En Espagne, on trouve l'un des chefs-d'œuvre de la peinture du paléolithique dans la grotte d'Altamira. Ces peintures, découvertes en 1879, sont le premier ensemble pictural préhistorique de grande extension connu à l'heure actuelle. Une telle découverte détermine que l'étude de la grotte et sa reconnaissance soulève une grande polémique autour des conceptions acceptées dans la science préhistorique.
Le réalisme de ses scènes a provoqué, au début, un débat autour de son authenticité. Sa reconnaissance comme œuvre artistique réalisée par des hommes du paléolithique est un long processus qui aidera à définir les études sur la Préhistoire.
L'ensemble des grottes est actuellement reconnu comme patrimoine mondial de l'humanité de l'Unesco.
Moyen Âge
Le Moyen Âge espagnol est l'un des plus riches d'Europe, avec les deux grands courants : l'art roman et l'art gothique.
En Espagne, on ne connaît aucun vitrail peint avant le XIIIe siècle ; en revanche, plusieurs peintures murales de style roman et d'autres peintures sur table ont été recensées depuis le XIe siècle, ainsi que des miniatures de codex de dates antérieures. Ces miniatures continuèrent d'être produites au cours du XIIe siècle sans grande différence, si ce n'est une meilleure technique de dessin et une diminution de l'ornementation fantastique, ainsi qu'on peut l'observer dans le livre des Testaments de la cathédrale San Salvador d'Oviedo et dans d'autres codex de ce siècle.
De nombreuses peintures murales romanes ont survécu et restent notables :
en Catalogne, les peintures absidales d'une église appartenant à un monastère de l'époque, telles que :
les temperas qui emplissent les murs de l'ermite de San Baudelio à Casillas de Berlanga(es) représentant des épisodes évangéliques et des parties de chasse
celles qui décorent le panthéon des rois à León, avec ses scènes évangéliques, signes du zodiaque et autres éléments ornementaux
celles de la Chambre sainte d'Oviedo (début du XIIIe siècle)
en Aragon
dans les églises romanes du diocèse de Jaca, aujourd'hui conservées dans le musée diocésain de Jaca
dans l'église des Saints Julien et dans la basilique de Bagüés (Saragosse)
dans l'église de Saint-Jean Baptiste de Ruesta (Saragosse)
dans l'église de l'Assomption de Navasa (Huesca)
Les peintures sur panneau peuvent être admirés dans plusieurs parements d'autels ou retables appartenant aux XIe, XIIe et XIIIe siècles et qui sont conservés dans les musées de Vic, Barcelone et Lérida. Elles ont souvent un médaillon ou un compartiment avec une image de Jésus-Christ en majesté, c'est-à-dire assis de face avec le geste de bénédiction et à ses côtés d'autres compartiments avec plusieurs scènes de la vie du saint patron de l'église ou des figures des apôtres. On conserve également des coffrets ou regards (ou des fragments de ceux-ci) avec des peintures, comme l'ancienne arche-sepulture de Saint Isidore, faites de bois et recouvertes de cuir peint, dans le palais épiscopal de Madrid et dont les peintures représentant le saint datent de la fin du XIIIe siècle et peuvent être encore considérées comme romano-gothiques de transition.
Gothique
La peinture gothique en Espagne se développe en quatre phases.
Du style gothique linéaire ou francogothique, on note des vitraux, tels que ceux de la cathédrale de León. Des fresques murales ont survécu dans certaines églises, de même que des peintures sur table. Le travail de miniaturiste est remarquable, le chef-d'œuvre étant les miniatures illustrant le codex de l'Escurial de les Cantigas.
Le premier, de son vrai nom Domenico Theotocopuli, est originaire de Crète mais est considéré comme un peintre espagnol. Il est le principal représentant de la peinture espagnole du XVIe siècle et de toute la Renaissance. Il a peint à Tolède, où il vivait, ses œuvres les plus importantes.
Le second est un peintre maniériste et baroque primitif. Il est le maître de Diego Vélasquez (« le peintre des peintres ») et l'ami du Greco.
L'époque baroque représente en Espagne l'apogée aussi bien de l'activité picturale que dans tous les arts : on la connaît ainsi sous l'appellation de siècle d'or espagnol. La peinture baroque en Espagne se caractérise par les natures mortes et les portraits, et par le grand nombre d'artistes actifs et d'intérêt. Le plus grand représentant de ce mouvement est Diego Vélasquez, génie de la lumière et de l'obscurité et principal portraitiste de l'époque ; il est considéré comme l'un des tout meilleurs peintres, aussi bien de son époque que de tous les temps — on le définit parfois comme le « peintre des peintres. »
D'autres peintres de cette époque sont remarquables, tels que Bartolomé Esteban Murillo, spécialisé dans la représentation de ses sujets contemporains avec un grand réalisme.
