Selon le ministre et alpiniste Pierre Mazeaud, Pierre Allain est le « premier alpiniste français»[1].
Pierre Allain, élevé à Paris, découvre l'alpinisme en vacances dans les Alpes dans les années 1920. En 1930, son ami Robert Latour lui fait découvrir l'escalade en forêt de Fontainebleau et Chamarande. Il entre donc au Groupe de Bleau (comptant notamment Marcel Ichac, Pierre Chevalier, Jean Deudon, Raymond Gaché, Alain Le Ray, Jacques Boell, etc.). En 1930, il réalise sa première vraie saison d'alpinisme dans les Alpes avec Robert Latour. Comme les autres alpinistes parisiens, il passe donc la saison d'été dans les Alpes et grimpe le reste de l'année à Fontainebleau.
1933 : première de l'arête sud-ouest de l'Aiguille du Fou avec Robert Latour.
1935 : première ascension de la face nord du Petit Dru[2] avec Raymond Leininger (sans crampon, sans chaussure de montagne, avec une corde de chanvre de 7 mm de diamètre). « Cette première fit à l'époque le tour de l'Europe[3]. » Puis ouverture d'une « directissime » dans la face sud de La Meije depuis le Glacier Carré, avec Raymond Leininger[4] (fin de la voie ouverte en 1934). Également première de la face est de la Dent du Caïman avec Raymond Leininger.
1938 : première (sans lancer de corde) du Doigt de l’Etala aux Petits Charmoz avec Jean Leininger. Tentative à l'éperon Walker aux Grandes Jorasses avec Raymond Leininger. L'éperon, grand défi des alpinistes européens de l'époque, sera vaincu quelques jours plus tard par les Italiens menés par Riccardo Cassin.
1947 : première de la face sud-ouest du Cardinal avec F. Aubert, Auguste Fix et J. Rousseau. Première de la face ouest de Blaitière avec Auguste Fix (qui grimpa en tête), dont le passage-clé, une fissure déversante au rebord évasé devait se situer dans la difficulté maximale de l'époque (6 sup). Effectuant la deuxième ascension, Terray et Lachenal confirmèrent que cette voie dépassait en difficulté rocheuse, tout ce qui était connu dans le massif du Mont Blanc.
1950 : Pierre Allain ne peut participer à l’expédition de l'Annapurna pour des raisons de santé (son camarade du Groupe de BleauMarcel Ichac sera le seul « ancien » de l’expédition du Karakoram de 1936 à partir à l’Annapurna). Première de l’arête nord-ouest des Grands Charmoz avec Marcel Schatz (membre de l’expédition à l’Annapurna). Homme modeste, artisan avant tout, Pierre Allain refuse la présidence du Groupe de haute montagne (GHM), qui regroupe l'élite de l’alpinisme français, voire mondial.
1963 : Pierre Allain quitte Paris pour s’installer définitivement dans les Alpes, à Uriage dans le Dauphiné. Il consacre son temps à son atelier qui fabrique des mousquetons légers, des échelles de spéléologie, etc.
1984 : à 80 ans, il escalade la voie Boell[6] à la Dibona, avec son fils Paul.
Inventions
En 1934-1935, Pierre Allain, ancien ouvrier, ouvre à Paris (8, rue des Ciseaux, 75006) un magasin pour vendre les articles de montagne de son invention. Pierre Allain a en effet inventé :
le sac de couchage en duvet (mais le principe du sac de couchage existait déjà), la cagoule de bivouac, le pied d’éléphant, la veste en duvet. Lancés par Pierre Allain vers 1935, ces équipements permettent d'installer des bivouacs en haute montagne. Ce matériel fut repris par divers fabricants[7] ;
le mousqueton en alliage léger (65 g au lieu de 140 g) avec amélioration du ressort (1933). Le mousqueton a été utilisé pour la première fois dans l'alpinisme en 1910 par Otto Herzog ;
le chausson d’escalade « PA », à semelle lisse en gomme, deviendra l’article standard de la varappe, remplaçant les espadrilles (1935, commercialisé en 1948). Le concept de la PA fut d'abord repris par l'EB d'Édouard Bourdonneau, puis par d'autres fabricants de chaussons. Chez les grimpeurs, la PA, plus adaptée à la difficulté accrue des escalades, finit par remplacer la Vibram (de l'Italien Vitale Bramani) ;
le descendeur (1943). Jusqu'alors, les descentes se faisaient avec la corde prise entre les jambes et l’épaule (rappel en S). Ce descendeur évite les brûlures sur le corps. Les alpinistes furent cependant méfiants au départ et « Le descendeur, modifié par un autre fabricant, ne deviendra courant que dans les années 1960 »[8] ;
le décrocheur qui permet de faire des rappels de 60 mètres sur une corde de 60 mètres en économisant la corde double en rappel. La corde, nouée sur un crochet à ressort, ne tient que par la tension due au poids de l’alpiniste qui descend (quand la paroi est verticale le seul poids de la corde suffit à maintenir le crochet fermé, dans ce cas il faut soulager le poids de la corde avec un mouvement du poignet pour que la corde et le décrocheur tombent). Dès que le grimpeur libère la corde de son poids, le système tombe avec la corde. Le système restera cependant impopulaire auprès des alpinistes, à cause de son utilisation délicate.