Eugène Boudin peint ses premières scènes de plage vers 1860, à l'instigation de son ami Ferdinand Martin.
La Modernité
Après une tentative d’installation à Paris, Boudin se retire à Trouville-sur-Mer, en 1862. Au même moment, à Paris, Édouard Manet (1832-1883) peint La Musique aux Tuileries. Manet et Boudin sont alors en contact avec Charles Baudelaire (1821-1867), partisan de la “modernité”. La mode, par essence fugitive, les navires à vapeur, les réverbères sur la jetée, les architectures balnéaires, représentés par Boudin, appartiennent au vocabulaire de cette “modernité”[1].
Trouville station balnéaire à la mode
Trouville-sur-Mer est une station balnéaire, avec son propre casino et ses hôtels de luxe, desservie par les nouvelles lignes de train en provenance de Paris. Les citadins aisés y profitent d'un nouveau type de vacances : les vacances à la plage. Certaines personnes y nagent (portant les nouveaux costumes de bain audacieux), mais beaucoup se rassemblent juste pour profiter de l'air marin et y poursuivre leurs relations sociales[2].
La gare de Trouville ouvre en 1863. Vêtus de crinolines impeccables et de hauts-de-forme formels, les riches touristes des compositions de Boudin illustrent la bourgeoisie nouvellement enrichie qui afflue vers la côte depuis Paris[3]. Dans La Plage, près de Trouville, en 1865, conservée au Musée Artizon à Tokyo, l’homme debout au centre du groupe de gauche, coiffé d'un chapeau melon, est le baron de Rothschild et la femme assise en blanc, avec une ombrelle, est l'Impératrice Eugénie[4]. Dans La Princesse Pauline Metternich sur la plage, réalisé vers 1865-1867, Boudin représente Pauline Metternich, épouse de l'ambassadeur d'Autriche à la cour de Napoléon III, célèbre icône de style simple mais chic. A part l'impératrice Eugénie, aucune femme n'aurait suscité plus d'intérêt sur la plage que son amie la princesse Metternich[5].
L'attitude de Boudin envers ses sujets n'était pas nécessairement sympathique et, en 1867, il décrivit ces scènes de plaisir de la classe supérieure comme «une mascarade dégoûtante» et ses sujets comme des «parasites horribles»[6].
Technique et succès
Affirmant que « trois coups de pinceau de la nature valent plus que trois jours d'atelier », Boudin peint sur de petits panneaux de bois faciles à transporter et à ranger, ce qui lui permet de peindre en extérieur[7]. Sa rapidité d'exécution et un style libre confèrent à son art une instantanéité et un caractère d’esquisse[8].
Le genre connaît très vite un vif succès auprès des amateurs, à tel point que l'artiste écrit à son frère en 1865 : « je ferai autre chose, mais je serai toujours le peintre des plages »[1].
Entre 1860 et 1896, il exécute près de trois cents peintures de ces plages « à crinolines ». Mais parmi les quelque 4500 peintures d’Eugène Boudin répertoriées à ce jour, seulement 8 % représentent des « plages à crinoline ».
Les différentes périodes
Années 1860-1871
Les années 1860-1871, sont sa période la plus fructueuse sur ce thème[9].
Dans les années 1880 les larges crinolines des années 1860 et du début des années 1870 cèdent la place à des silhouettes plus sévères et animées. Les petites filles portent des tabliers et des jupes courtes plutôt que des versions miniatures de la tenue de leur mère[10].