Angela Gheorghiu, née Burlacu (en roumain : anˈd͡ʒela ɡe̯orˈɡi.uÉcouter) le à Adjud, Roumanie[1],[2],[3], est une sopranoroumaine. Depuis ses débuts professionnels en 1990, elle a chanté les principaux rôles pour soprano sur les scènes du Royal Opera House de Covent Garden, du Wiener Staatsoper, de la Scala pour ne citer que celles-ci. Sa discographie substantielle est principalement éditée par EMI Classics et Decca.
Biographie
Angela Gheorghiu chante des airs d'opéra très jeune avec sa sœur Elena Dan[4] et, dès l'âge de 14 ans, étudie le chant à l'université nationale de musique de Bucarest sous la direction de Mia Barbu. L'obtention de son diplôme en 1990 succédant de peu au changement brutal de régime ayant occasionné fin la chute et l'exécution du dictateur communiste Nicolae Ceaușescu, lui permet d'accéder à une carrière internationale. Sa carrière professionnelle débute à l'Opéra national roumain de Cluj-Napoca dans le rôle de Mimi (La Bohème) en 1990. Elle remporte le concours international Belvedère la même année[5].
Après avoir divorcé de son premier mari dont elle conserve le nom de famille, Gheorghiu, Angela épouse le ténor Roberto Alagna en 1996 avec lequel elle chante fréquemment sur scène et en studio. Elle est élue 74e plus belle femme du monde par le magazine FHM[6],[7].
En , Alagna annonce leur séparation dans les colonnes du journal Le Figaro. Gheorghiu confirme l'information sur son site web où elle affirme que le couple n'entretient plus de relation depuis deux ans[8]. Leur séparation amène Gheorghiu à décliner l'offre qui lui est faite en par le Metropolitan Opera de chanter Carmen en compagnie d'Alagna[9]. Leur divorce est prononcé en [10]. Néanmoins, lors d'un entretien avec le Daily Express au mois de , elle dit qu'Alagna et elle sont à nouveau ensemble mais qu'ils souhaitent chanter séparément pendant quelque temps et qu'ils envisagent de se retirer tous deux de la scène et avoir leurs propres enfants[11],[12],[13]. De fait, on a pu les voir ensemble en mars 2011 dans l'arrière-scène du Royal Opera House de Londres où Alagna interprète Aida. Ils se séparent définitivement en .
Gheorghiu oriente alors son répertoire sur différents rôles : Violetta, Mimi, Magda, Adina et Juliette.
En , elle interprète le rôle-titre dans l'adaptation cinématographique de Tosca, sous la direction de Benoît Jacquot, et aux côtés de Roberto Alagna et Ruggero Raimondi. Le film reçoit un accueil chaleureux tant de la part du public que de la critique. La revue américaine Opera News écrit : « Elle est l'une des Tosca la plus sensuelle qu'il soit possible d'imaginer... La passion et la beauté d'Angela Gheorghiu sont idéales pour Tosca[16],[17]. » Gheorghiu est présente pour la projection du film au festival du film de Venise en 2001. Elle interprète la Juliette du film Roméo et Juliette, en 2002, aux côtés de Roberto Alagna et Tito Beltrán[18].
Angela Gheorghiu prend part à de nombreux concerts, chantant en soliste ou avec ses collègues. La réouverture du Royal Opera House de Covent Garden (1999) et du Teatro Malibran de Venise comptent parmi ses plus importantes prestations de même que celle pour l'ouverture de l'opéra de Valence en présence de la reine Sophie d'Espagne en 2005. En 2002, elle chante au Prom at the Palace pour le jubilé de la reine Élisabeth II[20]. Elle se produit au gala qui marque le jubilé de la reine Béatrix à Amsterdam en 2005 ainsi qu'au concert du Nouvel An au palais Garnier (2006), au Met Summer Concert de Prospect Park (2008), au concert donné à la mémoire de Luciano Pavarotti à Petra (2008). Elle est invitée en 2009 aux 32eKennedy Center Honors tenus à Washington pour honorer Grace Bumbry. Elle interprète l'air Vissi d'arte de Tosca (Puccini) en présence de Barack Obama.
