L'Avenir, est un quatre-mâts barque qui servit de navire-école belge de 1908 à 1932. Après 24 années de service et autant de voyages autour du globe, il est d'abord vendu à la Finlande en qui le cède à son tour à l'Allemagne en , il est à cette époque rebaptisé Admiral Karpfanger. Il disparaît corps et biens, en 1938 ayant pour la dernière fois signalé sa position, le , au sud-est de la Nouvelle-Zélande. Il fut le prédécesseur du trois-mâts barquentin, le Mercator[1].
Historique
Le , le navire-école, Comte de Smet de Naeyer sombre dans le Golfe de Gascogne, emportant avec lui, 33 membres d'équipage dont 18 cadets[1] et le capitaine, le premier officier et l'aumônier restés sur le pont. Sur les 59 hommes à bord, seuls 26 survivants purent être dénombrés. L'Association maritime belge souhaite acquérir un nouveau navire-école pour le remplacer[Note 2]. Elle en confie la construction au chantier naval allemand Rickmers Reismuhler Rhederei und Schiffenbau[1].
L'Avenir
Le nouveau navire est un quatre-mâts barque doté d'une coque en acier baptisé L'Avenir. Il est lancé le . Son voyage inaugural se déroule du au . C'est un Allemand qui fut autorisé par la compagnie maritime Norddeutscher Lloyd à prendre le commandement du navire, le commandant Emil Zander[2]. En effet, l'assureur avait refusé de couvrir les risques si, d'aventure, l'on y employât un capitaine belge. La Chambre des représentants s'en était indignée mais, connaissant ces circonstances, ne s'y opposa finalement pas[2].
L'Association marine belge, se sentant mise devant un fait accompli, interpelle directement le commandant:« Veuillez permettre à vos confrères de Belgique de venir faire appel à vos sentiments de bonne confraternité. Lorsque vous avez accepté le commandement du navire-école belge, vous n'avez probablement pas pensé que, en le faisant, vous alliez contribuer à faire un affront à tout le corps des officiers de marine belges. II aura suffi, pensons-nous, d'attirer votre attention sur ce fait pour que vous ne vouliez pas vous y prêter[3]. »
Rien n'y fit. Le commandant prit donc ses fonctions pour quatre années, secondé du capitaine belge Zellien[2]. Un jeune aumônier est chargé de remplacer son prédécesseur disparu en mer sur le Comte de Smet de Naeyer, il s'agit de Ghislain Walravens, désigné par le Cardinal Mercier. Il est alors âgé de 27 ans. Il y restera 4 années mais quittera sa fonction sans regret tant le caractère, décrié par l'ensemble de l'équipage et couvert par le capitaine, du premier officier - également allemand - était ombrageux. Ghislain Walravens s'illustrera lors du premier conflit mondial en mettant sur pied, à la demande des britanniques, le réseau de renseignement Biscops[4].
En , après 24 voyages, plusieurs tours du monde, et des centaines de cadets formés en 24 années de navigation, l'Association marine belge le vend à Gustaf Erikson(en), l'armateur finlandais[Note 3]. Erikson n'en change pas le nom et en fait le navire amiral de sa flotte commerciale. Outre le fret, il y aménage 20 cabines pour y accueillir des touristes. Le pianiste Percy Grainger et sont épouse feront ainsi une croisière à son bord[5]. Le , L'Avenir est revendu à l'armateur Hamburg America Line qui le restaure dans ses fonctions de navire-école et le rebaptise Admiral Karpfanger[6].
L'Admiral Karpfanger appareille le . (1) Dernière position connue du navire-école, transmise le . (2) Baie Windhond à proximité du Cap Horn où furent découverts des restes du navire-école en .
Le naufrage de L'Admiral Karpfanger
Le navire-école, L'Admiral Karpfanger[Note 4], effectue son premier voyage fin 1937 qui doit lui permettre de rallier l'Australie. Le voyage aller se déroule sans encombre. Le , le navire entame son voyage retour en quittant Port Germain(en) en Australie-Méridionale, à son bord, il transporte 42 549 sacs de blé (3 500 tonnes). Soixante hommes sont à bord, 27 membres d'équipage et 33 cadets âgés de 15 à 18 ans. Le navire, fraîchement rénové, est en parfait état, seul le générateur du radiotélégraphe se montre récalcitrant, le capitaine, Reinhold Walker, en informe Hambourg avant son départ[7].
