Gillian Rose, née en en Angleterre, est une géographebritannique. Elle est professeure de géographie humaine à la School of Geography and the Environment de l'université d'Oxford, spécialiste de cultures visuelles et de géographie féministe. Elle est principalement connue pour son livre de 1993, Feminism & Geography: The Limits of Geographical Knowledge.
Elle enseigne et occupe le poste de doyenne associée à la recherche à la faculté des sciences sociales de l'Open University. Elle y est également directrice du département de géographie pendant quatre ans.
Elle rejoint la School of Geography and the Environment de l'université d'Oxford en 2017[1].
Travaux
« Je pense que l'une des plus grandes forces de la géographie - l'un de ses plus grands plaisirs - en tant que discipline, est la façon dont elle rassemble des talents et des compétences très différents, et les met à travailler ensemble dans la tâche de comprendre le monde que nous partageons tous. -- Discours d'acceptation du professeur Gillian Rose lors de la cérémonie de remise des prix et des médailles de la Royal Geographical Society en 2012. »
— Palin, Michael et al (2012) Geography as a shared project: Royal Geographical Society (with IBG) Medals and Awards ceremony 2012. The Geographical Journal 178(3) pp.279-286.
Avec Doreen Massey, Nancy Duncan et Linda McDowell, Gillian Rose fait partie des géographes qui ont mis en avant la nécessité de prendre en compte le genre en géographie[2].
Rédigé dans une perspective marxiste et féministe radicale, Feminism and Geography, publié en 1993, engendre une série de débats en géographie sur la nature de la construction du savoir géographique[3].
Elle y écrit que produire des connaissances acceptables pour la discipline géographique revient à occuper une place de sujet masculin. Elle considère en effet que la géographie est particulièrement dominée par les hommes et que les femmes ont été et continuent à être marginalisées comme productrices du savoir géographique[4]. À titre d'exemple, elle montre qu'entre 1921 et 1971, seulement 2,6% des articles publiés dans les Annals of the American Association of Geographers(en) ont été écrits par des femmes et que le premier livre portant sur la géographie du genre n'a été publié qu'en 1984 (Geography and Gender : an Introduction to Feminist Geography)[5].
Selon Gillian Rose, un certain nombre de méthodologies de la géographie sont inadéquates pour étudier les vies des femmes, comme celles de l'espace-temps[6].
Elle explore la façon selon laquelle les féministes devraient penser autrement l'espace et la géographie pour dépasser le masculinisme de la discipline. Dans ce livre, elle remet en cause des conceptions binaires portées par la géographie comme l'opposition entre espace public et espace privé[6].
Critique du travail de terrain
La pratique du terrain, souvent considérée comme essentielle en géographie, est critiquée par Gillian Rose comme par d'autres géographes féministes anglophones. D'après Anne Volvey, « elles définissent alors le terrain comme un exercice de domination masculine dont les données sont élaborées en un savoir géographique de type masculiniste. » Cette critique porte notamment sur la dimension « scopique » de la pratique de terrain, la distance qui est mise entre les scientifiques et leur objet d'étude et la non prise en compte du corps dans les pratiques scientifiques[7].
À l'inverse, ces géographes, dont Gillian Rose, proposent une façon féministe de faire des enquêtes de terrain. Cette pratique doit notamment passer par l'instauration d'une forme proximité et de care avec les enquêtés et enquêtées et par la réflexivité[7].
Identité et « sense of place »
Gillian Rose analyse l'articulation entre espace et identité. Elle recense trois registres différents :
l'identification avec un lieu ;
l'identification contre un lieu (la construction d'un « nous » qui s'oppose à un « eux » perçu comme antagoniste) ;
la non-identification avec des lieux (dans le cadre de sentiments de déplacement et d'éloignement)[8].
Gillian Rose définit l'identité comme « how we make sense of ourselves (comment nous donnons un sens à nous-mêmes) ». Elle explique que nous avons chacun des identités différentes à différentes échelles. Par exemple, l'identité locale de quelqu'un est probablement différente de son identité globale.
