Un gabion (de l'italien gabbione signifiant « grosse cage ») est en génie civil un casier, le plus souvent constitué de nos jours de solides fils de fer tressés, et rempli de pierres généralement non-gélives (qui ne se fendent pas sous l’action du gel). Ils sont utilisés dans les travaux publics et le bâtiment pour construire des murs de soutènement, des berges artificielles non étanches ou décorer une façade nue ou des aménagements urbains.
D'un coût modique si l'on dispose de pierres solides sur place, et d'une bonne tenue, ils sont relativement faciles à mettre en œuvre et aisément modulables.
Les gabions peuvent être constitués par tissage de fils métalliques (mailles hexagonales double torsion) ou par soudage de fils (électrosoudage) avec des mailles carrées ou rectangulaires.
En raison de leur nature et conception, ils offrent une certaine souplesse et inertie face aux chocs et tremblements de terre ou mouvements de terrain. Ils sont également utilisés dans des aménagements hydrauliques ; l'eau peut percoler au travers d'un gabion, avec des phénomènes de dissipation d'énergie[1], exploitables par exemple pour la construction de « merlons amortisseurs »[2] et notamment pour la gestion de flux d'eau dans un bassin versant ou un système de réservoirs d'eau[3].
Histoire
Le gabion est utilisé dès l'antiquité, sous forme de panier dont l'armature est végétale (osier, bambou, etc.).
Le gabion militaire est originellement un système défensif utilisé pour rapidement protéger une position des tirs d'artillerie ou des balles. Il est apparu vers le XVIe siècle et a été remplacé au XXe siècle par le système du sac de sable, plus simple à créer et à utiliser.
Un gabion se compose alors d'un panier en osier (branches d'une espèce de saule) tressé et rempli de terre et de gravats, destinés à amortir les balles et les éclats. C'est le chaudronnier italien Gaetano Maccaferri, créateur de la société Maccaferri, qui l'a réinventé dans sa forme moderne avec une cage de fils d'acier rigides inoxydables en 1893.
Le gabion, à partir de la fin du XXe siècle, est très utilisé en génie civil où il désigne une sorte de casier, le plus souvent fait de solides fils de fer traités contre l'oxydation et tressés de manière à enfermer des pierres dures. Il est notamment utilisé dans le bâtiment pour décorer une façade nue ou pour construire un mur de soutènement, ou une berge artificielle non étanche.
Le gabionnage a encore donné lieu au XXe siècle à divers innovations[4] et brevets[5], mais leur relative simplicité de fabrication peut permettre, comme au Burkina Faso, de les faire fabriquer par des artisans locaux[6]. On a notamment essayé d'y intégrer des fonctions de services écosystémiques en les rendant parfois plus propices à la biodiversité, par exemple en permettant leur colonisation par des racines d'arbres[7].
Typologie
On distingue :
les gabions boîtes, d'une hauteur et largeur de 0,5 ou 1 m et d'une longueur de 1,5 à 4 m.
les gabions matelas, parallélépipède de faible épaisseur (0,2 à 0,3 m) et de grande surface (longueur de 2 à 6 m et largeur de 2 m).
Il existe aussi les gabions sacs ou poches cylindriques qui correspondent à des gabions tubulaires de 0,25 à 0,5 m de diamètre et long de 2 à 3 m.
Usages particuliers
Dans les aménagements hydrauliques, on utilise fréquemment des gabions disposés en épi perpendiculairement à la berge ou parallèlement aux rives pour lutter contre l'érosion fluviale ou torrentielle[8],[9]. On réalise aussi des seuils ou petits barrages.
Ils servent aussi, grâce à leurs capacités drainantes à stabiliser des éboulis, des oueds[10] ou à construire des paravalanches, notamment en terrain difficile[11].
L'utilisation des gabions en panneaux électrosoudés permet désormais la réalisation d'aménagements paysagers en gabions robustes et peu sensibles au vandalisme.
Les écrans antibruit en gabions ont de fortes capacités d’absorption acoustique de par la masse des matériaux de remplissage et le fort pourcentage de vide entre les pierres associé à une surface peu réfléchissante.
Notamment si la pierre est mélangée à un sol meuble et pouvant se végétaliser (il faut un contexte alors plus humide), ils absorbent une partie de bruit ambiant et permettent d'améliorer la gestion du bruit et le confort acoustique et d'atténuer certaines pollutions sonores (autour d'un parking urbain par exemple ou du passage d'une voie routière, ferroviaire, etc.) en jouant le rôle d'un mur anti-bruit[12].
