En 1938, il est chargé de tourner une série de documentaires sur la guerre sino-japonaise. Il réalise ainsi deux films sur des territoires occupés, Shanghai et Pékin. La même année, il est envoyé avec le cameraman Shigeru Miki(ja) sur le front chinois pour tourner un autre documentaire, Les Soldats au combat[5]. Il suit pendant quatre mois un régiment d'infanterie pendant l'offensive sur la ville de Wuhan[1],[6], mais au lieu de filmer le courage et l’héroïsme des soldats japonais, il montre des hommes éprouvés et fatigués de parcourir les immensités de la Chine, une population locale en fuite, chassée par la guerre, des paysans qui reviennent cultiver leurs terres sitôt que l'Armée Impériale a quitté le territoire[5]. Le documentaire est achevé en 1939 mais ne sera jamais projeté du fait de la censure et le négatif sera détruit[7]. Longtemps considéré comme perdu, une copie du film est retrouvée en 1976[6],[8]. En , Fumio Kamei est arrêté puis emprisonné avant d'être libéré en août 1942 sous conditions. Il est le premier cinéaste de cette période à avoir subi de l'emprisonnement[5].
Après la guerre, Fumio Kamei a de nouveau maille à partir avec la censure puisque son film La Tragédie du Japon (1946) est interdit par l'occupant américain cette fois. Le documentaire est un montage d'actualités accompagné d'un commentaire orienté d'un point de vue marxiste qui retrace les événements à partir de l'invasion japonaise de la Chine jusqu'à la fin de la guerre du Pacifique en mettant clairement en avant la responsabilité de l'empereur pendant la guerre[9],[3]. L'année suivante, La Guerre et la Paix, film co-réalisé avec Satsuo Yamamoto se voit censuré et amputé d'une demi-heure avant d'être présenté au public[10]. Ce film est une réflexion sur les sacrifices consentis par la population après la guerre au travers la vie de deux soldats rapatriés et de leurs femmes[11].
En 1948, Fumio Kamei fait partie des militants syndicaux qui quittent la Tōhō à la suite des grèves d'avril à octobre qui agitent la société de production au même titre que Heinosuke Gosho, Tadashi Imai, Satsuo Yamamoto et Hideo Sekigawa[12],[11]. Dans les années cinquante, il tourne des films de fiction engagés avec Isuzu Yamada comme actrice principale tels que Si elle est mère, si elle est femme en 1952 et Une femme marche seule sur la terre en 1953 qui dénonce les conditions de travail dans les mines au Japon[13],[14].
À la suite de l'échec commercial de ce dernier film, Fumio Kamei revient au documentaire. Il réalise une série de trois films sur la lutte contre l'agrandissement de la base aérienne américaine de Tachikawa près du village de Sunagawa, Sunagawa no hitobito: Kichi hantai tōsō no kiroku (1955),Sunagawa no hitobito: Mugi shinazu (1955) et Ryūketsu no kiroku: Sunagawa (1956). Cette trilogie préfigure le travail de Shinsuke Ogawa sur la série Sanrizuka qui relate de l'intérieur la lutte contre la construction de l'aéroport de Narita[15]. Avec Nous sommes tous vivants (1956) et Le monde qui craignait les retombées du nucléaire (1957), Fumio Kamei s'attache à dénoncer la prolifération nucléaire[15] et montre les séquelles des bombardements atomiques d'Hiroshima et de Nagasaki, en filmant la vie quotidienne des victimes dix ans après la tragédie[16].
En 1960, il réalise Ningen mina kyōdai: Buraku sabetsu no kiroku un documentaire sur le très sensible sujet de la discrimination envers la population burakumin[1]. Par la suite, Fumio Kamei prend du recul vis-à-vis du monde du cinéma, ne tournant que quelques films de relations publiques. Il ouvre un magasin d'antiquités nommé Toyojin à Shibuya[17].
Dans les années 1980, il revient au documentaire engagé avec deux films abordant des thèmes environnementaux[17]. Fumio Kamei meurt le dans l'arrondissement d'Itabashi à Tokyo[1]. Il a réalisé une vingtaine de films entre 1938 et 1987[18].
↑ a et b(en) Alexander Jacoby, A Critical Handbook of Japanese Film Directors : From the Silent Era to the Present Day, Berkeley, Calif., Stone Bridge Press, , 398 p. (ISBN978-1-933330-53-2), p. 101
↑Nous sommes tous vivants : titre français du documentaire lors de sa diffusion à la Maison de la culture du Japon à Paris le dans le cadre de la rétrospective « cinéma du réel ».