Le , le navire-école parvient à signaler sa position[Note 5]. Il est au sud-est de la Nouvelle-Zélande et fait route vers le cap Horn. Le 4 et le , L'Avenir échange des télégrammes commerciaux avec la compagnie de Hambourg, le 12, le capitaine Walker télégraphie que tout va bien à bord et qu'il donnera sa position le 16. Ce fut le dernier contact. La Hamburg America Line ne s'inquiète pas outre mesure, pense à une avarie de la radio. Le mois d'avril s'écoule dans cette expectative de voir resurgir L'Avenir. Aucun bateau ne signale toutefois avoir croisé le quatre-mâts ou avoir capté ses signaux radio. Fin mai, il devrait arriver dans le golfe de Gascogne, on scrute, on interroge mais le navire reste introuvable[8],[7].
Peut-être a-t-il connu une avarie sévère et mouille-t-il quelque part dans l'Atlantique sud ? En , la Hamburg America Line demande au Leuna de refaire l'itinéraire qu'a dû emprunter le voilier… Toujours rien.
En , un remorqueur chilien, le Galvarino appareille depuis Valparaíso pour partir à la recherche du navire disparu. Il croise dans la région du cap Horn du 10 au [9].
Le Bahia Blanca arpente également la Patagonie et la Terre de Feu. Le Galvarino ayant, une fois de plus fait halte à Ushuaïa pour charbonner, entame son ultime voyage de recherche, le capitaine étant sur le point de se résoudre à abandonner. Le remorqueur sillonne les baies au nord du cap Horn connues pour être le réceptacle de débris de navires et même, comme on le racontait à l'époque à propos du Marlborough qui aurait été retrouvé en 1913, 23 années après son départ, de navires entiers partis à la dérive.
Le Galvarino décide de mouiller dans une anse, la baie Windhond située au sud de l'île Navarino, des matelots se rendent à terre en chaloupe pour fouiller les multiples débris de bateaux qui jonchent le sol. L'un d'entre eux trouve une pancarte avec une inscription en allemand Kapitäne u. Offiziere[9], Capitaines et officiers. Le fabricant, responsable du réaménagement du voilier en navire-école en 1937, identifie formellement le panneau[Note 6] qui était placé sur la porte du carré des officiers[8].
On mit à l'étude les carnets de bord des différents vaisseaux croisant dans les parages du cap Horn à l'époque de la disparition du voilier, comme celui du Durham qui avait signalé d'imposants icebergs faisant plusieurs centaines de mètres de long en train de dériver au gré des courants. Le cap-hornier a peut-être croisé la route, de nuit, de l'un de ces mastodontes et sombrer rapidement, nul ne le saura jamais[8],[7].
Commandants
L'Avenir ( pavillon belge)
De 1908 à 1912 Capitaine-commandant Emil Zander
De 1912 à 1913 Capitaine-commandant H. Jacobs
De 1913 à 1914 Capitaine-commandant E. Cornelis
De 1915 à 1916 Capitaine-commandant E. Audenaerde
De 1916 à 1919 Capitaine-commandant A. Lauwereins
De 1919 à 1919 Capitaine-commandant D. Williams
De 1919 à 1919 Capitaine-commandant S. Gonthier
De 1919 à 1920 Capitaine-commandant Julius Meulemeester.
De 1921 à 1924 Capitaine-commandant W. Wenmaeckers
De 1924 à 1925 Capitaine-commandant Julius Meulemeester.
Saint Bernard de Spuikom, « Chronique d'un ex-mangeur d'écoutes », Neptunus info marine, no 196, , p. 11-15 (lire en ligne, consulté le ).
Dr Ed. van Coillie (Ego), Les âmes héroïques : L'Abbé Walravens, Bruxelles, éditions de la revue des auteurs et des livres (no 7), , 25 p. (lire en ligne).
« Le navire-école allemand Amiral-Karpfanger est-il perdu corps et biens ? », L'Ouest-Éclair, no 15220, (lire en ligne, consulté le ).
(fr + en) Roger Ghys, Histoire de l'échouement de L'Avenir, Le Courrier du Cap, Amicale Internationale des capitaines au long cours Cap-Horniers, (lire en ligne).
(fr + en) Roger Ghys, La perte tragique de l'Admiral Karpfanger, Le Courrier du Cap, Amicale Internationale des capitaines au long cours Cap-Horniers, (lire en ligne).
(fr + en) Neil W. Cormack, Admiral Karpfanger ex-L'Avenir - Une nouvelle enquête sur la perte totale du 4 mats-barque, Le Courrier du Cap, Amicale Internationale des capitaines au long cours Cap-Horniers, (lire en ligne).
Notes
↑Surnom donné par les marins belges (source:Tazieff, 1991). Tous les navires-écoles belges avaient coque et gréement blancs.
↑The Recorder, Port Pirie, South Australia, No need yet for anxiety about Admiral Karpfanger - Seafaring men say vessel probably in north Atlantic, 28 juin 1938. (lire en ligne)