Gillian Rose décrit le concept de « sense of place » comme le processus consistant à donner à un lieu « un sens et un sentiment ».
Géographie et « visual culture »
Un deuxième ensemble de travaux de Gillian Rose s'inscrit dans le champ de la visual culture (aussi appelée « visual studies»).
D'après Maxime Boidy,
« les Visual Studies désignent un corpus hétérogène et conflictuel de théories politiques, sociales et culturelles d’inspiration anglo-américaine, centrées sur les problématiques visuelles et/ou fondées sur des catégories iconiques. »
— Maxime Boidy, « "I Hate Visual Culture". L’essor polémique des Visual Studies et les politiques disciplinaires du visible », Revue d'anthropologie des connaissances, 2017/3 (Vol. 11, N°3), p. 303-319.
W.J.T. Mitchell utilise « la formule “culture visuelle” pour représenter à la fois le champ et son contenu »[9].
Les travaux les plus récents de Gillian Rose portent sur les technologies numériques. À propos des technologies, Gillian Rose critique l'utilisation par les GAFAM des données personnelles et les villes intelligentes qui permettent la surveillance des populations par les gouvernements. Elle nuance ces critiques en mettant aussi en avant la façon dont ces technologies peuvent permettre des formes de résistance. Elle cite par exemple le cas d'une application qui recense les commerces permettant aux femmes d'allaiter[5].
Responsabilités scientifiques
Gillian Rose est membre du conseil consultatif de la revue scientifique Vista portant sur les « visual studies»[11].
En 2019 elle est élue membre de l'Academy of Social Sciences[16],[17].
Principales publications
Ouvrages et chapitres d'ouvrages
Ouvrages
(en) Gillian Rose, Feminism & Geography: The Limits of Geographical Knowledge, U of Minnesota Press, (ISBN978-0-8166-2418-8, lire en ligne)
(en) Gillian Rose, « Geography as a Science of Observation: The Landscape, the Gaze and Masculinity », dans John A. Agnew, David J. Livingstone et Alisdair Rogers, Human Geography: An Essential Anthology, Wiley-Blackwell, , 720 p. (ISBN978-0-631-19461-3)
(en) Gillian Rose, « Performing Space », dans Doreen Massey, John Allen et Phil Sarre, Human Geography Today, Polity Press, , 352 p. (ISBN978-0-745-62189-0)
(en) Gillian Rose, Visual Methodologies: An Introduction to Researching with Visual Materials, SAGE, (ISBN978-1-4739-6791-5, lire en ligne)
(en) Alison Blunt et Gillian Rose, Writing Women and Space: Colonial and Postcolonial Geographies, Guilford Press, (ISBN978-0-89862-498-4, lire en ligne)
(en) Michael Pryke, Gillian Rose et Sarah Whatmore, Using Social Theory: Thinking through Research, SAGE, (ISBN978-1-84787-668-3, lire en ligne)
Articles
Articles personnels
(en) Gillian Rose, « The Cultural Politics of Place: Local Representation and Oppositional Discourse in Two Films », Transactions of the Institute of British Geographers, vol. 19, no 1, , p. 46–60 (ISSN0020-2754, DOI10.2307/622445, lire en ligne, consulté le )
(en) Gillian Rose, « Distance, Surface, Elsewhere: A Feminist Critique of the Space of Phallocentric Self/Knowledge », Environment and Planning D: Society and Space, vol. 13, no 6, , p. 761–781 (ISSN0263-7758 et 1472-3433, DOI10.1068/d130761, lire en ligne, consulté le )
(en) Gillian Rose, « Teaching visualised geographies: towards a methodology for the interpretation of visual materials », Journal of Geography in Higher Education, vol. 20, no 3, , p. 281–294 (ISSN0309-8265, DOI10.1080/03098269608709373, lire en ligne, consulté le )