Gheorghiu endosse pour la première fois le rôle d'Adriana dans Adriana Lecouvreur, de Francesco Cilèa, une nouvelle production du Royal Opera House en . The Observer écrit à ce propos : « Il est difficile d'imaginer mieux qu'Angela Gheorghiu dans cette partition. Sa voix, légère comme une plume, crémeuse mais pourtant au cœur d'acier, correspond à la façon coulée avec laquelle elle se déplace sur la scène. Elle est une actrice naturelle qui réalise une scène de la mort bouleversante et crédible et signe une aria “Poveri fiori” tout simplement inoubliable[21],[22]. »
« [L'opéra] Adriana est connu pour être [un opéra] beau et facile à chanter destiné à des prima donnas âgées ou faiblardes (pas de notes hautes, un orchestre discret). Gheorghiu, à l'apogée de ses possibilités vocales, aurait dû le trouver facile. Sa première aria fut enlevée et nerveuse et elle esquiva la fin de la seconde. Par ailleurs, elle chanta exquisément les duos et déclamations[23],[24]. »
Gheorghiu et les grandes scènes mondiales
Gheorghiu a parfois des relations difficiles avec la direction des salles. Certaines ont mis fin à leur collaboration en raison de conflits avec les directeurs des établissements concernés qui, ainsi qu'elle l'explique dans un entretien avec ABC, « voulaient exprimer leur vision personnelle en oubliant les personnages. Parfois, ce qui était présent dans le scénario allait à l'encontre de l'histoire et de la musique[25]. » Elle attribue son franc-parler au fait qu'elle a grandi en Roumanie sous le régime totalitaire de Nicolae Ceaușescu :
« Parce que j'ai grandi dans un pays où toute opinion personnelle était impossible, cela m'a rendue plus forte. Beaucoup de chanteurs sont effrayés à l'idée de ne pas être réinvités par une salle d'opéra s'ils parlent franchement. J'ai cependant le courage d'être, en quelque sorte, une révolutionnaire. Je veux me battre pour l'opéra, afin qu'il soit pris au sérieux. La musique pop s'adresse au corps, mais l'opéra s'adresse à l'âme[26]. »
Elle a eu des relations orageuses avec Joseph Volpe directeur du Metropolitan Opera où elle débute dans le rôle de Mimi (La Bohème, Giacomo Puccini) en 1993. En 1996, Gheorghiu interprète la Micaela d'une nouvelle production de Carmen dans lequel elle donne la réplique à Waltraud Meier et Plácido Domingo. Cette production de Franco Zeffirelli exige de Micaela qu'elle porte une perruque blonde, ce qui déplaît profondément à Gheorghiu. Lors de la tournée du MET au Japon en 1997, elle refuse de l'arborer. Ce à quoi Volpe lui assène : « La perruque sera, que vous le vouliez ou non[27] » et, sur ces paroles, la remplace par sa doublure[28],[29].
Elle fait une réapparition au MET en 1998 pour six représentations de Roméo et Juliette en compagnie de son mari Roberto Alagna dans le rôle de Roméo. Volpe programme Gheorghiu pour interpréter Violetta Valéry dans une nouvelle production de La Traviata mise en scène par Franco Zeffirelli dont la première doit avoir lieu en . Alagna doit chanter le rôle d'Alfredo Germont, amant de Violetta. D'après Volpe, Gheorghiu et Alagna argumentant certains détails de la production avec l'équipe et la direction de la salle, repoussent sans cesse la signature du contrat. Ils finissent par le faire et faxent le document au MET une journée après l'expiration de la date pour l'envoyer. Volpe refuse de l'accepter si bien que la production ouvre avec Patricia Racette et Marcelo Álvarez dans le rôle des amants[28].
