Après 1803, les États-Unis et l'Espagne tinrent de longues et infructueuses négociations motivées par le fait que des colons américains s'étaient progressivement installés dans cette région, le plus souvent dans un but spéculatif, car ils avaient eu vent, avant 1800, des rumeurs indiquant que l'Espagne se désengageait de la partie ouest du Mississippi, ce qu'elle a fait en 1800 en la cédant à la France qui l'a revendue aux États-Unis dès 1803. Ils espéraient qu'elle ferait de même pour la partie est mais cela ne n'est pas produit, ni en 1800 ni en 1803.
Contexte économique
Les colons anglophones arrivés dans la région avaient une raison de plus pour spéculer : l'enrichissement rapide des colons anglophones du Natchez District qui avaient bénéficié à partir de 1795 d'une adaptation locale de l'invention de l'égreneuse à coton d'Éli Whitney. Réalisée par le marchand d'origine irlandaise Daniel Clark, cette adaptation permettait de doper la productivité de la production de coton et de faire chuter son coût de production, ouvrant un immense potentiel, à condition d'avoir des terres où cultiver ce coton.
Daniel Clark fut au premier plan de cette spéculation[1] au même titre que John Smith venu comme lui de la vallée de l'Ohio, qui n'était encore qu'une extension de la Virginie, avant de devenir un État, en 1803. Ils ont utilisé comme agents immobiliers les frères Kemper, venus eux aussi de Virginie[2].
La partie est du Mississippi était la plus intéressante pour cultiver le coton. Deux sites étaient vraiment occupés par des colons, pour la plupart français et espagnols, la paroisse de Feliciana Ouest et la vallée de la rivière Tombigbee, en amont du vieux comptoir colonial de Mobile.
Lors de la signature du traité de San Ildefonso (1800), qui voient la France acheter l'ouest du grand fleuve, les diplomates français, conscients que les Américains s'intéressaient plus à cette partie est, l'avaient laissée en pointillé. De ce fait, les conflits de 1804 étaient prévisibles[1].
Entre 1801 et 1803, alors que le rachat français dans le cadre du traité de San Ildefonso (1800) est encore secret et que le pouvoir change trois fois de mains en trois ans à La Nouvelle-Orléans, Daniel Clark et John Smith envoient des agents, dans l'anticipation d'un éventuel changement de propriété ultérieur, car l'échec de l'expédition de Saint-Domingue, qui se dessine peu à peu après 1802, ne pourra que contrarier les projets de Bonaparte.
John Smith se brouilla ensuite avec les frères Kemper, qui se fâchèrent, déçus que la vente de la Louisiane de 1803 maintienne le territoire sous administration espagnole, limitant les potentiels de spéculation immobilière.
Daniel Clark négocia une amnistie des frères Kemper avec le gouverneur espagnol Carlos de Grand pré, qui refusa et fixa une récompense pour leur capture. Le , un groupe d'une quinzaine d'hommes pourchassa les frères Kemper et leur firent subir de mauvais traitements[3].
Les colons s'accommodaient d'autant mal du règne de l'Espagne, que celle-ci décida en 1809, comme les Etats-Unis et dans le sillage de l'Angleterre, d'abolir la traite négrière.
Tout était parti de la traversée l'Espagne par Napoléon Bonaparte, pour faire le blocus des côtes atlantique, Portugal inclus, qui s'est heurtée , à la révolte des madrilènes. La répression fit 500 morts et Joseph Bonaparte, couronné roi d'Espagne, dût s'enfuir. Son retour à Madrid le , déclencha de violentes réactions anti-françaises, encouragées par les succès peu avant du gouverneur Juan Sánchez Ramírez, qui avait attaqué le les français de l'est de Saint-Domingue, puis les en avait chassés après sa victoire à la Bataille de Palo Hincado le .
En Floride occidentale, où les français de Cuba et de Haïti se replièrent, cette évolution mena à une nouvelle rébellion contre les espagnols en 1810. Le , après des assemblées qui se tinrent dès le mois de juin, les rebelles submergèrent la garnison espagnole de Bâton-Rouge et déployèrent le drapeau de la nouvelle république : une étoile unique blanche sur un fond bleu. Ce drapeau sera plus tard nommé le Bonnie Blue Flag, appelé aussi le drapeau des « borders ruffians ».
