Pierre-Barthélemy Gheusi, connu aussi sous le pseudonyme de Norbert Lorédan, est un directeur de théâtre, journaliste et écrivain français né à Toulouse le et mort à Paris le .
Biographie
Fils d'un banquier, cousin éloigné de Gambetta (dont il publie la correspondance), Pierre-Barthélemy Gheusi fait ses études au collège de Castres, où il rencontre Jean Jaurès, son aîné de six ans, élève des grandes classes (jusqu'en 1876), et se lie d'amitié avec le médecin et érudit François de Vesian. Il part à Toulouse faire ses études de droit.
En 1887-1888, à l'instigation de Laurent Tailhade, il collabore à la revue Le Décadent d'Anatole Baju, sous le pseudonyme de Norbert Lorédan mais sa carrière littéraire peine à décoller, malgré les recommandations d'Émile Zola et de Catulle Mendès.
Gheusi tâte un peu de politique dans le camp républicain en faisant la campagne électorale de Jaurès aux élections législatives de 1889 à Castres. Puis il choisit d'entrer dans l'administration et devient, grâce à l'appui de Léon Bourgeois, chef de cabinet du sous-préfet de Reims. S'ennuyant en province, il obtient rapidement sa mutation à Paris. Pendant les années qui suivent, le Gouvernement fait sporadiquement appel à lui. En 1897, Ernest Constans l'envoie en tournée d'inspection des écoles chrétiennes en Palestine. Après un bref passage au Ministère des Colonies en 1906, auprès de Georges Leygues, comme lui originaire du Sud-Ouest de la France, il est chargé par le Toulousain Jean Cruppi, alors ministre français des Affaires étrangères, de travailler en 1911 au rétablissement des relations diplomatiques entre la France et le Venezuela.
En 1894, il épouse Adrienne Willems, nièce du peintre Florent Willems et fréquente, aux côtés de nombre d'autres libre-penseurs et francs-maçons, la Luscrambo, société regroupant les Toulousains de Paris, fondée par l'artiste lyrique et plus tard directeur de l'Opéra, Pedro Gailhard.
En 1897, Arthur Meyer lui confie la direction du supplément littéraire illustré du Gaulois qui vient d'être créé sous le titre Le Gaulois du dimanche. En 1899, il rachète La Nouvelle Revue à Juliette Adam. Sous sa direction, ce périodique connaît une période particulièrement brillante. En 1913, il fait nommer Henri Austruy à la tête de La Nouvelle Revue.
À Paris, il réside 4 rue Saint-Florentin. En 1911, il acquiert aux enchères « avec une douzaine d'amis réunis en société civile » le château du baron de L'Espée, à Ilbarritz, près de Biarritz, dont il recommanda le séjour, par l'intermédiaire de son notaire biarrot, au couple Deschanel en quête d'un lieu de repos ; il envisagea d'y créer un golf, mais la première guerre mondiale interrompt les travaux et il transforme la demeure en hôpital pour les blessés rapatriés du Front. Lui-même sert comme officier d'ordonnance de Gallieni à qui il consacre de nombreux livres.
Pedro Gailhard l'avait appelé à ses côtés à la direction de l'Opéra en 1906 et, en 1914, il avait enfin obtenu la direction de l'Opéra Comique, dont il rêvait depuis longtemps. Il en est brutalement remercié en 1918 par son ennemi juré Clemenceau. Après un court passage à la direction du Théâtre Lyrique du Vaudeville (1919-1920), il entre comme rédacteur au Figaro et ne tarde pas à y être promu directeur-administrateur. Il défend la mémoire de Gambetta et de sa compagne Léonie Léon dans les colonnes du Figaro, lors d'une polémique avec Léon Daudet à propos de son roman, Le Drame des Jardies. Dans cette période de direction du quotidien, il est notamment chargé par le nouveau propriétaire, François Coty, d'organiser la fusion avec le journal avec Le Gaulois en 1929, avant d'être congédié en 1932.
