Le développement d'un logiciel de shogi capable de battre les meilleurs joueurs japonais est un problème de l'informatique qui a été atteint dans les années 2010. Moins connu que le problème de la conception de forts programmes de go, il est néanmoins nettement plus difficile de programmer un bon logiciel de shogi que de programmer un logiciel d'échecs ; de fait les premiers succès des programmes de shogi face à des professionnels du plus haut niveau ont eu lieu près de 20 ans après le match entre Garry Kasparov et Deep Blue.
Le premier match officiel entre un programme et un joueur professionnel, Akira Watanabe, a eu lieu en 2007 et a été remporté par le joueur humain[1].
La première victoire d'un programme informatique contre un professionnel, en l'occurrence la joueuse professionnelle Ichiyo Shimizu, date de 2010[2]. Le programme le plus performant était elmo(en) jusqu'en 2017 avant d'être largement battu par AlphaZero[3].
Complexité
La complexité(en) du shogi est très élevée par rapport à celle de la plupart des autres jeux.
Le shogi a en effet la particularité de réutiliser les pièces capturées. Ainsi à chaque coup, il y a plus de possibilités qu'aux échecs. L'ordinateur doit ainsi examiner plus de positions afin de tenir compte des parachutages. Parmi les variantes régionales des échecs, c'est donc au shogi qu'il y a le plus de parties possibles.
La Computer Shogi Association (CSA) organise chaque année depuis 1990 un championnat du monde des programmes de shogi[7]. La cadence est de 25 minutes par joueur. En 1990, seuls 6 programmes ont participé ; en 2001 55 programmes différents ont pris part à la compétition. En 2009 quatre programmes (GPS Shogi, Otsuki Shogi, Monju et KCC Shogi) qui n'avaient jamais remporté de tournoi CSA ont battu trois des meilleurs programmes de l'année précédente (Bonanza, Gekisashi et YSS)[8]. Il est à noter que des expériences ont montré que les programmes Bonanza, GPS Shogi et YSS, qui ont tous été champions du monde, sont plus forts lorsqu'ils jouent en consultation avec choix du coup majoritaire que lorsqu'ils jouent individuellement[9].
Vainqueur des championnats du monde CSA des logiciels de shogi
Dans les années 1980, en raison des faibles capacités des mémoires et des processeurs, les programmes de shogi jouaient lentement et avaient un niveau faible. Un domaine particulier pour lequel les logiciels de shogi ont un avantage sur les joueurs humains est celui de la résolution de tsume shogis, qui se prêtent beaucoup mieux à une approche par force brute ; de fait un jeu de tsume shogi faisait partie dès 1983 du catalogue de la SG-1000.
En 2007, Yoshiharu Habu a estimé la force du logiciel Bonanza qui avait remporté le championnat du monde des logiciels l'année précédente ; dans un article du Nihon Keizai Shimbun du 26 mars 2007 concernant le match entre Akira Watanabe et Bonanza, Habu a estimé Bonanza au rang de deuxième dan. En 1996 le même Habu avait annoncé qu'un ordinateur pourrait le battre en 2015[14]. En 2011, le développeur de Bonkras affirmait que les meilleurs programmes de shogi étaient aussi fort qu'un professionnel de niveau intermédiaire[15].
Restrictions
Le 18 septembre 2005, le joueur professionnel 5e dan Takanori Hashimoto joua une partie contre le programme Tacos, développé au sein du Collège doctoral de sciences et techniques de Hokuriku. Tacos prit l'avantage durant l'ouverture et le milieu de partie mais ne sut pas percer la défense d'Hashimoto, qui finit par l'emporter[16].
Le 14 octobre 2005, la fédération japonaise interdit aux joueurs professionnels d'affronter des logiciels de shogi, afin de préserver la dignité des professionnels[17]. Cette interdiction est ensuite maintenue sous la présidence de Kunio Yonenaga de 2008 à 2012.
Match d'exhibition homme-machine du CSA (2003–2009)
Les programmes vainqueurs du championnat CSA obtiennent le droit de se mesurer à de forts joueurs humains ; ces matchs se sont tenus de 2003 à 2009[18].
En 2010, le programme Akara l'emporte face à la joueuse professionnel Ichiyo Shimizu après que la fédération japonaise a donné son aval pour la confrontation. Akara agrégeait les coups proposés par les quatre logiciels Gekisashi, GPS Shogi, Bonanza et YSS ; le coup effectivement joué étant le coup proposé majoritairement (et celui de Gekisashi en cas d'égalité).
Shimizu joua le premier coup de la partie et perdit en 86 coups le 11 octobre 2010 au terme d'un peu plus de 6 heures de jeu suivi en direct par 750 personnes (la cadence étant de 3 heures par joueur suivies d'un byo yomi d'une minute par coup)[19]. Cependant le jeu de Shimizu a été critiqué et il a été dit que le niveau d'Akara était encore à ce stade inférieur à celui des meilleurs professionnels masculins[20].
Bonanza et Akara contre deux amateurs forts (2011)
Le 24 juillet 2011 eut lieu un match par équipe de deux entre les programmes Akara et Bonanza d'une part, et d'autre part les amateurs Kosaku (qui à l'époque passait l'examen pour devenir professionnel) et Shinoda (qui avait remporté le Ryuo amateur en 1999). Les amateurs jouaient en consultation et ont perdu le match sur le score de 0 victoires à 2[21],[22],[23]
Le 21 décembre 2011 eut lieu un match entre le programme Bonkras et le Meijin 1993 Kunio Yonenaga après que celui-ci a pris sa retraite. La cadence était de 15 minutes par joueur, suivies d'un byo yomi d'une minute par coup ; la partie dura un peu plus d'une heure et Yonenaga abandonna après 85 coups. Le premier coup de Yonenaga fut un coup de roi, coup inhabituel typique d'une stratégie anti-ordinateur(en) visant à sortir le logiciel de son catalogue de joseki.
Le 14 janvier 2012, Bonkras battit de nouveau Yonenaga lors du premier Denou-sen. La cadence était cette fois de 3 heures par joueur suivies d'un byo yomi d'une minute par coup. Bonkras l'emporte après 4 heures et 29 minutes[24],[25]
Denou-sen 2013
Le Denou-sen est un match entre 5 hommes et 5 machines, sponsorisé par Niconico. Les parties sont retransmises en live[26]. Les programmes sélectionnés sont les précédents vainqueurs du championnat du monde des ordinateurs.
↑Xiaohong Wan, Daisuke Takano, Takeshi Asamizuya; et al. (2012). "Developing intuition: Neural correlates of cognitive-skill learning in caudate nucleus". Journal of Neuroscience 28: 17492–17501.
↑Allis 1994 * Victor Allis, Searching for Solutions in Games and Artificial Intelligence, Ph.D. Thesis, University of Limburg, Maastricht, The Netherlands, , PDF (ISBN90-90-07488-0, lire en ligne)
↑(en) Takenobu Takizawa et Reijer Grimbergen, Computers and games: Second International Conference, CG 2000, Hamamatsu, Japan, October 26-28, 2000, Berlin, T. Anthony Marsland, (ISBN3-540-43080-6, lire en ligne), p. 440 :
« When asked in 1996 when he(Habu) thought a computer would beat him, his clear answer was “2015” »