Après 34 jours d'autonomie, l'annexion par une nouvelle puissance, les États-Unis
Le , une partie de la Floride-Occidentale fut annexée par une proclamation du président des États-UnisJames Madison, qui revendiquait la région comme faisant partie de la vente de la Louisiane. Tout d'abord, Skipwith et le gouvernement de Floride-Occidentale s'opposèrent à la proclamation, préférant négocier les termes de leur entrée dans l'Union. Cependant, William C. C. Claiborne, qui avait été envoyé pour prendre possession du territoire, refusa de reconnaître la légitimité du gouvernement de Floride-Occidentale. Skipwith proclama qu'il était prêt à « mourir en défendant le Lone Star Flag[4] ». Cependant, Skipwith et le parlement firent volte-face et acceptèrent la proclamation de Madison. Les États-Unis prirent possession de St. Francisville le et Bâton-Rouge le .
L’Espagne continua de disputer la région, mais les colons américains accroissaient régulièrement leur présence sur le territoire qu'ils occupaient, certains y pratiquant un important trafic d'esclaves, qui culmine pendant la guerre anglo-américaine de 1812, avec un flux de vingt mille personnes par an.
Le centre du trafic est l'île d'Amélia, entre la Géorgie et la Floride espagnole, qui abrite parfois jusqu'à 300 navires en même temps, et accueille des pirates et négriers comme le Français Louis-Michel Aury[5].
Après la guerre anglo-américaine de 1812, achevée en 1815, les trafiquants se disputent le territoire et font valoir l'activité de corsaires auprès des forces indépendantistes de l'Empire espagnol, en passe de l'emporter au Mexique et au Pérou, en particulier Simon Bolivar, qui a parfois accepté le secours d'anciens proches de Napoléon Bonaparte. Le "scandale de l'Amelia Island", désignant l'anarchie qui s'installe sur un territoire floridien plus vraiment espagnol, mais pas encore vraiment relié aux Etats-Unis, incite ces derniers à sévir et l'envahir en 1817, pour en chasser le français Louis-Michel Aury, ouvertement hostile à l'Espagne.
En , un rapport des douanes assure que des esclaves entrent en Georgie par ce biais quasiment tous les jours[5]. Le scandale est ainsi également à l'origine d'une loi votée en 1818, à l'initiative du président américain James Monroe, qui offre une récompense aux esclaves ou aux associés de négriers donnant des informations permettant de faire saisir des navires négriers. La vente issue de la saisie est partagée en deux, la moitié pour l'informateur et l'autre pour l'État[5]:616.
Reconnaissante à l'éviction de ses ennemis, l'Espagne cède toute la Floride aux États-Unis lors du traité d'Adams-Onís en 1819. C'est seulement à cette date qu'est créé officiellement un territoire américain, en raison du nombre d'habitants permanents requis légalement pour cette création, le territoire de Floride, consistant en la majeure partie de la Floride orientale (la péninsule) et une petite partie de la Floride Occidentale, qui voit le jour officiellement le .
La partie de Floride Occidentale maintenant située en Louisiane est connue sous le nom de Paroisses de Floride. Le musée historique de la république de Floride occidentale est situé à Jackson. En 1993, la Législature d'État de Louisiane renomma la partie de l'Interstate 12, qui est compris dans les Paroisses de Floride, la « Republic of West Florida Parkway ».
En 2002, Leila Lee Roberts, arrière-petite-fille de Fulwar Skipwith, fit don de l'original de la Constitution de la république de Floride occidentale et des documents y afférents au service des archives de l'État de Louisiane.
Notes et références
↑ a et bThe Mississippi Territory and the Southwest Frontier, 1795-1817, p. 108.
↑John D. W. Guice, Thomas Dionysius Clark, The Old Southwest, 1795-1830 : frontiers in conflict, p. 46.
↑ a et bThe Mississippi Territory and the Southwest Frontier, 1795-1817, page 111.
↑Lone Star Flag en français, le drapeau à une seule étoile.
↑ ab et c(en) Hugh Thomas, The Slave Trade : The Story of the Atlantic Slave Trade : 1440-1870 (lire en ligne), p. 614.
Sources
(en) David A. Bice, The Original Lone Star Republic : Scoundrels, Statesmen and Schemers of the 1810 West Florida Rebellion, Heritage Publishing Consultants, 2004, (ISBN1-891647-81-4)
(en) Roger G. Kennedy, Mr. Jefferson's Lost Cause : Land, Farmers, Slavery, and the Louisiana Purchase, Oxford University Press, 2003, (ISBN0-19-515347-2)
(en) Isaac Joslin Cox, The West Florida Controversy, 1798-818 : A Study in American Diplomacy, Baltimore, Johns Hopkins Press, 1918.