Les géants sont des figures importantes du folklore européen, ils sont présents dans des processions et cortèges de folklore de pays du monde entier. Il s'agit soit de personnages soit parfois de dragons ou d'animaux fabuleux. Les géants processionnels, mannequins d'osier,de bois,de métal ou parfois même de plastique sont promenés dans les cortèges et autres fêtes de villes et villages. Ils sont l'une des bases les plus vivaces du folklore du Nord de la France et de la Belgique. Les cortèges comportant des géants processionnels humains ou animaux sont d'ailleurs l'une des coutumes les plus répandues de l'humanité.
Généralités
Origines
La première question qui se pose au sujet des géants processionnels est évidemment celle de leur origine ; il est impossible actuellement de répondre d'une manière catégorique à ce problème, mais il est possible de faire le point en exposant les différentes thèses avancées à ce sujet.
Les géants sont d'origine corporative. En effet, certains historiens et folkloristes ont pensé que la présence dans les cortèges de mannequins géants serait liée à la présence dans ces mêmes cortèges des corporations de métiers. Il est certain que toutes les confréries participaient, dès le Moyen Âge, à toutes les manifestations populaires et aussi aux processions religieuses. Il est certain aussi, pour ne prendre qu'un exemple célèbre, que le géant de Douai, Gayant, est une création de corporation : les sources sont en effet catégoriques à son sujet. Gayant, figurant dans le cortège de Douai de 1531, y représentait la corporation des manneliers. Un historien douaisien, G. Steenhouwer, affirme même que Marie Cagenon, sa femme, est apparue dès 1532 (mais cela est très discutable) et que ce sont les fruitiers qui la firent pour riposter contre les manneliers, mendeliers et caïeurs. Dans cette première hypothèse, les géants seraient en quelque sorte des chefs-d'œuvre des métiers.
Les géants ont été introduits en Flandre par les troupes espagnoles. Dans ce cas, on admet (et cette thèse est très en faveur) qu'il existait des géants dans la Péninsule Ibérique avant qu'il n'y en eût en Flandre. Les défenseurs de cette explication ont estimé qu'il s'agissait là d'un amusement que Charles Quint voulut procurer aux peuples soumis à sa domination pour endormir l'inquiétude des populations. Il est évident que la Péninsule Ibérique est, avec les anciens Pays-Bas (nord de la France, Belgique, Pays-Bas actuels), un des principaux foyers de cette coutume, avec aussi l'Autriche, comme l'ont montré les travaux de Klaus Beitl[1]. Mais il est tout aussi évident que des pays qui n'ont jamais subi l'influence hispanique (comme la Chine, la Scandinavie, etc.) connaissent également cette coutume ; des pays qui ont été soumis à la domination espagnole (la Franche-Comté par exemple), en revanche, l'ignorent. Peut-on prouver qu'il existait des géants en Espagne avant les géants flamands ? Les recherches sérieuses sur les gigantes espagnols sont assez rares. Nos premiers géants, d'autre part, apparaissent-ils dès le XIIIe siècle, comme le veulent ceux qui soutiennent l'existence à Cambrai d'un grand mannequin représentant saint Géry dès 1220 ? En 1900, Jules Beek[2] affirmait de toute façon qu'il existait des géants en Flandre avant 1496, date du mariage de Philippe le Bon et de Jeanne de Castille qui devait amener la domination espagnole en Flandre. Enfin, la quasi-universalité de la coutume des géants semble à elle seule détruire la légende de l'origine espagnole des géants processionnels.
Les géants ont pour ancêtre lointain saint Christophe. Telle est la troisième solution proposée. On sait que ce saint était réellement bâti comme un géant[3] ; sa statue était elle aussi, en conséquence, plus grande que celles des autres saints. Ce serait elle qui, portée dans les processions médiévales, serait à l'origine des géants. D'ailleurs, saint Christophe aurait peut-être remplacé un dieu païen ; c'est ce qu'affirme un auteur français anonyme du XIXe siècle qui raconte que les premiers apôtres de la Flandre, pour attirer dans leurs églises les populations païennes du lieu, installèrent à la porte de leurs édifices des statues énormes du dieu gaulois Ogmius, plus tard christianisé sous le nom de saint Christophe. Un Allemand, cité par le baron de Reinsberg-Duringsfeld, pense au contraire que saint Christophe a remplacé l'image du dieu germanique Thor. Dans les archives de Poperinge, on trouve des notes manuscrites selon lesquelles les géants descendraient de statues d'hommes très grands, donc de statues très grandes : celles de saint Christophe ou bien celles d'Hercule.
