Eugénie Marie Pascaline Fénoglio est née le au 8 rue du Champ-de-Mars à Toulon[1]. Elle était la fille de Louis-Émile Fénoglio, tailleur d'origine napolitaine, et d'Albanie-Marie Audenet, née à Perpignan. À sa naissance, ses parents avaient déjà un garçon. Sa venue n'étant pas désirée, elle a été placée, jusqu'à l'âge de sa scolarité, chez des paysans, de braves gens mais assez frustes. À l'âge scolaire, elle a été inscrite par ses parents dans une école privée de bonne notoriété. Mais le , Eugénie assiste à une dispute de ses parents, et son père tue sa mère de deux coups de revolver avant de se donner la mort à son tour[2].
Orpheline, à peine âgée de 18 ans quand l'âge de la majorité légale était 21 ans, la jeune fille part vivre à Toulon puis à Nice, avant de faire ses débuts sur les scènes du Music-hall et du Théâtre dans une troupe ambulante sous le nom de Éveline Lavalette. Rêvant de Paris, elle s'y retrouve en 1889 et se fait remarquer à des cours de danse.
En 1891, on la présente à Eugène Bertrand, le directeur du théâtre des Variétés, qui l'embauche dès ses premiers essais. Elle commence par tenir un rôle de figuration dans La Belle Hélène de Jacques Offenbach, mais Mlle Crouzet qui tenait le rôle d'Oreste meurt subitement et c'est Ève qui reprend le rôle. Elle n'a alors que 25 ans. La voix d'Ève Lavallière est d'une gamme très étendue, ce qui va en faire une comédienne de théâtre renommée à la Belle Époque (entre 1891 et 1917). Plusieurs grandes réalisations voient sa participation à l'époque dont Le Sire de Vergy au côté d'Albert Brasseur (1903). Sa renommée est semblable à celle de son aînée Sarah Bernhardt.
Dans le même temps, elle partage la vie du directeur du Théâtre des Variétés, Adolphe Amédée Louveau[3] dit Samuel le Magnifique et qui se fait appeler Fernand Samuel, de 1892 à 1914, dont elle se sépare dès 1897. Elle a avec Louveau une enfant, Jeanne (1895-1980). Fernand Samuel achète le château de Saint-Baslemont, situé à 8 km de Vittel, ville thermale renommée où le couple vient régulièrement. À la mort de Louveau en 1914, le château passe par héritage à leur fils unique qui, travesti, se fait appeler Jean Lavallière (dans le village on l'appelle Jean-Jean[2]). Ne s'entendant pas avec cet enfant, elle vit à l'écart dans le village voisin de Thuillières.
En 1917, en pleine Première Guerre mondiale, à la suite de la dernière représentation de Carmenitta au théâtre Michel à Paris, Ève Lavallière tombe malade et ne paraîtra plus jamais sur scène. A 51 ans, elle cherche du repos en Touraine et loue le château de La Porcherie, ou domaine de Choisille à Chanceaux-sur-Choisille (plus tard occupé par le cirque Pinder). Sa rencontre avec l'abbé Chasteignier de Chanceaux va aboutir à sa conversion au catholicisme le . En , elle quitte le château de La Porcherie pour se rendre là où réside sa fille, le château de Saint-Baslemont. Elle achète à Thuillières une modeste maison baptisée Béthanie. Elle continue à correspondre avec l'abbé Chasteignier qu'elle considère comme son parrain en religion.
En 1919, elle se rend à Pau, Guéthary, Marseille, Nice, Paris, Sanary et le couvent dominicain de la Sainte Baume en Provence. Elle souhaite entrer dans les ordres et finir sa vie au couvent mais n'étant reçue dans aucune congrégation, elle entre dans le Tiers-Ordre franciscain. Elle peut ainsi revêtir la robe de bure, mais continuer sa vie laïque. Elle devient Sœur Ève-Marie du Cœur de Jésus le . Elle entreprend ensuite de 1921 jusqu'au milieu de 1923 plusieurs voyages en Tunisie où elle distribue sa fortune estimée à 1 million de francs or, souhaitant vivre dans la pauvreté.
À partir de l'été 1924, elle revient définitivement vivre en France à Thuillières. Elle termine sa vie dans le dénuement à la suite de la dépossession de ses biens par son propre fils, drogué, mais aussi par les nombreux dons qu'elle faits aux œuvres caritatives notamment en Tunisie. Elle décède le à l'âge de 63 ans et est inhumée très simplement au pied du mur de l'église du village.
Au Château de Thuillières, une salle est réservée au souvenir d'Ève Lavallière. On y retrace avec des photos et des objets du quotidien sa vie et sa conversion.
Notes et références
↑Registre des naissances de la ville de Toulon (1866), cote 7 E 146_277 : Acte de naissance d'Eugénie Marie Pascaline Fénoglio, Archives départementales du Var, 481 p. (lire en ligne), p. 139
↑ a et bMichelle Maurois, Les cendres brûlantes, Flammarion, , 558 p. (ISBN9782080648884), p. 489
Omer Englebert, Vie et conversion d'Eve Lavallière, Librairie Plon, Paris, 1936, avec 11 gravures hors texte et 2 fac-similés, 335 pages
(es) Omer Englebert, Vida y conversión de Eva Lavallière, Mundo Moderno, Biografías y Memorias, Buenos Aires, 1953
(es) José María Hernández Gamell, Una mujer extraordinaria. Vida y conversión de la famosa artista de París, Eva Lavallière. Ed. Caballeros Comendadores de Santa Teresita del Niño Jesús y de la Santa Faz, Madrid, 1944 ; réédition, Afrodisio Aguado, Madrid, 1945
Jacqueline Lenoir, Ève Lavallière, Presses de la Cité, , 288 p.
Jean-Paul Claudel, Ève Lavallière : Orpheline de la terre, Gérard Louis éditeur, 2007 (ISBN2914554796)