Marie Delcourt est née à Ixelles le lieu d'affectation de son père, militaire de carrière. Elle passe son enfance à Arlon, en Belgique. À l'âge de trois ans, elle contracte la poliomyélite et en garde des séquelles[1].
Aucun lycée ne prépare les filles aux études supérieures à l'époque et Marie Delcourt prépare seule les examens du jury central[2]. Elle passe son diplôme d’humanités gréco-latines devant le jury central et, en 1911, elle entreprend des études de philologie classique à l’Université de Liège, qui vont être vite interrompues par la Première guerre mondiale[1].
Après la mort de son père, lieutenant-colonel sur le front de l'Yser en 1914, Marie Delcourt rejoint le réseau de renseignement belge résistant[3]"La Dame Blanche" qui collecte des informations sur les mouvements de troupes pour le compte du War Office britannique[4]. Pour cet engagement, elle est décorée de la Croix d’officier de l’Empire britannique. Elle évoque cet épisode de sa vie dans son ouvrage, Nos Grands cœurs[1].
À la fin de la guerre, elle reprend ses études à l'université de Liège et obtient en 1919 un diplôme de docteur en philosophie classique[5] avant de partir étudier deux ans à Paris grâce au Concours des bourses de voyage (1920) et au Concours universitaire (1921) dont elle est lauréate[1]. Elle y étudie à la Sorbonne et à l'Institut des Hautes Etudes[2].
Carrière
À partir de 1922, elle enseigne à l'Institut supérieur des demoiselles ouvert par Léonie de Waha (et qui porte aujourd'hui son nom Athénée Léonie de Waha) à Liège. Elle occupera ce poste jusqu'en 1940 en s'efforçant de favoriser l'accès des filles aux études[1].
Parallèlement, elle poursuit ses recherches personnelles et publie de nombreux travaux dont la qualité est remarquée[2].
Elle est la première femme à être chargée de cours à l'université de Liège où elle crée, en 1929, un cours d'histoire de l'humanisme[5]. L’École liégeoise d'Histoire de l'Humanisme naîtra de cette initiative[3]. Seule femme dans un milieu d'hommes, elle n'est, au début, pas rémunérée et ne bénéficie pas des mêmes avantages qu'eux et n'a pas une très bonne opinion de cette université bourgeoise et conservatrice[1].
Limitée dans ses déplacements par son handicap, elle écrit et correspond énormément. En plus des livres scientifiques, elle écrit de la poésie, des nouvelles, des chroniques pour le journal Le Soir et même des recettes de cuisine[1].
En 1925, le prix Joseph Gantrelle lui est décernée par l'Académie royale de Belgique pour son livre Études sur les traductions des tragiques grecs et latins en France depuis la Renaissance[réf. nécessaire]. Après la publication de sa Vie d'Euripide, en 1930, elle traduit et commente son théâtre.
Elle se marie en 1932 avec Alexis Curvers un jeune poète peu conventionnel qui deviendra un romancier reconnu[6].
Marie Delcourt est membre de l’équipe dirigeante de l’Union des Femmes de Wallonie, dont Léonie de Waha est la présidente. Elle prend position à diverses reprises en faveur du droit de vote des femmes et de leur droit au travail[2].
Elle s’intéresse aussi au régionalisme et à la situation de la Wallonie[2] et publie régulièrement des articles dans la revue Femmes wallonnes.
Fin de vie
Vers la fin de sa vie, elle souffre de problèmes de vue et doit abandonner l'étude du sanskrit qu'elle a entreprise mais continue de correspondre intensément avec ses amis. Elle ne quitte plus sa chambre. Son mari, aidé de quelques amies, la soigne jusqu'au bout. Elle meurt le [6].
Après sa mort ses amis créent l'association Les amis de Marie Delcourt, que préside son mari jusqu'à son décès en 1992.
Une rue d'Arlon porte son nom ainsi qu'une salle de l'Université de Liège.
Œdipe ou la légende du conquérant, avec Conrad Stein, Éd. Fac.Phil.Lett., Liège, 1944, (FacPhLg, 104). Rééd., Éd. Gallimard, Paris, 1981
Les grands sanctuaires de la Grèce, Éd. P.U.F., Paris, 1947 (Mythes et Religions, 21)
L'oracle de Delphes, Éd. Payot, Paris, 1955. Rééd., ibid., 1981
Héphaistos ou la légende du magicien, Éd. Belles-Lettres, Paris, 1957 (FacPhLLg 146)[7],[8].
Hermaphrodite, mythes et rites de la bisexualité dans l'antiquité classique, Éd. P.U.F., Paris, 1958 (Mythes et Religions, 36). Rééd., 1992 Lire en ligne
Oreste et Alcméon. Étude sur la projection légendaire du matricide en Grèce, Éd. Belles-Lettres, Paris, 1959 (FacPhLLg 151)
Pyrrhus et Pyrrha. Recherches sur les valeurs du feu dans les légendes helléniques, Éd. Belles-Lettres, Paris 1965, (FacPhLLg 174)
Histoire de l’humanisme
Thomas More, œuvres choisies, Éd. La Renaissance du livre, Paris, 1936 (Les Cent Chefs-d'œuvre étrangers)
Jean Schlumberger, essai critique, Éd. Gallimard, Paris, 1945
Méthode de cuisine à l'usage des personnes intelligentes, Éd. Baude, Paris-Bruxelles, 1947, Rééd., Éd. Université de Liège, Fac. Phil. Lett., 1985
Marie Delcourt. L'autre regard, Ed. Le Cri/Académie royale de langue et de littérature françaises, Bruxelles, 2004. Coll. Chroniques du Journal Le Soir
Nouvelles, édité par Catherine Gravet, Mons, Université de Mons, 2015.
↑ a et bNinette Godefroid et Philippe Raxhon, Portraits de Petits et Grands Personnages du Pays de Liège, Grivegnée, Noir dessin production, , 171 p. (ISBN9782873510527), p. 160-161
↑Suzanne van Rokeghem, Jacqueline Aubenas, Jeanne Vercheval-Vervoort Des femmes dans l'histoire en Belgique, depuis 1830, 2006, Voix de l'histoire, Luc Pire éditions, 303 p. p. 128 [lire en ligne (page consultée le 2019-01-30)]
Isabelle Schopp, « Delcourt Marie (1891-1979), épouse Curvers », dans Dictionnaire des femmes belges, Bruxelles, Racine, , p. 170-171
Malika Bastin, « Marie Delcourt, la "dame blanche" et la philologue », dans Laure de Chantal (dir.), Femmes savantes. De Marguerite de Navarre à Jacqueline de Romilly, Paris, Les Belles Lettres, , 295-314 p.