Les géants ont pour ancêtre Goliath. Il n'est pas impossible que l'histoire très connue et très populaire de David luttant contre Goliath ait été souvent reproduite dans les processions médiévales : alors que David était représenté par un jeune homme, Goliath aurait alors revêtu la forme d'un mannequin géant. Par la suite, tous ces Goliath des cités différentes se seraient individualisés en prenant des noms propres à chaque commune. Ce qu'il faut de toute façon remarquer, c'est le grand nombre de Goliath dans les cortèges du Moyen Âge : Nivelles, Alost (1433), Audenarde (1456), Namur (1458), Ath (avant 1481), Termonde (1468), Lierre (1469), Tirlemont et Anvers (1470), Troyes (1486), Nieuport et Venlo (1490). Quoi qu'il en soit, il est donc bien évident que Goliath a joué un grand rôle, sinon le plus grand.
Les géants descendent de Gargantua. Cette solution date de 1948-1950 et a pour auteur Henri Dontenville, président de la Société de mythologie française. Dontenville fait remonter les géants à un folklore de Gargantua, d'un Gargantua prérabelaisien d'ailleurs, qui serait à la base de toute la mythologie française[4].
Les géants ont une origine scandinave. Selon Edmond de Coussemaker[5] qui a étudié les chants populaires des Flamands de France vers 1855, « cette chanson et cette cérémonie (Reuze lied[6] ou air du Reuze) se rattachent à des souvenirs scandinaves parce que dans les Eddas il est souvent question de guerres entre les Reuzes et les Azes; ces Reuzes auraient été les Finnois». Dès lors, les géants seraient la représentation d'une population venue de Scandinavie et installée en Flandre maritime. Cette thèse ne peut être soutenue sérieusement vu qu'aucune donnée archéologique ou historique ne vient la confirmer. Elle ne pourrait avoir quelque vraisemblance que pour les régions de langue flamande à cause du rapprochement étymologique. Toutefois, l'origine scandinave et germanique a connu une nouvelle jeunesse au XXe siècle avec les thèses d'Oscar Almgren[7]. Cet érudit considère que les personnages de taille élevée, au phallus proéminent, dessinés sur les gravures rupestres découvertes en Suède sont les ancêtres des géants processionnels. Ces documents sont datés de l'âge du bronze, c'est-à-dire du IIe millénaire av. J.-C. Cette thèse se fonde sur des documents archéologiques. Mais les liens avec les géants d'osier du XVe siècle sont assez lointains. Les relais historiques manquent entre le IIe millénaire et le Moyen Âge finissant.
Les géants sont l'image ridicule des vaincus des luttes flamandes du XIIe siècle. C'est Léon Moreel, de Dunkerque, qui écrit[8] : « Dunkerque était peuplée de marins jaloux de leur indépendance ; la célèbre chanson des Kerles rappelle les luttes qui les opposèrent à la noblesse dès 1136; les géants ou Reuzes qu'ils promènent encore aux jours de liesse évoqueraient même, non pas les hommes de grande taille rencontrés par Jules César en Ménapie, mais les guerriers orgueilleux vaincus par les révoltes du peuple avant d'en être la risée. »
Les géants sont les images de nos ancêtres qui étaient plus grands que nous. Il est inutile d'insister sur le fait que cette affirmation est purement gratuite et n'a jamais pu avoir qu'une valeur légendaire ou mythologique[9].
