Les Sept Sages (en grec ancienοἱ ἑπτά σοφοί, vers 620-550 av. J.-C.) sont le titre donné par la tradition grecque à un groupe composé d'hommes politiques, de législateurs et de philosophesprésocratiques de la Grèce antique. On parle de syllogé (grec ancien: συλλογή, assemblage, réunion) des Sept Sages. La constitution de ce groupe a pu varier au cours des siècles et des traditions.
Cette tradition sera reprise, mais sous une forme différente, par la tradition chrétienne dans les débuts du christianisme. Par ailleurs, elle vit aussi à travers toute une série de représentations iconographiques dans la sculpture et la mosaïque.
La syllogé des Sages a varié. On la retrouve dans différents textes, qui présentent toutefois un élément commun: leur caractère légendaire, mais qui ont aussi un substrat semi-historique[2]. Les personnages retenus dans la syllogé viennent en principe soit des îles égéennes et des cités côtières de l'Asie mineure, soit de la Grèce continentale[3].
On trouve d'autres séries de sages, comme celle des Apkallu, des artisans érudits dans la littérature mésopotamienne et accadienne. Dans la littérature sanskrite, des textes mentionnent sept rishi, qui sont tout à la fois voyants, poètes, mystiques, sacrificateurs, et, littéralement, étoiles (les Pléiades)[4].
La tradition des Sages
L'intérêt pour la vie et les paroles des sages remonte déjà à l'époque archaïque, ainsi qu'en témoignent à la fois la légende des Sept Sages et la transmission de leurs sentences[5]. C'est en effet au cours du Ve siècle av. J.-C. (ou peut-être déjà au VIe siècle av. J.-C.[6]) que des philosophes et des historiens transmettent l'idée que sept sages auraient vécu à la cour de Crésus (m. en -546) ou qu'ils se seraient réunis dans le sanctuaire d'Apollon à Delphes pour lui offrir leurs sentences[note 1], ou encore auprès de tel ou tel tyran[7]. Ce groupe de personnages aurait eu en commun d'être des maîtres de sagesse pratique, pour certains des hommes de science et pour la plupart des hommes d'État. La liste aurait été définitivement terminée au IVe siècle av. J.-C. à Athènes[6]. Selon Jean Stobée, doxographe du Ve ou VIe siècle, c'est Démétrios de Phalère qui aurait fixé la liste des Sept Sages[note 2], en faisant ainsi une sorte de canon, en publiant un recueil de leurs sentences[8].
Platon fournit la plus ancienne liste des Sept sages qui nous est parvenue[6],[note 3], mais on en trouve d'autres et les listes ainsi que les attributions des sentences varient[note 4]. De toute façon, selon Démétrios de Phalère, la tradition serait bien plus ancienne. Les Sept sages étaient connus pour leur sagesse pratique et leurs sentences et maximes mémorables. Selon Dicéarque, élève d'Aristote, les Sept Sages ne sont ni philosophes, ni sages, mais de bons législateurs et des hommes perspicaces[9].
C'est probablement à Delphes que s'est établie leur réputation de sagesse : plusieurs de leurs maximes ont été gravées sur le site aux Ve et IVe siècles av. J.-C., à une époque où, au savoir réservé au dieu, on préférait le savoir-faire et l'utilisation habile de l'heure présente[7].
Hermippe, dans son livre sur les sages, dit qu’ils furent dix-sept et que chacun en choisit sept selon ses préférences. Ce sont Solon, Thalès, Pittacos, Bias, Chilon, Cléobule, Périandre, Anacharsis, Acousilaos, Épiménide, Léophante, Phérécyde, Aristodème, Pythagore, Lasos, fils de Charmantidas ou de Sisambrinos ou, selon Aristoxène, de Chabrinos, Hermonée, Anaxagore.
Seuls sont arrivés jusqu'à nous des fragments de l'œuvre de Solon. Pour les autres noms de la liste restreinte donnée par Platon, nous n'avons que des maximes et dits (des apophtegmes — du grec ancien ἀπόφθεγμα / apophthegma) qui leur sont attribués[3]. Ces apophtegmes prennent le plus souvent la forme (en grec) d'injonctions de deux mots, ou à peine un peu plus dans la série transmise par Dicéarque[4].
