Mais c'est la popularité du film documentaire Depuis que le monde est monde (1981), coréalisé par Van Brabant, Giguère et Louise Dugal, qui marque un tournant décisif[6],[7]. D'une part, puisqu'en traitant de la légalisation du métier de sage-femme et de la réappropriation de l'accouchement par les femmes, le long métrage est non seulement engagé mais militant[8],[9]. D'autre part, parce que cette visée sociale évidente a un coût : Depuis que le monde est monde est en effet porté à bout de bras pendant plus de trois ans, entre le désistement de l'Office national du film (ONF) et la reprise du projet par Les Films d'aventures sociales du Québec, société de production fondée par Giguère et Robert Tremblay[3].
En 1984, convaincus de la nécessité de faire du cinéma d'auteur ancré dans la réalité québécoise et aspirant tous deux à plus de liberté artistique pour y parvenir, Van Brabant et Giguère fondent Les Productions du Rapide-Blanc, qu'ils nommeront, après coup, en référence au chanteur éponyme du filmOscar Thiffault (1988), réalisé par Giguère et produit par Van Brabant[8],[10]. Outre le fait que ce moyen métrage inaugure la compagnie sur un succès critique, il devient également emblématique de son engagement envers le documentaire québécois, progressivement délaissé au profit du cinéma de fiction et des séries télévisées, ainsi que d'un travail collaboratif désormais essentiel entre le documentariste et celle qui sera plus souvent qu'autrement sa productrice exécutive[1],[3],[11].
Bastion du documentaire d'auteur
Si la décennie 1990 est une période charnière pour le Rapide-Blanc, ce n'est pas uniquement parce que Le roi du drum (1991) et 9, St-Augustin (1995) permettent à Serge Giguère de développer son style, en rupture et en continuité avec le cinéma direct, ou puisque Sylvie Van Brabant alterne entre la production et la réalisation de films résolument engagés, tels que Seul dans mon putain d'univers (1997) et Arjuna (1999), mais car leur compagnie représente l'un des derniers bastions du documentaire d'auteur québécois[12],[11]. Dans un article consacré aux jeunes producteurs d'alors, Myriame El Yamani résume l'engagement de Van Brabant en ces termes : « Devant la surdose d'information, jamais digérée et rarement sentie, les documentaires peuvent offrir un autre regard. Le problème est que depuis longtemps, on impose au documentaire les structures et la gérance appliquées à la fiction [...]. Les institutions ont du mal à comprendre que cela prend du temps, qu'il s'agit d'un travail créatif et qu'il faut pouvoir faire face aux surprises. C'est le pouls de la vie que l'on cherche, pas du “fast food” »[13].
À l'instar de ses deux cinéastes fondateurs, ayant des approches à la fois différentes et complémentaires, Les Productions du Rapide-Blanc privilégient les films d'auteur, souvent engagés, sur lesquels le privé ne mise plus : des projets singuliers, voire avant-gardistes, comme le documentaire musical Le trésor archange de Fernand Bélanger (1996), qui tente de retracer la langue française en Amérique, des projets éminemment sociaux, comme les documentaires signés Ève Lamont (Squat! en 2002, L'imposture en 2010, Le commerce du sexe en 2015) ou des films porteurs d'une conscience écologiste, tels que L'Île aux fleurs (2005), première réalisation de Katerine Giguère, et Chercher le courant de Nicolas Boisclair et Alexis de Ghelderet[8],[14],[15]. En somme, selon le journaliste Claude Lalumière, « Rapide-Blanc, via the work of its two founders, brings together vastly different, yet oddly complementary voices [as they both are grounded in Québécois reality], in a context that encourages artistic, social, and political engagement »[16].
Structure institutionnelle
Financement
Les Productions du Rapide-Blanc est une compagnie privée à but lucratif qui fonctionne comme suit : lorsqu'elle s'engage à distribuer un film, la compagnie permet à celui-ci de partiellement satisfaire les exigences des bailleurs de fonds, tout en déclenchant le financement de sa production par la SODEC ou Téléfilm[17],[18].
Meilleure recherche dans la catégorie série d'information, affaires publiques, documentaires toutes catégories ou spécial d'information, pour Serge Giguère dans Le roi du drum
Meilleure direction photographique dans un film, toutes catégories, pour Serge Giguère dans Le roi du drum[37],[38]
Festival international du multimédia et de la vidéo santé 1999 : Prix Fernand-Séguin pour Seul dans mon putain d'univers de Sylvie Van Brabant[2]
Festival international du multimédia et de la vidéo santé 2000 : Prix Fernand-Séguin du meilleur vidéo pour Arjuna[2],[40]
2001 – Prix Galaxi de l’Association canadienne des télévisions par le câble pour Un Everest de l'intérieur de Sylvie Van Brabant et Claude-André Nadon[41]
Festival d’Autrans 2002 : Grand prix documentaire pour Un Everest de l'intérieur de Sylvie Van Brabant et Claude-André Nadon[41]
Rencontre internationales du film documentaire de Montréal (RIDM) 2010 : Prix du Public et mention spéciale Écocaméra pour Chercher le courant de Nicolas Boisclair et Alexis de Ghelder
Festival du Film de Sept-Îles 2011 : Meilleur documentaire pour Chercher le courant[54]
Prix Gémeaux 2012 : Meilleur documentaire dans la catégorie « Société » pour Chercher le courant[55]
Prix Jutra 2015 : Meilleur long métrage documentaire pour Le Mystère Macpherson de Serge Giguère[56],[57]
Nominations et sélections
Rendez-vous du cinéma québécois 1988 : Oscar Thiffault de Serge Giguère à la soirée d'ouverture[58],[10]
Festival du film d’Aurillac 1988 : Sélection « Compétition officielle » pour Oscar Thiffault de Serge Giguère[59]
↑ ab et c(en) Claude Lalumière, « Québec dreams : Les Productions du Rapide Blanc and the films of Serge Giguère and Sylvie Van Brabant », POV : Point of View, no 66, , p. 10-13 (lire en ligne)
↑ ab et cMyriame El Yamani, « Jeunes producteurs : les messagers du risque montrent
les dents », Ciné-Bulles, vol. 15, no 2, , p. 20-23 (ISSN0820-8921, lire en ligne)
↑Réal La Rochelle, « Donne-moi de la musique », 24 images, no 151 « Serge Giguère », , p. 12-13 (ISSN0707-9389, lire en ligne)
↑André Lavoie, « Entretien avec Sylvie Van Brabant », Ciné-Bulles, vol. 16, no 4, , p. 40-43 (ISSN0820-8921, lire en ligne)
↑Serge Dussault, « Bilan du 10e festival du nouveau cinéma : enfin, un budget non déficitaire », La Presse, , n.p.
↑ ab et cMarie-Claude Loiselle, Claude Racine et André Roy, « Où êtes-vous donc? Table ronde avec Robert Daudelin, Pierre Hébert, Sylvain L’Espérance, André Pâquet, Sylvie Van Brabant. », 24 images, no 92 « Cinéma et engagement », , p. 9-18 (ISSN0707-9389, lire en ligne)
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↑ a et bMarie-Claude Loiselle, « Entretien avec Serge Giguère », 24 images, no 151 « Serge Giguère », , p. 26–31 (ISSN0707-9389 et 1923-5097, lire en ligne, consulté le )
↑Marcel Jean, « « Entrez donc ben hardiment… » : Oscar Thiffault de Serge Giguère », 24 images, no 135, décembre 2007-janvier 2008, p. 49 (ISSN0707-9389, lire en ligne)
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