Au mois de , William Mason, directeur général du Lyric Opera of Chicago, écarte Gheorghiu de sa production de La Bohème pour absence de répétition, non-essayage des costumes et, plus généralement, conduite « non professionnelle ». Celle-ci déclare dans un communiqué qu'elle avait sauté quelques répétitions pour passer du temps auprès de son mari qui chante Roméo et Juliette au MET et qu'elle-même répète pour Madame Butterfly de Puccini. Elle rajoute : « J'ai déjà chanté La Bohème une centaine de fois. Ainsi, le fait de sauter quelques répétitions n'est pas une tragédie. Il m'était impossible de me prêter à des essayages alors que je me trouvais à New York[30],[31]. »
Six semaines plus tard, elle fait ses débuts au San Francisco Opera dans le personnage de Magda (La Rondine) qui reçoit un avis enthousiaste de la critique[32],[33]. Cette production est directement issue de celle du Royal Opera House de Londres dont la première a eu lieu le avec Gheorghiu (Magda) et Alagna (Ruggero). C'est celle que la cantatrice admire le plus :
« Lorsque le rideau se lève sur La Rondine au Covent Garden, les spectateurs, le souffle coupé, applaudissent. Ils veulent du rêve. Si les directeurs d'opéras veulent faire quelque chose de nouveau, pourquoi ne serait-ce pas quelque chose de magnifique[34],[35] ? »
Malgré ces problèmes, Gheorghiu et Alagna retournent au MET pour cinq représentations de L'elisir d'amore en 1999 et quatre représentations de Faust en 2003. Gheorghiu endosse le personnage de Liù (Turandot, Giacomo Puccini) en 2000, celui de Violetta (La Traviata, Giuseppe Verdi), celui d'Amelia de Simon Boccanegra (Giuseppe Verdi) en 2007. Elle apparaît en Mimi (La Bohème) en 2008 et en Magda dans la production de La Rondine au cours de la saison 2008/2009 du MET dont c'est la première reprise depuis 1936. En remplacement du rôle de Marie-Antoinette dans l'opéra Fantômes du Trianon (rarement à l'affiche) de John Corigliano abandonné en raison de la récession, elle reprendra celui de Violetta pour la saison 2009/2010 du MET.
Le , Angela Gheorghiu est l'interprète de la première d'une nouvelle production de La Rondine au MET. La dernière représentation dans cette salle remonte à 70 ans. Elle est en compagnie de Roberto Alagna, Marius Brenciu, Lisette Oropesa et Samuel Ramey. Elle reçoit quelques commentaires favorables pour son interprétation de Magda dont celui du Epoch Times : « Gheorghiu incarne le rôle, aussi bien en tant qu'actrice que comme cantatrice, avec son charisme naturel[36]. » L'opinion du New York Times est plus mitigée : « Vocalement, les deux rôles principaux sont quelque peu décevants. Le chant de Mme Gheorghiu, en tant que Magda, est brillant avec de magnifiques couleurs mates dans l'extrême aigu de son registre. Mais la richesse terreuse de son medium se voile parfois et ses basses manquent curieusement de fermeté[37]. »
Annulations au MET et ailleurs
En , Gheorghiu annule toutes ses représentations de Carmen au MET pour des « raisons personnelles »[38]. Ce devait être sa première interprétation du rôle titre habituellement chanté par une mezzo-soprano. Elle annule également toutes ses apparitions au MET pour les derniers mois de 2010 ainsi que sa prestation dans Roméo et Juliette de Gounod prévue au mois de en prétextant une maladie puis, quelques jours plus tard, sa présence dans Faust prévu pour la saison 2011/2012 du MET. D'après son imprésario, elle « ne sentait pas à l'aise dans le rôle [de Marguerite][39]. »
Peter Gelb, directeur du MET, dit que les suppressions fréquentes du calendrier de la cantatrice « devenaient un problème croissant pour [le MET][40] » ajoutant cependant que tout était prêt pour le retour de Georghiu sur la scène du MET. Il note également que « cela n'avait rien à voir avec les perruques[41],[42]. »
Elle a aussi annulé deux fois le récital qu'elle devait donner à Paris, à la salle Pleyel, pendant la saison 2011-2012.
