (jouet optique, folioscope), puis, dès 1892, par le perfectionnement de ces procédés en permettant des durées de représentation plus importantes, de une à cinq minutes (Théâtre optique) et par l'utilisation en 1906 de la prise de vuesimage par image sur un support linéaire, la pellicule photographique (dessin animé, animation en volume), et enfin, à partir des années 1970, par l'adoption de procédés informatiques (animation par ordinateur, jeux vidéo). Ces techniques sont le résultat d'une recherche étalée sur plus d'un siècle pour obtenir des ouvrages visuels ou audiovisuels donnant l'illusion que des dessins, des peintures, des objets inertes divers (sculptures, maquettes, poupées, marionnettes, etc.) ou des images de synthèse, sont doués de mouvements et de déplacements propres, comme s'ils étaient vivants, d'où l'utilisation du terme « animation » (du latinanimalis « animé, vivant, animal »).
Figure 1.2 Cette animation comprend dix images par seconde. À cette cadence, l'illusion d'un mouvement continu est possible.
Figure 1.1 Cette animation comprend deux images par seconde. À cette cadence, les images sont perçues séparément et l’illusion d'un mouvement continu est donc impossible.
L'histoire de l’animation commence bien avant celle du cinéma. Le folioscope, petit carnet de dessins successifs qui donne l’illusion de personnages ou d’animaux en mouvement lorsqu'on l'effeuille avec le pouce, est sans doute l'un des premiers procédés d'animation complexe. Dans les premières décennies du XIXe siècle apparaissent des dispositifs appelés couramment jouets optiques, « qui vulgarisaient sous des formes récréatives les expériences scientifiques de laboratoire sur la décomposition et la restitution du mouvement à partir de dessins. Comme à cette époque, les scientifiques connaissaient tous le grec et le latin, ils donnaient à leurs machines des noms aussi étranges que savants. Ces jouets de salon suscitaient dans les dernières décennies du XIXe siècle l'engouement d’un public fortuné en même temps qu'ils ouvraient le chemin des rêves aux artistes »[1]. C'est ainsi que Joseph Plateau, voulant mettre en évidence la persistance rétinienne, invente le Phénakistiscope en 1832, un disque pivotant sur son axe, muni sur son pourtour de fentes verticales par lesquelles on observe, en reflet dans un miroir, une suite de dessins disposés en rayons sur le disque (un dessin voisine chaque fente), dessins qui représentent une personne ou un animal en mouvement en autant de positions immobiles[2]. Zootrope, Praxinoscope, Zoopraxiscope et d'autres machines suivent celle de Plateau. Ces petites machines et leurs disques sont classées dans l'ère du précinéma car leur principe même les condamne à un spectacle extrêmement court (1 seconde, ou plus rarement 2) axé sur la répétition cyclique d'un seul geste (un saut, une grimace…) sans qu'elles puissent un jour proposer un véritable spectacle, au moins un sketch voire une histoire complète.
Il faut donc attendre la dernière décennie du XIXe siècle pour que naisse réellement l'animation, basée sur une histoire complète (de 1 min 30 s à 5 minutes), mettant en place plusieurs personnages et diverses péripéties: les Pantomimes lumineuses, dessinées et coloriées directement sur un support linéaire. Leur auteur s'appelle Émile Reynaud et il a déjà inventé le Praxinoscope, un jouet optique dont il a assuré une bonne commercialisation de différents modèles. Il met une quinzaine d'années pour développer une machine qu'il appelle le Théâtre optique, un appareil de projection qui assure la projection sur un écran devant un public assemblé, d'une bande de 70 mm de large, composée de centaines de carrés de gélatine protégée par de la gomme-laque, reliés entre eux par du carton et de fines lames métalliques flexibles, des vignettes sur lesquelles Reynaud a lui-même dessiné et colorié aux encres à l'aniline, les différentes phases des mouvements de plusieurs personnages qui interagissent dans diverses péripéties. Dès le au musée Grévin, trois ans avant la première séance de projection du Cinématographe des Frères Lumière[3], Reynaud exploite ses pantomimes lumineuses qui vont attirer dans cette unique salle un demi million de spectateurs en huit ans. Par sa technique originale, il inaugure pour le cinéma l'animation sans caméra.
Le dessin animé filmé image par image avec une caméra chargée d'une pellicule photographique voit le jour en 1906 avec Humorous Phases of Funny Faces (traduisible par: Phases amusantes de figures rigolotes), réalisé par le comédien américain James Stuart Blackton. En 1917, Quirino Cristiani crée le premier long métrage d’animation de l’histoire intitulé El Apóstol[4]. En trois minutes, sur un tableau noir où sont tracés, puis modifiés image par image, des traits à la craie blanche, une histoire complète est racontée, celle d'un jeune couple qui s'aime, puis vieillit, grossit, s'aigrit et finit par se détester. Un coup d'éponge final, donné par le dessinateur, les plonge dans le brouillard. Suivent d'autres personnages… La technique est alors appelée « en France, mouvement américain. Il était encore inconnu en Europe »[5]. Le film est tourné photogramme après photogramme, à la manière d’un appareil photo, grâce à ce qu'on nommera longtemps le « tour de manivelle »[6], un tour de la manivelle de la caméra déplace la pellicule d'un seul pas d'image (soit 4 perforations) et enregistre un unique photogramme. Telle est la base de toute animation ayant recours à un appareil de prise de vues, ce qui est la majorité des films d'animation existants, même si l'appareil de prise de vues est devenue depuis quelques années un ordinateur.
