Organisé en quatorze salles sur deux étages, le musée expose principalement des statues, dont le célèbre « Aurige de Delphes », des éléments d'architecture comme la frise du trésor des Siphniens ou des offrandes faites au sanctuaire d'Apollon pythien comme le sphinx des Naxiens. En plus des salles d'exposition recouvrant 2 270 m2, des réserves et des salles de conservation (mosaïque, céramique et métaux) occupent 558 m2. Un hall d'accueil, une cafétéria et une boutique complètent les services offerts aux visiteurs[2].
Histoire
Premiers musées
Un premier petit musée fut inauguré le 2 mai 1903, pour célébrer la fin de la première grande campagne de fouilles françaises et en abriter les découvertes. Le bâtiment fut dessiné par l'architecte français Albert Tournaire, financé par le philanthrope grec Andréas Syngrós et construit à l'emplacement qui est toujours le sien aujourd'hui, même s'il a beaucoup été transformé. Deux ailes encadraient un petit bâtiment central. L'organisation de la collection, attribuée à Théophile Homolle, le chef de l'expédition de fouilles, était rudimentaire. Les guides affirmaient son caractère esthétique, les visiteurs son aspect entrepôt. Dans les deux cas, cela révélait l'absence d'organisation chronologique ou thématique dans les six salles originelles. La qualité des œuvres présentées suffisait. L'originalité était cependant la reconstitution avec restaurations en plâtre des principaux monuments du site afin de présenter plus pédagogiquement les découvertes[3].
Dans les années 1930, alors que le musée connaissait un succès public international indéniable, il devint insuffisant pour accueillir les nouvelles découvertes provenant du site ainsi que le nombre croissant de touristes. De plus, sa muséographie (ou son absence de muséographie) et les restaurations en plâtre étaient de plus en plus décriées. Enfin, son aspect un peu trop « français » alors que l'heure était à l'insistance sur la « grécité » était critiqué. En 1935, la construction d'un nouveau bâtiment fut entamée. Elle dura trois ans. Le nouveau musée était, comme son prédécesseur, représentatif du style architectural de son époque. L'ouverture, avec une nouvelle muséographie due au professeur d'archéologie de Thessalonique Konstantínos Romálos, se fit en 1939. La réorganisation des collections archaïques fut confiée au Français Pierre de La Coste-Messelière dont le travail fut déterminant dans la nouvelle présentation, sans les restaurations en plâtre des principaux trésors, dont celui des Siphniens qui devint l'attraction principale. Les antiquités étaient présentées de façon chronologique et cataloguées et étiquetées[4].
Cependant, l'exposition fut éphémère. Les antiquités furent cachées dès le début de la Seconde Guerre mondiale. Une partie fut enterrée à Delphes même, dans d'anciennes tombes romaines ou dans des fosses spécialement creusées pour l'occasion devant le musée. Les objets les plus précieux (les objets chryséléphantins et le taureau d'argent découverts trois mois avant le début du conflit ou l'aurige) furent envoyés à Athènes pour être dissimulés dans les coffres de la Banque nationale. Ils y restèrent dix ans. L'aurige fut exposé au musée national archéologique d'Athènes jusqu'en 1951. La région de Delphes était en effet au cœur de la zone de combats de la guerre civile. Le musée ne put rouvrir qu'en 1952 après avoir récupéré tous ses objets. Pendant six ans, les visiteurs purent parcourir l'exposition telle qu'elle avait été imaginée en 1939. Cependant, très vite, le musée se révéla insuffisant et il fallut entamer une nouvelle phase de construction fin 1958[5].
