Hind Chelbi (arabe : هند شلبي ), morte le 24 juin 2021 , est une universitaire tunisienne , chercheuse en sciences coraniques , ayant notamment enseigné l'interprétation (tafsir ) des sens des versets (ayat ) du Coran à l'université Zitouna .
Biographie
Famille
Elle naît dans une famille historiquement liée à l'université Zitouna , son père Ahmed Chelbi y étant lui-même professeur.
Carrière
Elle devient une hafida à un âge relativement précoce en mémorisant le Coran auprès du cheikh Mohamed ad-Dala'i, qui lui enseigne la lecture de Qaloun d'après Nafi' (ar) .
Elle est l'une des premières femmes à étudier à la faculté de charia et de théologie de l'université de Tunis , où elle compte parmi ses professeurs Mohamed Fadhel Ben Achour , Ahmed Ben Miled, Ali Chebbi ou encore Mohamed Habib Belkhodja (ar) . En 1968 , elle obtient une ijaza en fondements de la religion (oussoul ad-dine ), qu'elle complète par un doctorat , lui permettant à son tour d'enseigner dans cette faculté (renommée par la suite université Zitouna) à partir de 1981 .
Incident avec Bourguiba
Début octobre 1975 , le président tunisien Habib Bourguiba organise, à l'occasion de la 27e nuit du ramadan (souvent considérée comme la Nuit du Destin ), une cérémonie au palais présidentiel de Carthage où Hind Chelbi est invitée à s'exprimer sur « la place de la femme en islam » [ 1] , [ 2] .
Apparaissant voilée devant le chef d'État (connu pour qualifier le hidjab de « linceul noir » et de « misérable chiffon » [ 3] ) à qui elle refuse par ailleurs tout contact physique[ 4] , son entrée en scène fait forte impression tant sur le public présent sur place qu'aux milliers de personnes qui suivent la retransmission en direct à la télévision[ 1] .
Lors de son allocution, elle critique ouvertement la politique bourguibienne, la jugeant contraire aux enseignements coraniques et prophétiques[ 5] .
Beaucoup de Tunisiens se souviennent de cet incident mémorable comme le point de départ d'un bras de fer entre Bourguiba et les milieux islamistes [ 6] (auxquels Hind refuse d'adhérer malgré leurs sollicitations[ 7] ).
Mort
Elle meurt le 24 juin 2021 des suites du Covid-19 [ 8] .
Références
↑ a et b Vincent Geisser et Chokri Hamrouni, chap. 24 « Bourguiba dans la mémoire islamiste tunisienne » , dans Michel Camau et Vincent Geisser, Habib Bourguiba : la trace et l'héritage , Paris, Karthala , 2004 , 663 p. (ISBN 2-84586-506-6 et 978-2-84586-506-8 , OCLC 419226291 , lire en ligne ) , p. 380 .
↑ « Une femme a prononcé la causerie religieuse du vingt-septième jour du Ramadan à Tunis », Le Monde , 7 octobre 1975 (ISSN 0395-2037 , lire en ligne , consulté le 21 août 2022 ) .
↑ Zakya Daoud , Féminisme et politique au Maghreb : sept décennies de lutte , Casablanca, Eddif, 1996 , 409 p. (ISBN 2-908801-92-2 et 978-2-908801-92-7 , OCLC 36944704 ) , p. 57 .
↑ François Burgat , L'islamisme à l'heure d'Al-Qaida , Paris, La Découverte , 2010 , 238 p. (ISBN 978-2-7071-6640-1 , DOI 10.3917/dec.burga.2010.01 , lire en ligne ) , chap. 2 (« Des luttes nationales aux désillusions de la « recolonisation » : les trois temporalités de l’islamisme »), p. 72 .
↑ (ar) Nadia Cherif, « رحيل العالمة الزيتونية المحجبة التي تحدت بورقيبة وبن علي! », sur echoroukonline.com , 27 juin 2021 (consulté le 21 août 2022 ) .
↑ (en) Anne Wolf, Political Islam in Tunisia : The History of Ennahda , Oxford, Oxford University Press , 2017 , 269 p. (ISBN 978-0-19-086976-2 et 0-19-086976-3 , OCLC 1289844950 , lire en ligne ) , chap. 2 (« Tunisia's Muslim Brotherhood? ») , p. 51 .
↑ (en) Habib Boularès (trad. du français par Lewis Ware), Islam : the Fear and the Hope [« L'islam : La peur et l'espérance »], Londres, Zed Books , 1990 , 144 p. (ISBN 0-86232-944-2 , 978-0-86232-944-0 et 0-86232-945-0 , OCLC 22422357 , lire en ligne ) , chap. 2 (« The Conditions of Revolution ») , p. 23 .
↑ (ar) Riadh Jegham, « حافظة القران …هند شلبي لم نرها في برامج التافهين », sur assarih.com , 24 juin 2021 (consulté le 20 août 2022 ) .
Liens externes