Limites
Leur souplesse relative ne permet pas de construire des murs hauts et fins, notamment en contexte de risque sismique. Des méthodes de calcul de leur stabilité ont été développées[13],[14].
Les eaux acides et/ou salées posent des problèmes de corrosion des fils métalliques, qui limite leur utilisation dans certains contextes (estuaires, ports[15], littoraux...)[16], à moins d'utiliser de l'inox plus coûteux.
Souvent pauvres en nutriments, ils demandent peu d'entretien et ne favorisent pas les espèces de milieux eutrophes plutôt banalisantes.
Ils peuvent, en outre, utiliser des matériaux rocheux et un substrat prélevé in situ, favorable aux espèces autochtones.
Sémantique
Le mot provient de l'italiengabbione, qui signifie « grosse cage ».
Autre sens du mot gabion
« Gabion » désigne aussi, en France, un abri plus ou moins enterré, très camouflé, installé sur le domaine maritime (marais côtiers, estuaires, baies…) par des chasseurs de nuit à l'appeau du gibier d'eau (anatidés et limicoles). Appelé aussi selon les régions hutteau, tonne ou cercueil (nom dû à sa forme caractéristique), cet affût de chasse(en) peut être de petite taille et mobile (donc déplaçable sur le lieu de chasse) ou plus grand et fixe, flottant (dans les zones soumises aux effets de la marée, surtout) ou en dur (le plus souvent en béton). La chasse au gabion se distingue de la chasse à la hutte : chez cette dernière, l'abri est une cabane de chasse aménagée face à une étendue d'eau non soumise aux flux et reflux des marées (mares, lacs, étangs, gravières…) pour inciter le gibier d'eau à s'y remiser et à s'y nourrir[17].
Notes et références
↑Stephenson, D. (1979, October). Gabion energy dissipators. In Proc. 13th ICOLD Congress (p. 33-43).
↑Peyras, L., Royet, P., & Degoutte, G. (1991). Écoulement et dissipation sur les déversoirs en gradins de gabions. La houille blanche, (1), 37-47.(résumé).
↑Koch, D. (1994). Essai d'intégration de la végétation dans les gabions sur un chantier de construction de route au Népal central (Doctoral dissertation).
↑Freeman, G. E., & Fischenich, J. C. (2000). Gabions for streambank erosion control (No. ERDC-EMRRP-SR-22). Army engineer waterways experiment station Vicksburg MS engineer research and development center
↑Onsoy, H., Ucuncu, O., & Yuksek, O. (1991). Regularisation des oueds et utilisation des gabions pour la protection. Makale. Construıre Teknik Bülteni. Revue Du Bâtiment, Travaux Publics Et Hydraulique, (39).
↑Kandaris, P. M. I. (1999, January). Use of gabions for localized slope stabilization in difficult terrain. In Vail Rocks 1999, The 37th US Symposium on Rock Mechanics (USRMS). American Rock Mechanics Association (résumé).
↑Koussa, F., Defrance, J., Jean, P., & Blanc-Benon, P. (2013). Acoustic performance of gabions noise barriers: numerical and experimental approaches. Applied acoustics, 74(1), 189-197
↑Dormieux, L., & Delaurens, C. (1991). Stabilité d'une cellule de gabion sous poids propre. Revue Française de Géotechnique, (55) (résumé).
↑Schoefs, F., Capra, B., & Masson, S. (2004). Analyse de risque pour les ouvrages portuaires: cas de la perforation par corrosion d'un quai gabions. In VIIIes Journées Génie Civil-Génie Côtier.
↑« Certains gabions, notamment les plus avancés dans la baie du Mont Saint-Michel, sont submersibles et étanches, les gabionneurs s'y tenant enfermés tenant enfermés durant les heures optimales de haute mer aux très forts coefficients ». Cf Jérôme Brochet, La chasse aux canards. Tonne, hutte, cabane et gabion du grand gibier blessé, éditions du Gerfaut, , p. 30-31.
Beikircher, B., Florineth, F., & Mayr, S. (2010). Restoration of rocky slopes based on planted gabions and use of drought-preconditioned woody species. Ecological Engineering, 36(4), 421-426. (résumé)