Technique du dessin animé
La technique est identique à celle découverte par James Stuart Blackton, quel que soit le moyen d'acquisition employé : le mouvement des personnages (et des objets) est décomposé en une succession de dessins, sur la base universelle de 24 ou 25 dessins par seconde d'action, qui, enregistrés dans l'ordre chronologique, produisent à la projection l'illusion d'un mouvement continu. Selon les indications du storyboard fourni par le réalisateur ou la réalisatrice, l'animateur ou animatrice dessine sur papier chaque position clé des personnages dans une action donnée et détermine en combien de secondes (donc autant de fois 24 ou 25 images) le mouvement ainsi souhaité doit se produire. C'est pour cela qu'on l'appelle le plus souvent animateur ou animatrice clé. Ses assistants, appelés intervallistes, dessinent les positions intermédiaires entre chaque position clé, et, selon le principe du folioscope, la fluidité du mouvement peut ainsi être testée (parfois filmé et projeté quand le budget du film le permet).
Après acceptation ou transformations, les dessins sur papier sont reportés à l'encre de Chine sur une succession de feuilles de celluloïd (appelés « cells ou cels ou cellos », maintenus en position par un jeu de perforations et de tenons qui permettent une superposition exacte des dessins. Les différentes manipulations des cells sont protégées des traces de doigts par des gants que l'on porte obligatoirement au cours des opérations. Chaque dessin est repris par les coloristes qui appliquent des encres de couleur sur son verso sans dépasser les limites des tracés à l'encre de Chine. Dans le système industriel du dessin animé, chaque couleur est appliquée par le ou la même coloriste pour des raisons de productivité. Les cells terminés sont alors photographiés un par un avec une caméra dédiée à l'image par image sur un banc d'animation qui est doté des mêmes tenons utilisés auparavant par les animateurs.
L'image animée par ordinateur simplifie grandement tout ce travail : c'est le logiciel d'animation qui effectue lui-même les opérations de dessins intermédiaires et de mise en couleurs, et qui livre directement au propre l'animation désirée.
La même technique image par image lance l'animation en volume, dont encore une fois le comédien James Stuart Blackton a l'idée, appliquant cette technique à un décor miniaturisé où les personnages sont en fait des objets qui semblent bouger tout seuls. En plus, Blackton innove en animant une marionnette, procédé image par image dont la cousine est l'animation de pâte à modeler, deux techniques que l'on utilise encore de nos jours.
À peu près tout peut être utilisé pour faire un film d'animation, l'élément principal étant souvent l'imagination. Voici une liste des principales techniques :
Adobe Animate CC, précédemment Adobe Flash et anciennement Macromedia flash, logiciel de 2D, de très bonne qualité, pouvant aller jusqu'à des animations très poussées ;
Anime Studio(en) (anciennement Moho) Logiciel, au prix abordable pour le grand public, spécialisé en animation 2D incluant quelques fonctionnalités 3D ;
Gimp, logiciel libre de dessin permettant de créer des animations ;
CTP Pro, logiciel d'animation traditionnelle 2D surtout utilisé pour tester l'animation ;
Ktoon(en), logiciel libre d'animation sous Linux ;
Media PEGS du studio d'animation Pixibox a été, vers la fin des années 1990 un logiciel professionnel d'animation 2D et de colorisation comptant parmi les plus répandus au sein de nombreux studios internationaux ;
PackshotCreator, logiciel de capture et de gestion d'images et d'animations 3D en temps réel ;
Pencil, logiciel libre d'animation 2D (vectorielle et bitmap) ;
Écrans Vo, l'association des cinémas indépendants du Val-d'Oise ;
Cellofan', l'association pour la promotion du cinéma d'animation ;
Cartoon, l'association européenne du film d'animation, qui organise des forums de coproduction et des séminaires pour les professionnels de l'animation européens.
René Laloux, Ces dessins qui bougent : 1892-1992 : cent ans de cinéma d'animation, Paris, Dreamland éd., coll. « Image par image », , 200 p. (ISBN978-2-910-02708-7, OCLC409443770),
Bernard Lonjon, Emile Reynaud, le véritable inventeur du cinéma, Polignac (Haute-Loire), Éditions du Roure, , 232 p. (ISBN978-2-906-27865-3, OCLC421892593),
Dominique Fournier-Willoughby, Le cinéma graphique une histoire des dessins animés : des jouets d'optique au cinéma numérique, Paris, Editions Textuel, , 286 p. (ISBN978-2-845-97344-2, OCLC690352316).
Esthétique
Marcel Jean, Le Langage des signes et autres essais sur le cinéma d’animation, éditions Les 400 coups, 2006,
Hervé Joubert-Laurencin, La Lettre volante, quatre essais sur le cinéma d’animation, Presses de la Sorbonne Nouvelle, 1997, collection « Œil vivant »,
Xavier Kawa-Topor (sous la direction de), Le Cinéma d’animation, Éditions 303, 2014,
Xavier Kawa-Topor, Cinéma d’animation, au-delà du réel, Éd. Capricci, 92 p.
Jayne Pilling, Cartoons and the movies, Éditions Dreamland, 1997,
Georges Sifianos, Esthétique du cinéma d’animation, Éditions du Cerf, 2012, collection « Septième Art »,
Dossiers sur le cinéma d'animation publiés dans des magazines de cinéma
Positif no 54-55 p. 1 ; no 297 p. 31 ; no 316 p. 46 ; no 345 p. 36 ; no 346 p. 44 ; no 370 p. 83 ; no 371 p. 83 ; no 398 p. 78 ; no 412 p. 76 ; no 415 p. 86 ; no 447 p. 80 ; no 472 p. 78 ; no 508 p. 74