(en) Gillian Rose, « Spatialities of ‘community’, power and change: The imagined geographies of community arts projects », Cultural Studies, vol. 11, no 1, , p. 1–16 (ISSN0950-2386, DOI10.1080/09502389700490011, lire en ligne, consulté le )
(en) Gillian Rose, « Practising photography: an archive, a study, some photographs and a researcher », Journal of Historical Geography, vol. 26, no 4, , p. 555–571 (ISSN0305-7488, DOI10.1006/jhge.2000.0247, lire en ligne, consulté le )
(en) Gillian Rose, « Family photographs and domestic spacings: a case study », Transactions of the Institute of British Geographers, vol. 28, no 1, , p. 5–18 (ISSN1475-5661, DOI10.1111/1475-5661.00074, lire en ligne, consulté le )
(en) Gillian Rose, « ‘Everyone's cuddled up and it just looks really nice’: an emotional geography of some mums and their family photos », Social & Cultural Geography, vol. 5, no 4, , p. 549–564 (ISSN1464-9365, DOI10.1080/1464936042000317695, lire en ligne, consulté le )
(en) Gillian Rose, « Posthuman Agency in the Digitally Mediated City: Exteriorization, Individuation, Reinvention », Annals of the American Association of Geographers, vol. 107, no 4, , p. 779–793 (ISSN2469-4452, DOI10.1080/24694452.2016.1270195, lire en ligne, consulté le )
Articles co-écrits
(en) Nicky Gregson et Gillian Rose, « Taking Butler Elsewhere: Performativities, Spatialities and Subjectivities », Environment and Planning D: Society and Space, vol. 18, no 4, , p. 433–452 (ISSN0263-7758 et 1472-3433, DOI10.1068/d232, lire en ligne, consulté le )
(en) Monica Degen, Caitlin DeSilvey et Gillian Rose, « Experiencing Visualities in Designed Urban Environments: Learning from Milton Keynes », Environment and Planning A: Economy and Space, vol. 40, no 8, , p. 1901–1920 (ISSN0308-518X et 1472-3409, DOI10.1068/a39208, lire en ligne, consulté le )
(en) Gillian Rose, Monica Degen et Begum Basdas, « More on ‘big things’: building events and feelings », Transactions of the Institute of British Geographers, vol. 35, no 3, , p. 334–349 (ISSN1475-5661, DOI10.1111/j.1475-5661.2010.00388.x, lire en ligne, consulté le )
(en) Monica Montserrat Degen et Gillian Rose, « The Sensory Experiencing of Urban Design: The Role of Walking and Perceptual Memory », Urban Studies, vol. 49, no 15, , p. 3271–3287 (ISSN0042-0980 et 1360-063X, DOI10.1177/0042098012440463, lire en ligne, consulté le )
(en) Peter Merriman, George Revill, Tim Cresswell et Hayden Lorimer, « Landscape, mobility, practice », Social & Cultural Geography, vol. 9, no 2, , p. 191–212 (ISSN1464-9365, DOI10.1080/14649360701856136, lire en ligne, consulté le )
↑Sophie Louargant, « De la géographie féministe à la "Gender Geography" : une lecture francophone d'un concept anglophone », Espace Populations Sociétés, vol. 20, no 3, , p. 397–410 (DOI10.3406/espos.2002.2049, lire en ligne, consulté le )
↑ a et bAnne Volvey, Le corps du chercheur et la question esthétique dans la science géographique., (lire en ligne)
↑(en) Marco Antonsich, « Identity and Place », sur Oxford Bibliographies, (consulté le )
↑Maxime Boidy, « « I Hate Visual Culture »
L’essor polémique des Visual Studies et les politiques disciplinaires du visible », Revue d'anthropologie des connaissances, , p. 303-319 (lire en ligne)
(en) Douglas Harper, « Gillian Rose, Visual Methodologies: An Introduction to Researching with Visual Materials. », Canadian Journal of Sociology, vol. 37, no 4, (ISSN1710-1123, DOI10.29173/cjs18626, lire en ligne [PDF], consulté le )..