Le réaménagement intérieur du musée fut confié à l'architecte Pátroklos Karantinós et à l'archéologue qui venait de réorganiser le musée national archéologique d'Athènes Chrístos Karoúzos(el), sous la supervision de l'éphore de Delphes, Ioánna Konstantínou. Karantinós créa deux nouveaux halls d'exposition et fit entrer plus de lumière extérieure. La muséographie resta chronologique, mais une insistance plus grande se fit sur la sculpture, avec les statues de plus en plus désengagées de leur contexte architectural. La nouvelle exposition ouvrit ses portes en 1961[6]. Le musée devint un des plus visités par les touristes parcourant la Grèce : en 1998, il accueillit 300 200 visiteurs, soit presque autant que le musée national archéologique d'Athènes (325 000 visiteurs)[7],[6].
Musée actuel
Entre 1999 et 2003, le musée a subi une nouvelle phase de travaux, confiés à l'architecte grec Aléxandros Tombázis(en). Ce dernier imagina une nouvelle façade, dans un style contemporain, et une nouvelle salle pour l'aurige. Le reste du musée fut modernisé et réagencé pour faciliter la circulation des visiteurs. La muséographie tente de concilier la nécessité d'exposer les chefs-d'œuvre du musée avec la volonté de présenter les dernières hypothèses et découvertes en histoire grecque antique. Elle tend aussi à réévaluer des objets jusque-là négligés, comme les frontonsclassiques du temple d'Apollon. Le nouveau musée a rouvert ses portes pour son centenaire, coïncidant avec les Jeux olympiques[8].
Entre 2005 et 2010, le musée a connu une importante baisse de sa fréquentation, passant sous la barre symbolique des 100 000 visiteurs en 2010. Cette tendance s'est depuis lors inversée. En 2019, le musée a battu son record de fréquentation depuis les travaux au tournant du XXIe siècle, avant que la pandémie de Covid-19 ne fasse chuter le nombre de visiteurs en 2020[1].
Le tableau ci-dessous présente le nombre de visiteurs gratuits et payants par année et par mois. La deuxième colonne indique le nombre total de visiteurs annuels. Source : Autorité hellénique de la statistique (ELSTAT), mars 2021.
Le tableau ci-dessous présente les recettes par année et par mois en euros (€). La deuxième colonne indique les recettes totales annuelles. Source : Autorité hellénique de la statistique (ELSTAT), mars 2021.
Total
Janvier
Février
Mars
Avril
Mai
Juin
Juillet
Août
Septembre
Octobre
Novembre
Décembre
2005
1 224 400
25 150
19 750
56 300
112 700
175 500
160 200
137 450
158 400
165 500
137 500
43 400
32 500
2006
1 235 450
25 750
19 500
55 650
115 800
163 900
143 800
140 400
173 000
175 350
141 550
49 300
31 450
2007
1 227 250
26 600
26 000
56 250
119 700
175 700
131 600
138 350
168 400
178 250
127 700
47 950
30 750
2008
1 155 000
32 600
29 550
58 800
92 050
169 900
147 200
115 700
148 200
157 600
143 000
36 550
23 850
2009
1 015 950
20 950
16 800
33 150
91 900
135 900
95 700
113 900
124 200
172 263
153 300
34 137
23 750
2010
781 950
22 984
19 466
31 700
77 300
128 700
85 500
90 200
84 800
105 500
80 000
31 300
24 500
2011
771 000
23 100
20 200
29 700
77 600
118 700
96 100
93 000
94 100
112 500
71 700
20 900
13 400
2012
497 041
16 450
11 660
20 950
44 340
66 450
47 750
52 500
60 700
70 800
60 550
22 273
22 618
2013
677 255
22 083
18 771
43 113
59 443
79 598
69 565
72 370
81 163
89 376
89 277
27 890
24 606
2014
956 558
28 001
22 054
36 664
95 122
124 478
108 056
114 799
117 812
141 082
109 987
31 983
26 520
2015
1 074 065
28 365
27 199
35 754
114 366
154 549
141 838
134 264
126 722
147 657
111 345
29 931
22 075
2016
1 052 901
28 136
21 586
39 435
93 738
132 618
139 356
136 644
130 308
160 092
127 092
24 384
19 512
2017
1 370 370
24 102
18 276
25 920
141 780
198 852
190 020
159 792
186 300
204 936
167 592
29 082
23 718
2018
1 652 808
24 426
23 790
43 650
155 526
245 784
229 152
187 338
205 962
251 484
216 960
40 902
27 834
2019
1 897 962
27 150
25 938
63 528
206 508
302 730
242 922
197 394
223 980
275 988
248 010
51 126
32 688
2020
210 936
33 456
26 982
11 172
fermé
fermé
2 994
27 036
49 044
28 896
30 600
756
fermé
Collections
Les collections du musée de Delphes sont organisées chronologiquement en quatorze salles.