La thèse du chercheur espagnol J.M. Gomez-Tabanera[10] fait du géant la survivance d'un rituel qui se serait diffusé parallèlement aux courants mégalithiques. On constatera que les régions qui ont largement connu les grandes pierres levées ne sont pas spécialement celles où l'on recense le plus de géants. Il suffit de penser au nord de la France (terre à géants, peu de mégalithes) ou à la Bretagne (riche en mégalithes, pauvre en géants).
Les géants seraient une survivance des coutumes religieuses des druides. Les sacrifices humains étaient fréquents vers 100-200 av. J.-C. dans nos régions. Les victimes, dit-on, étaient conduites sur le lieu du supplice dans d'énormes cages d'osier ayant parfois des formes étranges et même des formes humaines. César[11] rapporte : « Tout le peuple gaulois est très religieux. Aussi, voit-on ceux qui sont atteints de maladies graves, ceux qui risquent leur vie dans les combats ou autrement, immoler ou faire vœu d'immoler des victimes humaines et se servir pour ces sacrifices des druides… certaines peuplades ont des mannequins de proportions colossales, faits d'osier tressé, qu'on remplit d'hommes vivants : on y met le feu et les hommes sont la proie des flammes». Faut-il voir dans ces mannequins l'origine des géants, comme l'ont proposé plusieurs érudits[12],[13] ? Le rapprochement semble audacieux. Les seuls points communs tiennent au matériau et au volume. Le rite est tout à fait différent. On voit mal le passage de ce grand panier sacrificiel à nos mannequins portés et soigneusement entretenus. Le rapport est loin d'être évident. Il faudrait pouvoir montrer comment on passe de l'un à l'autre avec les transformations religieuses et culturelles qui se sont produites en une quinzaine de siècles. Cette démonstration n'a jamais été faite.
Klaus Beitl[1], le grand spécialiste autrichien de l'étude des géants voit dans ceux-ci les continuateurs d'un créateur du monde qui assure la survie de son œuvre. Il retrouve à la fois chez les Égyptiens, les Hittites et les Grecs, le géant qui supporte la voûte céleste. Le personnage gigantesque de nos processions serait la figuration ludique de ce héros mythologique, créateur du monde. La thèse de Klaus Beitl s'appuie sur un inventaire précis des données historiques et préhistoriques relatives aux géants. Elles ne peut rester qu'une hypothèse séduisante mais largement discutée, faute de documents historiques assurant le relais de la fin de l'Antiquité au bas Moyen Âge.
Historique
La première mention[14] probable de géants processionnels est portugaise : dans la ville d'Alenquer, au XIIIe siècle. À la fin du XIVe siècle, les premières figurations gigantesques sont attestées à Anvers (1398). Peut-être le phénomène a-t-il été importé par les nombreux marchands portugais résidant en Europe du Nord à cette époque.
Au XVe siècle, dans les Pays-Bas, le phénomène s'affirme : douze Goliath marchent dans les processions au côté de six Saint Christophe (pas toujours sur échasses), d'un Hercule et d'un Samson. Saint Georges combat le dragon (pas toujours gigantesque) au moins dans douze villes tandis que le Cheval Bayard est chevauché par les quatre fils Aymon dans dix villes.
Dès cette époque, des géants identiques animent les processions espagnoles : le Saint Christophe et le Goliath de Barcelone sont les premiers attestés dès 1424. En Angleterre, Samson est présent à Leicester en 1461. Goliath contribue aux cérémonies qui célèbrent l'entrée de Philippe le Bon à Dijon (1454) et celle de Charles VIII à Troyes (1486). Seul, le groupe du Cheval Bayard reste strictement limité aux Pays-Bas.
La majeure partie de ces figurations sont religieuses. Les récits bibliques du combat de David et de Goliath ou des hauts faits de Samson voisinent avec l'histoire du héros qui porte le Christ (Saint Christophe) ou avec l'affrontement de Saint Georges avec le dragon rapportés par la Légende dorée. Hercule issu de la mythologie grecque et l'histoire du Grand Bayard constituent les seuls éléments tout à fait profanes.
