Cependant, la jeune Élisabeth-Christine qui n'avait pas 15 ans, attachée à son protestantisme originel, refusa d'abord ce mariage qui lui imposait de se convertir au catholicisme et menaça même de se suicider. Elle finit par l'accepter et se convertit le à Bamberg.
En avril 1708, le cortège nuptial se mit en route. Après un détour par Vienne où la jeune princesse fut présentée au couple impérial, à l'impératrice-mère et à la cour qu'elle conquit par son charme et sa beauté, la princesse embarqua à Gênes et, sous la protection de la marine Anglaise, vogua jusqu'à Barcelone qu'elle atteignit fin juillet. Les noces furent célébrées le peu avant le 17ème anniversaire de la nouvelle "reine d'Espagne".
Le roi, qui avait 23 ans, repartit immédiatement combattre son rival, à peine plus âgé que lui. Il confia la régence de ses royaumes à sa jeune épouse. Son rival avait fait de même. Tandis que leurs jeunes souverains se combattaient, l'Espagne était gouvernée par deux jeunes mariées de 17 et 20 ans. En 1711, l'empereur Joseph Ier du Saint-Empire, frère aîné de Charles III, succomba à une épidémie de variole (qui emporta également le Dauphin, fils aîné et héritier du roi Louis XIV de France et trois enfants du duc Léopold Ier de Lorraine). Ne laissant que deux filles (de plus mineures) qui ne pouvaient être élues à la dignité impériale, la couronne impériale fut confiée à Charles, roi d'Espagne sous le nom de Charles III et maintenant empereur sous le nom de Charles VI. L'Europe s'inquiéta. De nouveau, la Maison de Habsbourg dominait un empire sur lequel le soleil ne se couchait jamais. L'alliance de l'Angleterre devenant moins sûre, Charles VI renonça à l'Espagne et négocia une paix de compromis. Le couple impérial et royal quitta Barcelone pour Vienne. La paix fut signée la même année.
Ayant signé la paix, l'empereur était confronté à un autre problème dynastique. Son mariage était stérile. Faute de descendant mâle, l'empereur promulgua la Pragmatique Sanction qui définissait les règles successorales du patrimoine de sa maison. À savoir, à défaut de successeur mâle, ses filles auraient la priorité sur celles de son défunt frère. Plus tard, il maria d'ailleurs très avantageusement ses deux nièces aux deux princes catholiques les plus importants de l'Empire : l'aînée, Marie-Josèphe, à Auguste III, électeur de Saxe et roi de Pologne, et la cadette, Marie-Amélie, à l'Électeur de Bavière, futur Charles VII oubliant peut-être que ses neveux par alliance pourraient un jour convoiter la couronne impériale et les terres patrimoniales de leur belle-famille.
Trois ans plus tard, l'impératrice donna le jour à un fils, mais le nourrisson ne survécut pas. Le couple impérial eut en tout quatre enfants dont deux parvinrent à l'âge adulte, Marie-Thérèse en 1717 et Marie-Anne en 1718.
Le prince Lorrain
En 1723 arriva à la cour le jeune prince François-Etienne de Lorraine : l'héritier du duché de Lorraine et de Bar venait terminer sa formation à la cour de Vienne où la famille ducale de Lorraine avait vécu en exil après l'invasion de ses duchés par la France de 1633 à 1697. Le duc Léopold Ier de Lorraine, père du prince mais aussi neveu et filleul de l'empereur Léopold Ier y était né et y avait été élevé en compagnie de ses cousins germains les futurs empereurs Joseph Ier et Charles VI.
La grand-mère paternelle du jeune prince était d'ailleurs une archiduchesse d'Autriche. Le jeune prince se retrouvait en famille et d'aucuns pensaient déjà — à Lunéville comme à Vienne — à une union entre l'adolescent et l'archiduchesse Marie-Thérèse, fille aînée de l'Empereur, ce qui advint à la fin de la guerre de Succession de Pologne en 1736 pour le plus grand bonheur de l'archiduchesse : chose assez exceptionnelle pour une princesse de l'époque et en milieu curial, ce mariage dynastique était aussi un mariage d'amour. Quatre ans plus tard, après une guerre désastreuse contre les Turcs, l'empereur mourut et Marie-Thérèse se retrouvait seule face à des responsabilités pour lesquelles elle n'avait pas été formée. À peine âgée de 23 ans et sans expérience politique et enceinte de six mois, elle n'avait elle-même que trois filles.
Sa mère lui apporta tout son soutien. Elle avait transmis à sa fille non seulement sa beauté mais aussi une mâle énergie et le courage qui anima la jeune femme pendant la difficile guerre de Succession d'Autriche qui embrasa l'Europe peu après l'avènement de Marie-Thérèse, les alliés de la veille devenant les ennemis du jour.
Une grande héritière
Peu après le début de la guerre, en , était né l'héritier tant attendu. Il fut convenu entre Marie-Thérèse et Élisabeth-Christine que le nourrisson recevrait en action de Grâce le prénom du père nourricier du Christ, Joseph. La jeune impératrice mit ainsi au monde un enfant presque chaque année et ce, même après la paix qui lui conserva ses états (1748). La dynastie était sauvée.
En 1744, l'archiduchesse Marie-Anne épousa le prince Charles-Alexandre de Lorraine, frère de François. Le jeune couple, à qui avait été confié la régence des Pays-Bas autrichiens, partit pour Bruxelles. L'impératrice-mère apprit bientôt la grossesse de sa seconde fille. La jeune régente mourut en couches peu avant Noël. L'impératrice et sa mère furent profondément affectée par cette épreuve. La santé de l'impératrice-mère en fut durablement affectée.
Son gendre fut finalement élu empereur en 1745 mais c'était Marie-Thérèse qui tenait les rênes du pouvoir. En revanche, économiste averti, l'Empereur, par des placements judicieux, fit la fortune des Habsbourg récemment reconvertis en Habsbourg-Lorraine. En 1748, la paix fut signée. Hormis la Silésie qui restait à la Prusse, Marie-Thérèse avait sauvé le patrimoine et le prestige de sa Maison. Mère de sept enfants vivants dont trois fils, elle avait assuré l'avenir de sa dynastie.
L'impératrice Élisabeth-Christine mourut à Vienne le , et fut inhumée dans la crypte des Capucins, où reposent traditionnellement les dépouilles des membres de la Maison Impériale.