Les principaux représentants de la peinture religieuse sont Francisco de Zurbarán et José de Ribera, auteurs d'un grand ténébrisme, typique de l'époque.
Parmi les portraitistes, outre Vélasquez, les plus importants sont :
Francisco Herrera el Viejo et Francisco Herrera el Mozo sont des peintres renommés au style propre. Le premier est le père du second et maître d'Alonso Cano et Diego Velázquez. Il est l'un des peintres qui ont fait la transition entre le maniérisme et le baroque, mouvement qu'il a contribué à impulser. Le second est parti étudier très tôt en Italie, mais à son retour il est surtout devenu le coprésident de l'Académie de Séville, présidée par Murillo.
Luis Egidio Meléndez, né à Naples, fait pratiquement toute sa carrière à Madrid. Il est considéré comme l'un des meilleurs peintres de nature morte du XVIIIe siècle. Malgré sa réputation, il connaît une grande misère. Luis Paret, qui développe un style personnel, crée une école de peinture à Puerto Rico. Il travaille autant les paysages que les scènes d'intérieur.
Vers la fin du XVIIIe siècle l'un des génies de la peinture espagnole commence sa carrière : Francisco de Goya. Il s'inscrit principalement dans le mouvement rococo mais expérimente dans tous les mouvements de son époque : le néo-classicisme et le préromantisme, mais conserve un style très personnel, certaines œuvres étant inclassables.
La peinture officielle des XIXe et XXe siècles s'identifie à l'art académique, les conventions néo-classiques devenant ainsi prédominantes pendant toute la période. La rupture causée par le romantisme français d'Eugène Delacroix est moins influente en Espagne, où il semble difficile de faire plus disruptif que Goya, désormais pleinement accepté. Cependant, les peintres de la première génération du XIXe siècle développent des traits propres au néoclassicisme, comme c'est le cas de José de Madrazo (1781–1859). La génération suivante, à laquelle appartient le fils de ce dernier, Federico de Madrazo (1815–1894), est plutôt étiquetée « romantique », voire « réaliste » ; parmi eux, on peut citer : Jenaro Pérez Villaamil, Antonio María Esquivel et Valeriano Domínguez Bécquer.
Réalisme, costumbrismo, préciosité et peinture d'histoire
En plus de Federico de Madrazo et des générations suivantes de cette famille, de laquelle Marià Fortuny (1838-1874, peintre qui représente l'élégance artistique typique de l'académisme et récupère le genre de la peinture de bataille, qui a connu un grand développement à l'époque baroque) est très proche, on qualifie de réalistes les peintres de la seconde moitié du XIXe siècle tels que Eduardo Rosales (1836–1873), qui cultive la peinture d'histoire. Ce genre, développé par de nombreux autres peintres, est particulièrement privilégié par les commandes institutionnelles et les concours académiques au cours de ce siècle. Avec sa diffusion publique, on souhaite construire une vision de l'histoire nationale espagnole[1]. D'autres peintres sont associés au réalisme, tels que Ramón Martí Alsina (1826-1894) et Carlos de Haes (1826–1898).
Vers la fin du siècle, plusieurs peintres s'adonnent à une peinture régionaliste :
Joaquín Sorolla, né à Valence (1863–1923), le plus important représentant de l'impressionnisme espagnol tardif, se caractérise par deux thèmes les plages et les scènes de genre à l'air libre.
Castelao, né en Galice (1886–1950), important écrivain, penseur et peintre espagnol et symbole du nationalisme galicien, est notable pour son réalisme.
Au cours de la transition entre le XIXe et le XXe siècle, plusieurs peintres proches du monde culturel de Barcelone se sont distingués en Espagne, en particulier le groupe qui se réunissait au célèvre cabaret d'Els Quatre Gats, situé au rez-de-chaussée de la Casa Martí, œuvre de l'architecte Josep Puig i Cadafalch.
Artistes notables du modernisme espagnol :
Santiago Rusiñol (1861–1931), en plus d'être peintre, il compose des pièces de théâtre, est acteur de théâtre et écrit des romans ;
Antoni Utrillo(es) (1867–1944), très lié au monde catalan, propose un style moderniste très personnel ; il est connu pour ses portraits et ses affiches ;
Joaquín Sorolla (1863–1923), le plus important peintre et artiste graphique espagnol de l'époque. Il est l'un des plus prolifiques, avec plus de 2 200 œuvres enregistrées.
Le noucentisme apparaît au début du XXe siècle comme un sous-genre du modernisme. Le terme est trouvé par l'écrivain Eugenio d'Ors, et le mouvement a une grande importance en Catalogne. Comme le modernisme, le noucentisme essaie de diffuser la culture catalane. Il contient de nombreuses charactéristiques du modernisme, comme le fait qu'un artiste devrait cultiver davantage une expression artistique. Il est difficile de distinguer les peintres du noucentisme et du modernisme, car de nombreuses œuvres sont très similaires.
