Le roman est tiré d'un fait divers réel, le suicide par pendaison à la clenche de l'église Saint-Pholien du peintre Joseph Jean Kleine, le 2 mars 1922[1]
Au terme d'une mission accomplie à Bruxelles, Maigret, intrigué par un individu suspect aperçu dans un petit café de la ville, le suit jusqu'à son arrivée à Brême, où l'inconnu, qui s'appelle Jeunet, se suicide en constatant qu'on a substitué à sa valise une autre toute semblable. Maigret, qui avait procédé à cette substitution à la gare de Neuschanz, s'aperçoit que la valise de Jeunet contient de vieux vêtements tachés de sang. À la morgue, un certain Van Damme, qui s'occupe d'import-export, vient voir le cadavre. Maigret, de retour à Paris, apprend que Jeunet s'appelle en réalité Lecocq d'Arneville, originaire de Liège. À Reims, où le commissaire est appelé par l'enquête, Lecocq a été vu récemment avec Belloir, sous-directeur de banque ; chez Belloir, Maigret retrouve Van Damme, en compagnie de Lombard, photograveur à Liège, et de Janin, sculpteur à Paris : tous ces personnages sont originaires de Liège.
C'est dans cette ville que Maigret poursuit une enquête dangereuse (on tente de l'assassiner), qu'il retrouve Van Damme, Belloir et Lombard et qu'il découvre le nœud de l'affaire : le suicide de Klein, trouvé pendu dans le porche de l'église Saint-Pholien, dix ans auparavant. Tous ces Liégeois que Maigret a rencontrés sur sa route avaient formé, lorsqu'ils étaient étudiants, une petite société secrète, les « Compagnons de l'Apocalypse », dont faisait aussi partie Willy Mortier, plus riche qu'eux. Les jeunes gens passaient, dans l'atmosphère morbide du taudis de Klein, des nuits d'orgies, laissant libre cours à leurs idées libertaires et excentriques.
Lors d'une de ces réunions, une nuit de Noël, Klein, excité par l' « idée » du meurtre, a tué Mortier avec l'aide de Belloir, devant les autres restés passifs. Les six compagnons ont fait disparaître le cadavre et se sont dispersés, sauf Lecocq d'Arneville et Klein, les plus pauvres et les plus faibles. Klein s'est suicidé peu après ; la vie a continué pour les autres. Seul Lecocq d'Arneville restait hanté par le crime ; il avait même changé d'identité pour oublier, il s'était marié, mais le souvenir de cette nuit de Noël le poursuivait, l'empêchait de mener une existence normale. Et il voyait les quatre autres réussir leur vie, certains fonder un foyer... C'est alors qu'il a commencé à faire chanter ces « voleurs de bonheur » pour venger les deux morts, pour « se venger lui-même » : il avait à sa disposition les vêtements tachés de sang de Belloir dont il se servait pour faire payer les autres ; lui, brûlait les billets de banque qu'il recevait.
Maigret laissera la liberté à ces « gamins » qui ont eux-mêmes des enfants.
Aspects particuliers du roman
Enquêtant sur un meurtre vieux de dix ans, Maigret est avant tout soucieux de connaître les motivations profondes du drame et de comprendre les personnages qui y ont été mêlés. L’explication viendra des trois derniers chapitres, qui baignent dans une atmosphère particulièrement lourde et tendue.
Maurice Piron, Michel Lemoine, L'Univers de Simenon, guide des romans et nouvelles (1931-1972) de Georges Simenon, Presses de la Cité, 1983, p. 258-259 (ISBN978-2-258-01152-6)