Karel Petr, né le à Zbyslav, un quartier de Vrdy, près de Čáslav, alors en Autriche-Hongrie, et mort le à Prague, alors en Tchécoslovaquie, est un mathématicien tchécoslovaque, considéré comme l'un des plus importants de la première moitié du XXe siècle. Il est en particulier l'auteur de travaux sur les relations de classes de formes quadratiques et le premier auteur du théorème PDN (ou Petr–Douglas–Neumann).
Biographie
Après des études secondaires à Čáslav et Chrudim, Petr entre à l’université de Prague, où il se spécialise en mathématiques et en physique. Assistant de l'astronome August Seydler, il développe particulièrement des compétences en calcul numérique[1]. À la suite d'une pleurésie sévère et de la mort de Seydler, il renonce pour un temps à une carrière scientifique et quitte Prague pour préparer les examens d'état ; il obtient en 1893 une qualification d’enseignant et exerce une dizaine d’années dans plusieurs établissements, à Chrudim, Brno, Přerov et Olomouc[2]. À Chrudim, il rencontre Bedřiška Pošustová, la fille du directeur du lycée, qu'il épouse en 1896 à Přerov[3].
Ce mariage relance son énergie pour la recherche[3]. En 1897, il soutient une thèse O Semiinvariantách, sous la direction de František Josef Studnička et de František Koláček[4].
Parmi ses étudiants, figurent Eduard Čech, Bohumil Bydžovský(en), Václav Hlavatý, Vladimir Kořínek, Miloš Kössler et Štefan Schwarz[4]. Il faut aussi partie du comité de rédaction de la principale revue de mathématiques et de physique en tchèque, Časopis pro pěstování matematiky a fysiky.
Travaux
Karel Petr a publié plus de cent articles et ouvrages. Ses centres d'intérêt principaux, tout au long de sa carrière, sont la théorie des nombres et l'algèbre, en particulier la théorie des invariants. Mais il est aussi connu pour des résultats de géométrie.
Théorie des nombres
Petr a apporté d'importantes contributions à la question des relations entre nombres de classes de formes quadratiques[5]. Les classes de formes binaires quadratiques à coefficients entiers, , à transformations linéaires inversibles à coefficients entiers près, sont, pour un déterminant donné, en nombre fini ; leur calcul a été entamé dans les Disquisitiones arithmeticae de Carl Friedrich Gauss en 1801. En 1860, Leopold Kronecker a publié, sans démonstration, des relations entre ces nombres de classes pour certaines familles de déterminant[6],[7]. Kronecker s'appuyait sur la multiplication complexe des fonctions elliptiques ; Charles Hermite introduisit pour prouver ces relations et d'autres analogues une méthode fondée sur le développement en série des fonctions Θ[8]. C'est de cette dernière méthode que Petr s'inspire.
Dans cette formule, F(n) est le nombre de classes de formes impaires (c'est-à-dire telles que a ou c soit impair) de discriminant -n. Les fonctions Θ (issus du Cours d'analyse de Camille Jordan) sont respectivement :
,
À l'aide d'autres identités et en identifiant les coefficients de de chaque côté des formules, il parvient à montrer des relations de récurrence comme
où les sont les diviseurs d de n tels que n/d soit impair et les sont les diviseurs d de n inférieurs ou égaux à tels que d et n/d ont même parité.
De ces formules et d'autres analogues, il peut prouver les relations de Kronecker et retrouver des résultats classiques sur le nombre de décompositions d'un entier en somme de trois carrés, c'est-à-dire le nombre de solutions en nombres entiers x, y, z de .
Un an plus tard, avec les mêmes techniques, mais en faisant intervenir des transformations d'ordre supérieur des fonctions Θ, Petr obtient de nouveaux types de relations comme où x et y est une solution entière de , y est positif ou nul et x est supérieur ou égal à 2y (lorsque ou , le terme correspondant de la somme doit être multiplié par ½).
Ce résultat semble le premier cas d'utilisation de la théorie des fonctions elliptiques et des fonctions theta dans les relations de nombres de classes où intervient une forme quadratique indéfinie[10] (ici ).
Petr obtient aussi, par exemple, pour les transformations d'ordre 5, la relation , avec , y positif ou nul et x supérieur à 5y[10]. Il généralise cette relation quelques années plus tard et obtient de nouvelles expressions pour le nombre de solutions de en nombres entiers[11]. Il traite d'autres cas dans les années suivantes. Ses recherches seront reprises et développées par Georges Humbert et Jacques Chapelon.
Les contributions de Petr à la théorie des nombres incluent aussi les sommes de dix et douze carrés, le théorème de Wilson (dont il donne une preuve géométrique), les équations diophantiennes, en particulier celle dite de Pell-Fermat, et le symbole de Legendre-Jacobi[12].
En 1921, dans la suite des travaux de Charles Sturm, James Joseph Sylvester et Adolf Hurwitz, Petr construit, pour toute équation de degré pair n=2m, une suite de 2m+2 polynômes tels que s'ils sont évalués en un nombre réel ξ, le nombre de changements de signes fournit le nombre des racines de l'équation de départ dont la partie réelle est supérieure à ξ. Il en déduit une nouvelle preuve algébrique du théorème fondamental de l'algèbre (ici pour les équations de degré pair). Des variantes de ces méthodes permettent de trouver le nombre de racines de partie réelle positive ou de racines dont la valeur absolue est inférieure à un nombre positif donné[13].
