Heinrich Tietze était le fils du directeur de l’institut de géologie de l’université de Vienne, Emil Tietze (1845-1931) et de Rosa von Hauer, fille du géologue Franz von Hauer.
Herglotz conseilla à Tietze de passer un an en Allemagne, à l'université de Munich pour y compléter sa formation. Tietze y passa en effet l'année 1902, puis revint à Vienne y préparer sa thèse de doctorat (1902-1904) sous la direction de Gustav von Escherich (1849−1935). En 1905, il assista aux conférences de Wilhelm Wirtinger sur les fonctions algébriques et les intégrales abéliennes qui devaient lui inspirer l'idée de faire de la topologie son domaine de recherche privilégié.
Il soutint en 1908 à Vienne sa thèse d'habilitation consacrée aux invariants topologiques et obtint en 1910 un poste de professeur auxiliaire à Brünn (l'actuelle ville de Brno en République tchèque). Promu professeur titulaire en 1913, le déclenchement de la Première Guerre mondiale l'année suivante marqua l'arrêt temporaire de sa production scientifique.
Appelé sous les drapeaux, il combattit en tant que simple soldat de l'armée autrichienne jusqu'à l'armistice de 1918, et reprit son enseignement à Brünn. En 1919, l’université d’Erlangen lui offrait un poste de professeur et six ans plus tard, il fut appelé à l'université de Munich, où il devait enseigner jusqu'à sa retraite en 1950.
Élu membre titulaire de la section des sciences mathématiques et naturelles de l’Académie bavaroise des sciences en 1929[1], il poursuivit une activité de chercheur jusqu'à sa mort en 1964.
Mais surtout, Tietze joua un rôle de premier plan dans l'avènement de la topologie.
Partant du problème de la coloration des cartes, il établit un premier résultat sur les domaines adjacents d'une surface orientée. Il produisit également une démonstration élémentaire (que l'on trouve reproduite dans plusieurs livres de casse-têtes mathématiques) du fait que le théorème des quatre couleurs n'a pas d'équivalent dans les dimensions supérieures à 2.
En 1908, il se servit de la notion de groupe fondamental et de groupes d’homologie, introduits dès 1895 par Henri Poincaré, pour classer les espaces topologiques. Tietze utilisa les présentations du groupe fondamental par générateurs et relations pour démontrer (à l’aide des transformations dites « de Tietze » entre ces diverses présentations) son invariance topologique. C'est dans ce cadre qu'il formula le problème d'isomorphisme pour les groupes(en) (à savoir : « existe-t-il un algorithme permettant de décider si deux présentations finies définissent le même groupe ? »). Poincaré avait essayé d'identifier les invariants topologiques à l'aide des groupes homologiques en montrant qu'ils restent invariants lorsque l'on raffine la triangulation de l'espace. Il se posait alors le problème de savoir si deux triangulations ont toujours un raffinement commun, ce que Poincaré avait implicitement admis. Tietze fit remarquer que cela n'était qu'une pure hypothèse, qui devint bientôt dans l'histoire de la topologie la conjecture fondamentale (Hauptvermutung(en) : le mot est de Hellmuth Kneser). Tibor Radó la démontra en 1925 pour les variétés de dimension 2 et Edwin E. Moise en 1950 pour les variétés de dimension 3. Elle ne reçut ses premières réfutations que dans les années 1960 avec les travaux de John Milnor (pour les espaces topologiques quelconques) puis (pour les variétés de dimension 4 et plus), Casson et Sullivan, Kirby et Siebenmann, Donaldson, Freedman…
Il vulgarise la recherche de son temps dans un livre inédit en français, Problèmes anciens et modernes, résolus et non résolus (Gelöste und ungelöste Probleme aus alter und neuer Zeit, Munich, 1949).
Œuvres
Gelöste und ungelöste Probleme der Mathematik aus alter und neuer Zeit. 14 Vorträge für Laien und für Freunde der Mathematik, 2 Bände, DTV 1982, auch 7. Auflage, Beck Verlag, München 1980