Tableau récapitulatif
En gras, les quatre noms figurant sur toutes les listes qui nous sont parvenues[7]. Cette liste correspond à celle donnée par Platon[12], à l'exception de Périandre de Corinthe remplacé par Myson de Chéné chez Platon. C'est également celle que reprend Paul Faure[7].
On ajoute souvent à ces sept noms ceux d'Épiménide de Crête, Phérécyde de Syros ainsi qu'Ésope[7]. Quant au Livre I de Vie, doctrines et sentences des philosophes illustres de Diogène Laërce, intitulé « Les Sept Sages », il traite de onze personnages : Thalès, Solon, Chilon, Pittacos, Bias, Cléobule, Périandre, Anacharsis, Myson, Épiménide, Phérécyde.
Autres maximes
Mentionnons d'autres maximes attribuées aux Sept sages : « Maîtrise ta colère. », « Contemple la fin de la vie. » Par ailleurs, dans les thermes des Sept Sages, à Ostie, ils sont représentés sur une peinture accompagnée d'aphorismes scatologiques qui leur étaient attribués, sans doute pour s'en moquer[13].
↑Les sages s'y passent de main en main un trépied dédié à Apollon (Claude Mossé, compte rendu cité, 2002).
↑Voir le tableau dans la section « Listes et maximes ».
↑Platon mentionne aussi des noms des Sept Sages dans le Timée 20e, et Hippias Majeur 281c. D'autre part, C. Mossé, 2003, relève aussi le nom d'Hérodote (également Ve siècle av. J.-C.) à côté de celui de Platon.
↑On trouve une représentation graphique claire des principales de noms données par les auteurs dans « Seven Sages » sur livius.org, 2020. [lire en ligne (page consultée le 15 octobre 2023)].
↑ ab et cClaude Mossé, « Busine (Α.), Les Sept Sages de la Grèce antique. Transmission et utilisation d'un patrimoine légendaire d'Hérodote à Plutarque », 2002 [compte-rendu], Revue des Études Anciennes, 2003 vol. 105, n° 1, p. 315-316 [lire en ligne (page consultée le 9 octobre 2023)].
↑Diogène Laërce (trad. Robert Grenaille), Vie, doctrines et sentences des philosophes illustres, Paris, Garnier-Flammarion, coll. « GF » (no 56), , 309 p. (lire en ligne), p. 58-59
↑Protagoras, 343a, in Œuvres complètes, Flammarion, 2011, p. 1464.
↑Paul Veyne, L'Empire gréco-romain, Le Seuil, « Points Histoire », 2005, p. 557
↑Madeleine de Scudéry et Georges de Scudéry, Artamène ou le Grand Cyrus, Paris, Augustin Courbé, (lire en ligne), partie 9, livre 2, p. 358 et suivantes
Voir aussi
Bibliographie
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
Sources
Platon, Protagoras, 343a-b. [lire en ligne (page consultée le 9 octobre 2023)]
Typhaine Haziza, « Les Sept Sages et l’Égypte », Kentron. Revue disciplinaire du monde antique, vol. 34, (lire en ligne)
Luc Brisson (dir.) et Frédérique Ildefonse (trad. du grec ancien), Protagoras in Platon, Œuvres complètes, Paris, Éditions Flammarion, (1re éd. 2006), 2204 p. (ISBN978-2-08-121810-9)
Aude Busine, Les Sept Sages de la Grèce antique. Transmission et utilisation d'un patrimoine légendaire d'Hérodote à Plutarque, Paris, De Boccard, , 144 p. (ISBN978-2-701-80148-3, présentation en ligne).
Lambros Couloubaritsis, Aux origines de la philosophie européenne : De la pensée archaïque au néoplatonisme, Bruxelles/Paris, De Boeck, , 737 p. (ISBN2-804-12754-0).
(es) Carlos García Gual, Los Siete Sabios (y tres más) [« Les Sept Sages (et trois en plus) »], Madrid, Alianza editorial, coll. « Clásicos de Grecia y Roma », , 238 p. (ISBN8-420-60369-4)
Marek T. Olszewski, « Évocation allusive des maximes des sept sages à propos de la "colère d'Achille" sur la mosaïque de Mérida », Archelogia, , p. 37-46 (lire en ligne)
Andreas Schwab, « Les Sept Sages grecs et les “barbares” », dans Charles Méla et Frédéric Möri (dir.), Alexandrie la divine, Genève, La Baconnière, , 1132 p. (ISBN978-2-940-43122-9, lire en ligne), p. 124-129 (vol. I).