Théorème de Petr en géométrie
En 1908, Petr prouve le théorème de géométrie suivant : soit un polygone à n côtés et , avec i= 1, 2, …, n-1. Si l'on construit sur chaque côté du polygone un triangle isocèledont les angles égaux sont de mesure , pour un i fixé, alors l'ensemble des n nouveaux sommets de ces triangles définit un nouveau polygone à n côtés. On peut réitérer le processus, en choisissant à chaque fois un angle différent (c'est-à-dire un i différent), dans un ordre arbitraire. À la fin, on obtient un point unique ; à l'étape précédente un polygone à n côtés régulier, de même centre de gravité que le polygone de départ.
Ce théorème généralise celui dit de Napoléon sur les triangles. Il a été redémontré indépendamment par Jesse Douglas en 1940, puis par Bernhard H. Neumann en 1941. Il est maintenant connu sous le nom de théorème de Petr—Douglas—Neumann, ou théorème PDN[14].
(cs) « O užití nauky o funkcích elliptických na theorii forem kvadratických záporného diskriminantu », Rozpravy České akademie císaře Františka Josefa pro vědy, slovesnost a umění. Třída II: Mathematicko-přírodnická, vol. 9, no 38, . Résumé : (de) « Anwendung der Theorie der elliptischen Functionen auf die Theorie der quadratischen Formen mit negativer Discriminante », Bulletin international de l'académie des sciences de Bohème, vol. 7, , p. 180-187.
(cs) « O poetu tříd forem kvadratických záporného diskriminantu », Rozpravy České akademie císaře Františka Josefa pro vědy, slovesnost a umění. Třída II: Mathematicko-přírodnická, vol. 10, no 40, .
(de) « Über die Anzahl der Darstellungen einer Zahl als Summe von zehn und zwölf Quadraten », Archiv der Mathematik und Physik, 3e série, vol. 11, , p. 83-85.
(cs) « O separaci kořenů rovnice algebraické dle reálných částí kořenů a o důkaze fundamentální věty algebry I », Časopis pro pěstování mathematiky a fysiky, vol. 50, no 1, , p. 23-33 (lire en ligne) ; (cs) « O separaci kořenů rovnice algebraické dle reálných částí kořenů a o důkaze fundamentální věty algebry II », Časopis pro pěstování mathematiky a fysiky, vol. 50, no 1, , p. 93-102 (lire en ligne).
(cs) Počet integrální, Prag, Nakl. Jednoty čes. matemat. a fysiků, .
(cs) Počet differenciální: Část analytická, Prag, Nakl. Jednoty čes. matemat. a fysiků, .
↑ a et b(cs) Zdenka Crkalová, Jaroslav Folta et Pavel Šišma, « Biographie de Karel Petr », sur Významní matematici v českých zemích
(Mathématiciens notables des pays tchèques), .
↑Leopold Kronecker et Jules Hoüel (traducteur), « Sur le nombre des classes différentes de formes quadratiques à déterminants négatifs », Journal de mathématiques pures et appliquées, 2e série, vol. 5, , p. 289-299.
↑Des explications sur leurs deux méthodes se trouvent dans (en) Henry John Stephens Smith, « Part VI », dans Report on the Theory of Numbers, BritishAssociation for the Advancement of Science, , art. 131-133, p. 325-337.
↑« Extraits des articles du t. L », Časopis pro pěstování mathematiky a fysiky, vol. 50, nos 4-5, , p. 297-298.
↑(en) Stephen B. Gray, « Generalizing the Petr–Douglas–Neumann Theorem on n-gons », American Mathematical Monthly, vol. 110, no 3, , p. 210–227 (DOI10.2307/3647935, lire en ligne, consulté le ).
(en) George Hoffman Cresse, « Number of Classes of Binary Quadratic Forms With Integral Coefficients », dans Leonard Eugene Dickson, The History of the Theory of Numbers, vol. 3, Carnegie Institute of Washington, , chap. VI. Voir (en) Leonard Eugene Dickson, History of the Theory of Numbers(en) [détail des éditions] pour l'ensemble.
(cs) František Nušl et Miloš Kössler, « Karel Petr: Stručný nástin jeho života a stručný přehled jeho prací. (Karel Petr. Un bref aperçu de sa vie et de ses travaux) », Časopis pro pěstování matematiky a fyziky, vol. 57, nos 3-4, , p. 169-182 (lire en ligne).
(cs) Vladimir Kořínek, « Stručný přehled vědeckých prací profesora Karla Petra v desítiletí 1928-1938 (Un court aperçu des travaux scientifiques du professeur Karel Petr entre 1928 et 1938) », Časopis pro pěstování matematiky a fysiky, vol. 67, no 5, , D245-D253 (lire en ligne).
(cs) Vladimir Kořínek, « Stručný přehled vědeckých prací profesora Karla Petra v desítiletí 1938-1948 (Un court aperçu des travaux scientifiques du professeur Karel Petr entre 1938 et 1948) », Časopis pro pěstování matematiky a fysiky, vol. 73, no 3, , D9-D18 (lire en ligne).
(cs) Karel Koutský, « Památce prof. Dr Karla Petra », Časopis pro pěstování matematiky a fyziky, vol. 75, no 4, , D341-D345 (lire en ligne).
(cs) Zdenka Crkalová, Jaroslav Folta et Pavel Šišma, « Biographie de Karel Petr », sur Významní matematici v českých zemích (Mathématiciens notables des pays tchèques), .