Ces « histoires» s'intègrent, en effet, habituellement dans une procession religieuse. Les groupes figuratifs se multiplient au XVe siècle et illustrent des scènes rapportées par l'Ancien (l'histoire de Daniel) et le Nouveau Testament (la Nativité, l'Annonciation) ou par la Légende dorée (Saint Michel et le diable). Comme on le voit, ces représentations ne mettent pas toujours en scène des géants ou des monstres. Ceux-ci n'apparaissent que lorsqu'ils ont cette taille exceptionnelle dans le récit religieux qui a inspiré les organisateurs. Saint Christophe a été représenté par un homme de taille élevée avant d'utiliser les échasses au milieu du XVe siècle. C'est à la même époque que les mannequins d'osier apparaissent (Goliath à Bergen-op-Zoom en 1447).
D'une part, les géants participent à l'édification religieuse d'un peuple illettré en illustrant des épisodes de la Bible et de la vie des saints. D'autre part, ils servent d'attractions lors des « ducasses » ou autre fêtes patronales mais également lors des processions de la Fête-Dieu (Corpus Christi) et des Rogations.
Dans certaines régions d'Europe, la Contre-Réforme et l'époque baroque renforcent le phénomène. Petit à petit cependant, l'Église va combattre ces éléments qui disparaîtront des processions au profit de cortèges laïcs (Carnaval).
La Révolution française considère les géants comme des symboles de la superstition et de l’intolérance. Les processions sont supprimées et les géants d'Ath, par exemple, sont brûlés par les Révolutionnaires le jeudi 28 août 1794.
Dans les Pays-Bas, en 1819, le gouvernement hollandais interdit les éléments profanes. Il fallait choisir. Bien souvent, les gens, très attachés à leurs géants, emblèmes de leur cité, les gardèrent dans un cortège laïc ou les séparèrent de leurs processions religieuses.
Les Grosses Têtes (Catalogne, Galice et Portugal, Autriche)
Samson (Ath, Autriche) est accompagné d'une compagnie de soldats qui tirent des salves à intervalles réguliers. À Mons ce sont des pompiers qui remplissent ce rôle lors du Combat dit "Lumeçon"
Élément essentiel de la fête : la musique (fanfares, fifres et tambours, bandera catalane, etc.).
Matériaux et systèmes de portage
Matériaux
Dans beaucoup de régions, on privilégie les matériaux dits « nobles » : le bois, l'osier, le cuir… au détriment du poids. C'est le cas des géants d'Ath par exemple. Les têtes des géants d'Ath, d'une facture classique, sont sculptées dans le bois de tilleul.
Cependant, il n'est pas rare de voir des structures métalliques légères, en aluminium ou matériaux composites. Le dragon de Mons s'est vu affubler d'une queue en fibre de carbone.
Pour la tête, on peut avoir recours au "papier mâché" ou au plastique.
Préparation des géants d'Ath avant la Ducasse
Intérieur d'un géant, région d'Ath
Géants « sommaires » sur roulettes et tête en papier mâché, Nimy
Rafael Esteve et Basile Pachkoff : schéma technique pour construire un géant[15].
Systèmes de portage
Les géants sur char sont relativement rares : Eecke avec Jules Boomzaeger le scieur de long, Gargantua le géant du Carnaval de Bailleul créé en 1853 mesurant 12 mètres, il fallait 16 hommes pour le porter. En 1892, les 16 porteurs font grève pendant le cortège, estimant leur salaire insuffisant et réclamant une augmentation... qu'ils obtiennent. L'année suivante, on le vit tracté par des chevaux.
Les géants sur roulettes : si les géants ne sont jamais sur roulette en Espagne, ils sont plus fréquents en Belgique et en France :
Les géants portés, par un ou plusieurs hommes, sont les plus traditionnels. Ils sont les seuls à danser comme les géants du canton de Steenvoorde où avait lieu tous les six ans la "ronde européenne de géants portés"[16].
Les systèmes de portage sont plus ou moins sophistiqués. Dans la région d'Ath, le système de portage consiste en deux sangles de cuir, mais surtout d'un coussin de tête qui maintient l'équilibre et rend les mouvements du géant plus souples et gracieux.
