Isaac d'Antioche (dit aussi Isaac le Grand, ou Isaac le Docteur [malfono]) est l'auteur traditionnellement assigné à un grand nombre d'homélies versifiées (memré) et de quelques hymnes (madrashé) en langue syriaque datant de l'Antiquité tardive (191 textes dans le recensement le plus complet, non exhaustif), illustrant un genre de la littérature religieuse chrétienne créé au IVe siècle par Éphrem de Nisibe. Le nom recouvre certainement au moins deux ou trois auteurs différents, très mal identifiés.
Identification
Déjà au début du VIIIe siècle, à son correspondant le stylite Jean d'Atharib qui l'interroge sur l'identité de cet « Isaac », Jacques d'Édesse répond[1] en énumérant trois écrivains religieux de ce nom ayant vécu au Ve ou au VIe siècle, affirmant que le corpus de textes attribué à « Isaac d'Antioche » mêle des œuvres de ces trois auteurs. Certaines homélies métriques sont attribuées par la tradition tantôt à Éphrem de Nisibe, tantôt à « Isaac d'Antioche ». Le noyau du corpus traditionnel (60 homélies) a été constitué au XIe siècle par Jean bar Shushan, patriarche d'Antioche de l'Église jacobite de 1063 à 1072.
Le Pseudo-Zacharie le Rhéteur (écrivain d'Amida, de langue syriaque) évoque brièvement[3] « Isaac le professeur (malfono), natif de Syrie [...], qui alla à Rome et séjourna dans d'autres cités, et dont les livres sont pleins d'un enseignement profitable, contenant toutes sortes de commentaires sur les Saintes Écritures, suivant l'école d'Éphrem », ce qui semble correspondre à l'« Isaac d'Amida » de Jacques d'Édesse. La Chronique du Pseudo-Denys de Tell-Mahré précise que cet Isaac composa un poème sur les Jeux séculaires célébrés à Rome en l'an 404 et qu'il écrivit aussi sur le pillage de Rome par les Wisigoths en 410 (textes non conservés). La Vie anonyme d'Éphrem de Nisibe mentionne un de ses disciples nommé Isaac, mais le patriarche Jean bar Shushan précise que son auteur n'eut pas comme maître Éphrem lui-même, mais son disciple nommé Zénobios. Quoi qu'il en soit, cet Isaac ayant vécu à la fin du IVe siècle et au début du Ve siècle ne peut être la même personne que le monophysite contemporain de Zénon, l'auteur de l'homélieSur le perroquet, qui paraît bien être celui d'une grande partie du corpus, l'« Isaac d'Antioche » d'origine.
Paul Bedjan (éd.), Homiliæ S. Isaaci Syri Antiocheni I, Paris, 1903 (67 memré).
Gustav Bickell (éd.), Sancti Isaaci Antiochi Doctoris Syrorum opera omnia syriace arabiceque edidit, latine vertit, 2 vol. parus[4], Giessen, 1873 et 1877 (21 memré et 16 madrashé).
Thomas-Joseph Lamy (éd.), Sancti Ephræm Syri Hymni et Sermones, 4 vol., Louvain, 1882-1902, réimpr. Gorgias Press, 2011 (contient plusieurs memré attribués également à Isaac d'Antioche).
Cyril Moss (éd.), « Isaac of Antioch, Homily on the Royal City », Zeitschrift für Semitistik, 1929, p. 295-306.
Stanley Kazan (éd.), « Isaac of Antioch's Homily against the Jews », Oriens Christianus 45, 1961, p. 30-53.
Traductions françaises
Paul Féghali (trad.), « Isaac d'Antioche, poème sur l'Incarnation du Verbe », Parole de l'Orient 10, 1981-82, p. 79-102.
Paul Féghali (trad.), « Isaac d'Antioche, une hymne sur l'Incarnation », Parole de l'Orient 11, 1983, p. 201-222.
Bibliographie
Michel van Esbroeck, « The Memra on the Parrot by Isaac of Antioch », Journal of Theological Studies 47, 1996, p. 464-476.
Tanios Bou Mansour, « Une clef pour la distinction des écrits des Isaac d'Antioche », Ephemerides Theologicæ Lovianenses 79:4, 2003, p. 365-402.
Id., « La distinction des écrits d'Isaac d'Antioche : les œuvres inédites », Journal of Eastern Christian Studies 57:1-2, 2005, p. 1-46.
Id., « Les discours à caractère christologique et leur appartenance aux Isaac (d'Antioche) », Oriens Christianus 89, 2005, p. 8-42.
Id., « Les écrits ascétiques ou "monastiques" d'Isaac dit d'Antioche », Journal of Eastern Christian Studies 59:1-2, 2007, p. 49-84.
↑Jacques d'Édesse, « Lettre à Jean le Stylite sur diverses questions », dont la partie concernant Isaac est éditée et traduite dans l'édition de Paul Bedjan (p. IV-VI) et dans l'édition Lamy d'Éphrem (vol. IV, p. 362-63).
↑Bibliotheca Orientalis Clementino-Vaticana I, Rome, 1719, 207b-234b.