Anatole de Monzie, ministre de l'Instruction publique et des Beaux-Arts, le nomme à nouveau à la direction de l'Opéra-Comique qui est au bord du gouffre financier. Gheusi n'hésite pas à renflouer le théâtre de ses propres deniers, mais le personnel le contraint à la démission au moment des grèves de 1936.
Il meurt à Paris le . Ses mémoires, Cinquante Ans de Paris, sont un document très précieux sur la vie politique et mondaine sous la IIIe République. Il était commandeur de la Légion d'honneur (décret du 3.1.1926).
Œuvres
Œuvres dramatiques et livrets d'opéras
La Fée aux roses, (saynète) par Norbert Lorédan, Castres, Imprimerie du Progrès, 1888
Konrad Wallenrod, drame lyrique en trois actes, musique d’Ernest Lefèvre-Dérodé, représenté au Grand Théâtre de Reims vers 1890.
Rayon d'onyx, poème mis en scène, Reims, Imprimerie de l'Indépendant rémois, 1890
La Veillée de Jeanne d'Arc, Grande scène lyrique pour soprano, chœur d’hommes et orchestre, musique d’Ernest Lefèvre-Dérodé, exécutée au Grand Théâtre de Reims en .
Le Carillon, opéra en 3 actes, en collaboration avec Jules Méry, musique J. Ulrich, créé à Aix-en-provence le
Damayanti, légende lyrique en 1 acte, musique de Lucien Fontayne, créé au Grand-Théâtre de Marseille le , Paris, imprimerie de P. Dupont, 1895
Ermessinde, opéra en 2 actes et 3 tableaux, Paris, impr. de P. Dupont, 1895
Çanta, tragédie lyrique en 3 actes et 4 tableaux, d'après les Bramânas et le Ramayana, avec J. Fonville, musique Pierre Kunc, Concours musical de la ville de Paris. 1900-1903, Paris, impr. de P. Dubreuil, 1904
Fiorella, comédie lyrique en 1 acte, avec Victorien Sardou, Paris, Enoch, 1905
La Vie prodigieuse du maréchal Gallieni, Paris, Plon, 1939
Divers
Quelques pages d'un vieil album, Castres, imprimerie du Progrès, 1889
Le Blason héraldique, manuel nouveau de l'art héraldique, de la science du blason et de la polychromie féodale, d'après les règles du moyen âge, Paris, Firmin-Didot, 1892
Midi. Silhouettes : E. Barbey, Constans, Gailhard, Gallieni, Mgr Gazaniol, Jean Jaurès, Georges Leygues, Verdi, Paul Vidal, Emma Calvé, Aïno Ackté, etc. Théâtre, paysages et légendes, de l'Opéra à la mosquée d'Omar, Paris, Flammarion, 1900
Sous le volcan, Paris, Flammarion, 1903
Les Atlantes, aventures de temps légendaires, avec Ch. Lomon, Paris, La Nouvelle revue, 1905
Les Chefs, études politiques et de théâtre, Paris, Flammarion, 1914
Guerre et théâtre, 1914-1918. Mémoires d'un officier du général Gallieni et journal parisien du directeur du théâtre national de l'Opéra-Comique pendant la guerre, Nancy-Paris-Strasbourg, Berger-Levrault, 1919
L'Opéra-Comique pendant la guerre, Paris, La Nouvelle revue, 1919
L'Affaire de l'Opéra-Comique et l'Opéra-Comique de Lafferre, Paris, chez l'auteur, 1923
Les Tueurs de rois, Paris, Gallimard, 1926
Jeanne Myrtale. Jean Moulierat, avec Thomas-Salignac, Rouen, Impr. Wolf, 1933
L'Opéra-Comique sous la haine, Paris, chez l'auteur, 1937
Cinquante ans de Paris, mémoires d'un témoin, 1889-1938, Paris, Plon, 1939, 4 vol.
La Femme nue du Montcalm, Paris, Aux armes de France, 1945