Récompenses et distinctions honorifiques
Gheorghiu a enregistré de nombreux récitals sous forme d'albums ainsi que nombre d'opéras. Elle est également apparue dans de nombreuses émissions de télévision et concerts. L'enregistrement par EMI de la Manon de Jules Massenet avec Angela Gheorghiu dans le rôle-titre remporte le Gramophone Award2001 du Best Opera Recording (« Meilleur enregistrement d'un opéra ») et a été nommé pour le Best Opera Recording lors des Grammy Awards2002[43],[44]. L'enregistrement par EMI de Tosca (Puccini) avec Roberto Alagna et Ruggero Raimondi dans les rôles titre lui vaut le prix de la critique allemande du disque(de) en 2002)[45]. Elle est également honorée du Diapason d'or et du Choc du Monde de la Musique en France, du prix Caecilia en Belgique, de l'Echo Awards, du prix Musica e dischi italien, du Foreign Lyric Production Award (« prix de la Meilleure Production Lyrique Étrangère ») au Royaume-Uni et du USA Critics’ Award.
Gheorghiu remporte le titre d'« Artiste de l'Année » aux Classical Brit Awards en 2001 et 2010[46]. Elle reçoit la Médaille de Vermeil de la Ville de Paris et est nommée chevalier dans l’ordre des Arts et des Lettres par le ministère de la Culture français. En 2010, elle est élevée au rang de docteur honoris causa par l'Université des Arts de Iasi (Roumanie)[47] et reçoit la plus haute distinction de l'État roumain, l'« Étoile de Roumanie », des mains du Président de ce pays[48].
↑« It's hard to imagine anyone bettering Angela Gheorghiu in this part. Her voice, feather-light and creamy yet with a core of steel, matches the liquid way she moves on stage. She's a natural actress and made the improbable death scene heartbreakingly believable and her signature aria « Poveri fiori » simply unforgettable. »
↑« Adriana is known as a nice, easy sing for ageing or challenged prima donnas (no difficult top notes, and a tame orchestra), so Gheorghiu, in her vocal prime, should have found it a doddle. But her first aria was bumpy and nervous, and she fudged the end of the second. Elsewhere, in duet and declamation, she often sang exquisitely. »
↑« que quiere expresar sus fantasías, olvidándose de los personajes. A veces, lo que se representa en el escenario va en contra de la historia y de la música », in Susana Gaviña, «Yo tengo el control en la ópera», ABC, 18 mai 2007. Consulté le 3 octobre 2011.
↑« Because I grew up in a country where there was no possibility of having an opinion, it makes me stronger now. Lots of singers are frightened about not getting invited back to an opera house if they speak out. But I have the courage to be, in a way, revolutionary. I want to fight for opera, for it to be taken seriously. Pop music is for the body, but opera is for the soul. » Warwick Thompson, « Her serene highness », The Times, 4 mai 2007, consulté le 3 juin 2008.
↑« The wig is going on, with you or without you. »
↑(en) Johanna Fiedler, Molto Agitato: The mayhem behind the music at the Metropolitan Opera (ISBN038548187X, lire en ligne) Doubleday, 2001, p. 299.
↑« I have sung Boheme hundreds of times, and thought missing a few rehearsals wouldn't be a tragedy. It was impossible to do the costume fitting at the same time I was in New York. »
↑« When the curtain opened on La Rondine at Covent Garden, the audience gasped and applauded. People want to dream. If directors want to do something new with operas, why not do something beautiful? »
↑« Gheorghiu embodies the part, as actress and singer, with her natural charisma » in Rosemarie Fruehauf, « "The Met's La rondine Charms" », The Epoch Times, 15-21 janvier 2009.
↑« Vocally, both leads are somewhat disappointing. Ms. Gheorghiu, as Magda, sings with gleaming sound and wonderfully dusky colorings in the strong top register of her voice. But the earthy richness of her mid-range singing sometimes turns breathy, and her low voice is curiously weak » in Anthony Tommasini, « Puccini and Operetta? He Does It His Way », The New York Times, (consulté le ).