Salles 1 et 2
Les deux premières salles sont consacrées aux époques et aux objets les plus anciens. La salle 1 présente surtout des bronzes remontant aux VIIIe et VIIe siècles av. J.-C., offrandes au sanctuaire : boucliers ou trépieds. La salle 2 regroupe la majeure partie des kouroi : statues masculines archaïques[9].
Petit bronze archaïque, sur le thème de l'épisode de l'Odyssée où Ulysse se fait attacher sous le ventre d'un bélier pour fuir de l'antre du CyclopePolyphème.
Élément de décor d'ordre ionique du trésor de l'île de Siphnos. L'une des scènes montre les dieux de l'Olympe décidant du sort de Troie, tandis que les Grecs et leurs ennemis se battent furieusement.
Les objets exposés dans la salle 9 proviennent essentiellement du sanctuaire d'Athéna Pronaia[15], tandis que la salle 10 présente les objets découverts autour de la « tholos de Marmara ».
Daochos II de Pharsale était tétrarque de Thessalie et hieromnemon (enregistreur sacré) de l’amphictyonie de Delphes entre -339 et -334 (ou, selon les sources, entre -336 et -332). L’ex-voto consistait en un socle rectangulaire de 11 m de long comportant des logements qui supportaient neuf statues, dont la plupart ont été retrouvées. Huit de ces statues ont été identifiées par des inscriptions. De droite à gauche, on pouvait voir : Apollon assis ; à côté de lui, le génarque Acnonios (fondateur de la famille princière), ancien tétrarque de Thessalie, avec ses trois fils, Agias (ou Hagias), Télémaque et Agélaos, vainqueurs de divers jeux sportifs ; puis les princes des trois générations suivantes : Daochos Ier, puis Daochos II et son fils Sisyphe II. Certaines de ces statues, au moins, ont été attribuées à Lysippe[16].
Agias, fils d'Acnonios, tétrarque de Thessalie, est l'arrière-grand-père de Daochos II, dédicateur du monument votif au dieu Apollon. Agias s'est illustré en son temps comme un pancratiste et athlète de renom, maintes fois victorieux dans tous les jeux panhelléniques. Ce groupe est attribué au sculpteur Lysippe ou à son école.
Les Danseuses de Delphes, quant à elles, sont une colonne monumentale, identifiée par l’inscription portée sur sa base. Le monument, réalisé en marbre pentélique, a été dédié par les Athéniens. La colonne se terminait par une composition de feuilles d'acanthe d'où ressortaient trois figures féminines, les mains levées, comme si elles dansaient. Elles tenaient probablement un trépied disparu, couronné par l'omphalos exposé dans la même pièce.
Parmi les autres pièces importantes de la salle, on compte une statue d’Apollon du type Patroos et la statue d’un homme portant l’himation, datée du Ve siècle av. J.-C., ainsi que la statue d’un homme âgé, vêtu d'un himation laissant l’épaule droite et la poitrine découvertes, identifié comme un prêtre d'Apollon ou un philosophe et daté des environs de -280.
Statue consacrée dans le sanctuaire d'Apollon à Delphes par Polyzalos, tyran de Géla et frère du tyran Hiéron de Syracuse, pour célébrer la victoire de son char de course aux jeux Pythiques, en -478 ou -474.
↑Gisela Richter, Kouroi. Archaic Greek Youths. A study of the development of the Kouros type in Greek Sculpture. Londres, Phaidon Press, 1960, page 128.