Il existe d'autres systèmes de portage que les sangles, on peut retenir notamment les mousses (deux barres parallèles à l'intérieur du géant qui sont recouvertes de mousses) on retrouve cette pratique dans le nord de la France mais aussi dans certaines régions de Belgique.
En Espagne par exemple, les paniers des géants sont en bois et possèdent des coussins (1 pour la tête et deux pour les épaules) dirèctement fixé sur le panier lors de la fabrication du géant.
On trouve des géants dans une région relativement réduite : dans le Lungau (Land de Salzbourg et en Styrie), autour des communes de Murau et Krakaudorf.
Il s'agit essentiellement de Samsons, accompagnés de nains à grosse tête et d'une garde civique. Ils apparaissent au XVIIe siècle, dans le cadre de la Contre-Réforme et à l'époque baroque dans les processions de la Fête-Dieu et de l'Assomption.
On y dénombre plus de 1700 figures de géants, seulement en Flandre. En Belgique totale on estime plus de 2500 géants. Les plus anciens remontent au XVe siècle. On en crée chaque année de nouveaux qui défilent et dansent lors des ducasses, kermesses et carnavals.
Les géants du Burkina Faso ne sont pas à proprement parler portés. Il s'agit plus de grandes marionnettes articulées. Accompagnés de tambours traditionnels, ils racontent une histoire.
À Boromo, Poko et Soumalia (créés en partenariat avec le Ghana et le Mali) représentent le père et la fille d'une famille africaine. La fille s'est enfuie de la maison pour l'amour d'un blanc et le père la recherche pour trouver une solution.
Les géants de Québec sont de création récente. Ils sont uniques en Amérique du Nord. Les premiers ont vu le jour en 2002. Ils sont fabriqués dans les ateliers des Fêtes de la Nouvelle-France. En 2007, ils sont treize mais la famille pourrait s'agrandir pour le 400e anniversaire de la fondation de la ville de Québec pour lequel un grand rassemblement de géants du monde entier est programmé en 2008.
Les géants de Québec
Belle Gueule : Le géant «Belle Gueule» s’est joint à l’événement des Fêtes de la Nouvelle-France en 2006. Le nouvel arrivant apparaît sous les traits d’un moine particulièrement sympathique dont l’occupation est celle d’un brasseur de bières et dont la gestuelle indique tout le soin qu’il prodigue à son art.
Champlain : Le géant Champlain est le plus grand des géants de Québec. Il fait 6 mètres et nécessite deux porteurs. Avant tout, Champlain est un cartographe et toute sa vie est animée par le désir de trouver une voie navigable pour traverser le continent d’un océan à l’autre. Sa jupe s’inspire d’une des nombreuses cartes réalisées par Champlain, les illustrations et les écritures ont été reproduites avec soin et le fleuve qui remonte le cours de sa jupe, telle une ligne du temps, souligne certains évènements marquants pour la ville de Québec. Enfin, le géant Champlain souligne l'imposant rôle de ce personnage historique dans la mémoire collective.
Capitaine Vaillant : Le capitaine Vaillant représente le père des explorateurs de la Nouvelle-France et personnifie l’esprit de découverte. Sa tête est formée d’un globe terrestre sur lequel flotte un bateau ; il tient à la main une longue vue. Sa robe est formée d’une multitude de feuilles de parchemin aux sujets divers, rappelant les carnets de voyage des explorateurs, dont les croquis et annotations permettaient de transmettre et de conserver nombre d’observations sur la faune et la flore du Nouveau Monde.
Émeline et Louis : « Émeline et Louis », qui forment un couple, sont les premiers géants sortis des ateliers des Fêtes de la Nouvelle-France SAQ. Ils ont été créés dans le cadre d’un partenariat avec la Louisiane et sont inspirés de deux personnages issus de la légende acadienne, Évangéline et Gabriel, dont l’histoire nous est transmise par le poète Henry Longfellow (Evangeline, 1847). Ils symbolisent le couple uni par un amour éternel mais impossible (ils sont séparés pendant la déportation des Acadiens de Grand-Pré en 1755) ; amour qui perdure après la mort, intact. Au-delà du couple qu’ils forment, chacun des deux géants revêt une symbolique intrinsèque. Émeline, avec son ouvrage de broderie à la main, personnifie l’attente, la patience, la foi en l’être aimé, mais aussi la fidélité, la candeur, la pureté de la virginité.
