« C'est le premier film américain de l'allemand Detlef Sierck, devenu Douglas Sirk : émigré aux États-Unis en 1939, le cinéaste avait été pris sous contrat par la Warner, puis par la Columbia, mais aucun de ses projets n'avait abouti ; entre ces deux expériences, il s'était retiré quelques mois pour élever de la volaille dans une ferme près de San Francisco. En 1942, une toute petite compagnie, PRC, lui proposa de tourner en une semaine (!) un film antinazi, comme Hollywood en produisait beaucoup à l'époque. Moins ouvertement ambitieux que les films d'espionnage équivalents de Lang ou de Hitchcock, Hitler's Madman s'inspire d'une histoire vraie[1] et la raconte sans détours, avec justesse et clarté. Le travail sur le noir et blanc avec l'opérateur Eugene Schufftan est d'une richesse exceptionnelle, tout comme l'interprétation shakespearienne de John Carradine. Sirk joue également d'un symbolisme simple - la ruralité tchèque, image de vie et de fécondité, s'oppose au mal nazi -, et il est difficile de ne pas être ému par les scènes finales. Fait curieux, les rushes du film plurent tellement que la MGM accepta de le distribuer, à condition que certains passages soient à nouveau tournés, avec plus de moyens. D'où un certain déséquilibre entre un parti pris de départ franchement documentaire et, à l'arrivée, certaines reconstitutions plus fastueuses. Mais les qualités du film sont intactes. »