Le cubisme traite les formes de la nature au moyen de figures géométriques, représentant toutes les parties d'un objets sur un même plan. Il es considéré comme un mouvement d'avant-garde, car il romp avec un principe important en vigueur depuis la Renaissance : la perspective.
Parmi tous les cubistes, sont notables les deux Espagnols :
Pablo Picasso, l'un des artistes les plus influents de l'histoire et l'un des grands maîtres du XXe siècle. Sa carrière artistique se divise en plusieurs étapes : la période bleue (1901-1904), la période rose (1904-1906) ; sa période cubisme se développe entre 1907 et 1914.
Juan Gris, grand diffuseur du cubisme et l'un des grands maîtres avec Picasso. Il fait sa première apparition collective au Salon des indépendants de 1911. D'autres styles ont dérivé du cubisme, comme le « purisme » et l'« orphisme ».
Vers les années 1920, les artistes de la première avant-garde utilisent un style connu sous le nom de néo-cubisme(es).
Le surréalisme est apparu en Espagne vers les années 1920, non pas dans son aspect purement avant-gardiste, mais mêlé à des accents symbolistes et de peinture populaire. Au cours des premières décennies de ce siècle, l'œuvre de deux des trois peintres espagnols les plus universels du siècle s'est développée, le troisième étant Picasso avec son surréalisme néo-cubiste maximal.
Salvador Dalí (1904-1989) : comme Picasso, il est un peintre très célèbre du XXe siècle ; comme lui, il est né en Espagne mais a fait une partie importante de sa carrière en France. Dalí est le principal représentant du surréalisme.
Joan Miró (1893-1983) : suiveur de Dalí et Picasso, son style relève plus d'une forme d'abstraction du surréalisme, dont sont particulièrement notables ses collages et sculptures. Miró a exprimé son souhait d'abandonner les méthodes de peinture conventionnelles, cherchant à « les tuer, les assassiner ou les violer » (selon ses propres mots), afin de favoriser une forme d'expression contemporaine.
Remedios Varo (1908-1963) : est sans aucun doute l'une des plus grandes représentantes de la peinture surréaliste espagnole.
Antonio Saura (1930-1998) : avec Remedios Varo, il fait partie du canon artistique espagnol et est une figure clé de la peinture du XXe siècle.
Les peintres des îles Canaries, Óscar Domínguez, inventeur d'une technique propre de décalcomanie, et Juan Ismael appartiennent également à ce mouvement.
En Espagne, le pop art est étudié en association avec la nouvelle figuration qui a émergé à la suite de la crise de l'art informel. Eduardo Arroyo pourrait être inclus dans cette tendance en raison de son intérêt pour l'environnement et de sa critique de notre milieu culturel, en utilisant des icônes des médias de masse et de l'histoire de la peinture, et en raison de son mépris manifeste pour tout style établi. Celui qui peut être considéré comme le plus authentiquement Pop est Alfredo Alcaín, en raison de l'utilisation qu'il fait des images populaires et du vide qu'il confère à ses compositions.
Dans les années 1980 et 1990, la peinture espagnole a vu apparaître plusieurs tendances esthétiques, parfois contradictoires, mais qui ont coexisté dans la trajectoire artistique de certains peintres, produisant une sorte de postmodernisme éloigné du souci d'unicité stylistique. Les œuvres de Juan Uslé et Antonio Murado(es) s'inscrivent dans la lignée d'une peinture abstraite au contenu lyrique, ouverte à une iconographie de signes doux et organiques. Sur un terrain pictural « néo-figuratif » lié aux images néo-pop et aux espaces proches du monde onirique surréaliste, il faut inclure les œuvres de Ángel Mateo Charris(es), Juan Ugalde(es), Mariano Carrera Blázquez(es) (dit « Dis Berlín ») et Joel Mestre(es). Une autre caractéristique de la peinture espagnole des années 1990 est la remise en question des matériaux traditionnellement picturaux, introduisant un type de peinture qui s'étend dans tout l'espace d'exposition et brouille ses frontières avec la sculpture. Les œuvres de l'artiste léonaisDaniel Verbis(es) appartiennent à ce dernier courant. Le nouveau siècle voit apparaître de nouvelles abstractions comme celles Pablo Rey, la peinture poussée à l'extrême de sa propre remise en question chez des artistes comme Perejaume.
↑(es) José Luis Díez (dir.), textes d'Alfonso Pérez Sánchez(es)et al., La pintura de historia del siglo XIX en España (cat. exp. museo de Arte Contemporáneo), Madrid, Museo del Prado (ISBN84-604-4019-2).