Grand cru : Le géant « Grand cru » a acquis sagesse et maturité, il est le fin connaisseur et le conseiller par excellence de la SAQ (Société des alcools du Québec). Il est sensible, compétent et teinté d’humour… L’équilibre nécessaire dans la composition d’un Grand cru. Son corps est léger, sa robe est composée de végétaux qui rappellent la variété des produits offerts par la SAQ. Sa texture est de fibres naturelles alliant souplesse et rigidité. Il marie agréablement les arômes d’épices, de fruits et de végétaux sur fond boisé. Son parfum éveille des souvenirs d’enfance et nous invite à entrer dans la danse et à le suivre pour le défilé. Ses couleurs respectent les teintes naturelles, du jaune or aux accents verdâtres, il passe au rubis violacé en conservant intensité et harmonie.
Le Grand Esprit des Nations : « Le Grand Esprit des Nations » est une représentation des cultures amérindiennes auxquelles il rend hommage en tant que Premières Nations, c’est-à-dire en tant qu’habitants d’origine. Il est incarné par une femme afin de souligner la prédominance du matriarcat chez ces peuples. L’habillement du Grand Esprit des Nations réfère à plusieurs symboliques, chères aux cultures amérindiennes : les cercles, les quatre éléments (eau, terre, air et feu), les notions de vie et de mort (marquées à la fois par la présence des esprits et des objets ayant appartenu au défunt tels ses armes, son tabac, etc.).
Louis Ango de Maizerets: Ce géant a été conçu et créé à l’image de Louis Ango de Maizerets. Il était supérieur du Séminaire de Québec lorsque cette institution d’enseignement achète une partie des concessions de la seigneurie Notre-Dame-des-Anges, en 1705. Du haut de ses cinq mètres, il est un personnage marquant de l’histoire du domaine de Maizerets. Alliant créativité et matériaux modernes, sa conception est à l’avant-garde des techniques traditionnellement utilisées dans la fabrication de tels personnages. Toutefois, l’esprit dans lequel il a été conçu respecte en tout point la tradition européenne, une tradition de convivialité et d’appartenance au milieu. De plus, avec ses bras qui sont mobiles, son interaction se veut très vivante.
Marie Victoire : « Marie-Victoire » incarne toutes les femmes de Nouvelle-France, la grand-mère, la mère, la femme, la fille, qui ont contribué au développement démographique de ce nouveau territoire. Si sa symbolique fait référence à la fois au passé et au présent, l’enfant qu’elle tient dans ses bras nous oriente vers une vision d’avenir : celui de la colonie en évolution vers la prospérité.
Monique Purelaine : « Monique Purelaine », géante de l’arrondissement Limoilou, symbolise son histoire et sa culture : une jeune mère de famille dans la trentaine représentant les générations de travailleurs de la classe ouvrière qui sont venus s’installer dans ce quartier au début du siècle. Cette géante enceinte porte en elle l’avenir du quartier. Elle est représentée sous la forme d’une femme au foyer pour souligner son rôle, son importance ainsi que toutes les responsabilités des femmes, épouses d’ouvriers, ceux par qui tout a commencé. Monique Purelaine, symbolise également l’aspect culturel de Limoilou par son tablier inspiré du travail et des couleurs de l‘artiste Alfred Pellan. Cette pièce de vêtement est composée telle une mosaïque de plusieurs symboles historiques représentant les différentes facettes de ce quartier riche par sa diversité.
M. du Talion : « Monsieur du Talion » est une allégorie du système judiciaire tel qu’il était appliqué en Nouvelle-France et une référence directe à la fameuse Loi du Talion : il symbolise le bourreau, ce personnage devant lequel, trop fréquemment, de nombreuses affaires criminelles se réglaient. À cette époque, la justice utilise encore la question et la torture, et considère que l’on est coupable tant que notre innocence n’est pas prouvée. Produisant ainsi un bon nombre de coupables à punir, les bourreaux, recrutés parmi les condamnés à mort, représentaient finalement le bras de la justice exemplaire. C’est à ces bourreaux forcés et contraints que Monsieur du Talion, affublé de nombreux outils de torture, rend hommage ; le haut de son corps, taillé dans le roc, marquant le caractère inébranlable de la tâche qu’il se doit d’accomplir.
Nicolas, dit Noble Cœur : Le géant « Nicolas dit Noble Cœur » honore les soldats du régiment de Carignan-Salières, premier régiment arrivé en Nouvelle-France et dont la plupart des soldats sont restés, devenant pour beaucoup les premiers seigneurs propriétaires des seigneuries du Nouveau Monde. Sur le plan du symbolisme, on pourrait considérer que Nicolas dit Noble Cœur et Marie-Victoire sont le père et la mère de la colonie. Le géant, très représentatif du soldat de l’époque, arbore un uniforme dont la partie inférieure présente une carte de France qui met en évidence les villes d’origine des soldats de ce régiment. Nicolas dit Noble Cœur éclaire à la fois les liens patronymiques entre la France et la Nouvelle-France, et généalogiques, puisque bon nombre d’enfants nés en Nouvelle-France sont de descendance de soldats du régiment de Carignan-Salières.
Pomone: Nymphe étrusque adoptée par les Romains, elle est chargée de veiller sur les fleurs, les fruits et les arbres. Selon Ovide, l'un des poètes latins les plus célèbres, elle fut l’épouse du dieu Vertumne qui possédait le don de changer de forme (vertere : transformer), avec lequel elle eut le privilège de vieillir et de rajeunir sans cesse à l’image du cycle des saisons et de la maturation des plantes et des fruits. Telle une nymphe, la géante Pomone représente la jeunesse, la fraîcheur et la santé. Sa jupe rappelle la nature, la terre, les fruits et les vergers. C’est aussi une évocation des montagnes de Rougemont. Son corps, transparent et plein de jus de fruits, repose sur une corne d’abondance, symbole de profusion et de prodigalité, et évoque ainsi la transformation. Elle tient dans sa main droite des fleurs, image de la reproduction et de la fructification, et dans sa main gauche le soleil indispensable à la véraison. Dans l’antiquité, cette divinité romaine abhorrait la nature sauvage et lui préférait les jardins et les vergers soigneusement entretenus : La nature apprivoisée. Créée pour les entreprises Lassonde inc., leader canadien dans le développement, la fabrication et la commercialisation d'une gamme innovatrice et distinctive de jus et boissons de fruits, la géante Pomone s’inscrit parfaitement dans la grande famille des géants et porte fièrement les emblèmes d’une entreprise riche de l’histoire du Québec.
L'Espagne, et principalement la Catalogne, est un pays de géants. Les géants de Catalogne émanent de la culture populaire de chaque village de l'autonomie espagnole. Présents à Barcelone dans chaque quartier, chaque agglomération ancienne de Catalogne a ses géants, qui ont une identité associée à la légende locale.
Barcelone ne compte pas moins de quarante géants...
Par adaptation aux idées des différentes époques, ils sont devenus de plus en plus profanes. Aujourd'hui les géants paradent lors des carnavals, ducasses et autres fêtes.
"Bertilak": Décapité, sa tête à la main, ce géant tout vert est accompagné par "Morgane la Fée" qui est belle, forte et enceinte.
Sheffield
War and Peace : ces géants ont été créés en 1992 par le Catalan Jordi Grau Marti. Ils pèsent 57 kg et mesurent 4,30 m. Selon la tradition espagnole, ils sont portés par un seul homme.
En Irlande, les géants relèvent plus de la tradition du théâtre de rue que d'une véritable tradition ancienne. Depuis quelque temps, ils prennent part aux cortèges de la Saint-Patrick, ce qui les fait entrer, d'une certaine façon, dans la grande famille des géants de procession.
Ils sont articulés pour une plus grande interaction avec le public qui appelle d'ailleurs plus volontiers "Giant Puppets".
À Wexford, on peut rencontrer "Mother and Baby" et "Squire", personnages très caricaturaux représentatifs de la "Verte Erin". Ils mesurent environ 4 mètres.
↑ a et bKlaus Beitl, Die Umangsriesen, volkskundliche Monographie einer europaïschen Maskengestalt, mit besonderer Berücksichtigung der « Fête de Gayant» zu Douai in Nord Frankreich, Vienne, 1961
↑Reuzes de Flandre et gigantes d'Espagne, in Bulletin de l'union Faulconllier de Dunkerque
↑H. Dontenville, La Mythologie française (1948) et Les Dits et Récits de la mythologie française (1950), dans le Bulletin de la Société de mythologie française.
↑Edmond de Coussemaker, Chants populaires des Flamands de France recueillis et publiés avec les mélodies originales, une traduction française et des notes, Gand, Gyselynck, 1856. Cité par Arnold Van Gennep, Le folklore de la Flandre et du Hainaut français (département du Nord), Paris, G.P. Maisonneuve, 1935
↑Voir le document Reuzelied, disponible sur Wikisource.
↑Dr. Oscar Almgren, Nordische Felszichnungen als religiöse Urkunden, Frankfurt, Main, 1934
↑Léon Moreel, Dunkerque, violence de la Flandre, Ed. J. Demeyère (1953)
↑Cette thèse est citée par Claude Malbranke, Notes sur l'origine des géants processionnels, dans Gayant et les géants du Nord de la France et de Belgique, Douai, 1955
↑J.M. Gomez-Tabanera, Fiestas populares y festejos tradicionales, dans El Folklore espagnol, Madrid, 1968
↑César, La Guerre des Gaules, traduction L.A. Constans, Paris, Les Belles Lettres, 1950
↑Cet historique s'appuie sur Les Géants processionnels en Europe, ouvrage collectif, catalogue de l'exposition du 500e anniversaire du Goliath d'Ath, 1981, ministère de la Communauté française
Collectif, Les géants processionnels en Europe, catalogue de l'exposition du 500e anniversaire du Goliath d'Ath, 1981, ministère de la Communauté française.
Jean-Pierre Ducastelle et Jean Fraikin (dir.), Géants, dragons et animaux fantastiques en Europe, Bruxelles, Tradition wallonne, 2003, 545 p., présentation en ligne.
Jean-Pierre Ducastelle, Marie-France Gheusquin, Yvonne de Sike (et al.), Géants et dragons : mythes et traditions à Bruxelles, en Wallonie, dans le Nord de la France et en Europe, Paris, Casterman, coll. « Les beaux livres du patrimoine », 1996, 155 p., (ISBN2-203-62005-6).
René Meurant, Géants processionnels et de cortège en Europe, en Belgique, en Wallonie, Bruxelles, Commission royale belge de folklore (section wallonne), Collection folklore et Art populaire, VI, 1979.
René Meurant, « Contribution à l'étude des géants processionnels et de cortège dans le nord de la France, la Belgique et les Pays-Bas », Arts et traditions populaires, no 2, avril-juin 1967, Paris, Presses Universitaires de France, p. 119-160, lire en ligne.
René Meurant, Géants de Wallonie, Gembloux, Duculot, Wallonie et Histoire, 1975.
Quatrième Ronde européenne de géants portés, ouvrage qui présente en images les géants ayant participé à la fête du même nom avec une introduction sur les géants portés et un court texte de présentation pour chaque géant illustré. Édité par les Amis de Fromulus, Steenvoorde, 2006.
Cinquième Ronde européenne de géants portés, ouvrage qui présente en images les géants ayant participé à la fête du même nom avec une introduction sur les géants portés et un court texte de présentation pour chaque groupe illustré. Édité par les Amis de Fromulus, Steenvoorde, 2012.