Fils de Louis VI du Palatinat et d’Élisabeth de Hesse (1539-1582), une des filles du landgrave de HessePhilippe le Magnifique, Frédéric IV est issu de la dynastie des Wittelsbach. Il n'avait que neuf ans lorsqu'il fut couronné en 1583, ce qui porta à la régence son oncle, le prince de confession réforméeJean-Casimir († 1592). Frédéric IV s'opposa certainement d'emblée au choix de son oncle comme tuteur, car lui–même avait été élevé dans la foi luthérienne, et la pression du parti calviniste finit par reléguer au second rang les volontés de l'héritier au trône comtal. Ce parti calviniste était d'ailleurs largement représenté par des nobles du ban de Vettéravie.
À la mort de Jean-Casimir, le plus proche parent du prince héritier, le duc Richard de Palatinat-Simmern (1521-1598), de confession luthérienne, accourut à Heidelberg depuis son château de Simmern, et procéda sans ambages au renvoi des anciens conseillers pour y placer ses hommes. Bien qu'en effet le jeune Frédéric eût été près à ce moment d'avoir 18 ans, le régime de succession paraissait clair : le prince devait avoir 18 ans échus ; seulement les chambres de la principauté s'opposaient à la mainmise du comte Richard sur le comté : elles tentèrent de contourner la loi, en arguant que le prince n'aurait désormais pas plus de maturité dans quelques mois. Il s'ensuivit pourtant un procès car :
mais selon deux décrets de l’empereur Sigismond, datés de 1414 et 1434, il existait la possibilité de proroger la régence jusqu'à 25 ans dans certains cas.
L'origine de cette double possibilité remontait à la transition du droit romain au jus commune, qui s'était traduite par le report de l'âge de la majorité, de 18 à 25 ans. Il se posait en fait la question de savoir lequel des deux codes de loi était ici pertinent, et s'ils s'appliquaient à toutes les principautés du Saint-Empire ou seulement à l'électeur palatin. Telle est l'origine de la contestation de la tutelle du Palatinat, connue en Allemagne comme la Kurpfälzischer Administrationsstreit.
Mais la principale raison de ce conflit de succession était confessionnelle : il y allait du retour complet de la principauté à l’orthodoxie luthérienne, ou du maintien d'un statu quo laissant aux calvinistes leur liberté. Ce point était d'importance, car selon la doctrine établie désormais dans le Saint Empire du cujus regio, ejus religio, les sujets devaient adopter la religion de leur prince.
De son côté, l'empereur chercha à rester neutre ; si dans un premier temps il avait bien reconnu au jeune Frédéric le droit de former un gouvernement, il ne l'invita à venir prêter serment à l'Empire que deux ans plus tard (1594), alors que la situation était réglée. Ni les autres grands électeurs, trop divisés, ni les cours protestantes étrangères, notamment celle d'Élisabeth d'Angleterre, ne contribuèrent à la résolution du conflit. Quant aux anciens corégents de Jean-Casimir : le duc Louis de Wurtemberg († 1593), le margrave Georges-Frédéric de Brandebourg-Ansbach et le landgrave Louis IV de Hesse-Marbourg, tous de confession luthérienne, ils ne prirent que des initiatives modestes (seul le premier soutenant le duc Richard).
C'est finalement la situation économique précaire du duc Richard de Simmern et son âge avancé, compliqué d'une nouvelle maladie (sans doute un accident vasculaire : il ne pouvait plus parler et se déplaçait avec difficulté), qui suscitèrent l'apaisement. Contre la prise en charge de ses dettes par la principauté, il renonça à exercer la régence. Non seulement il avait échoué à maintenir le Palatinat dans la foi luthérienne, mais son duché de Simmern dut se convertir au calvinisme.
Le règne
Grand amateur de musique, l’électeur Frédéric IV pensionna le compositeur Andreas Raselius et le luthisteCharles Bocquet. Il avait fait de son ancien précepteur, le théologien réformé Pitiscus, son chapelain : ce dernier devait employer ses loisirs à dresser les tables trigonométriques les plus précises du XVIIe siècle. Tout au long de son règne, Frédéric IV poursuivit la construction de son château de Heidelberg. C'est de cette époque que date l’aile Frédéric. La galerie des Wittelsbach, œuvre du maître Sebastian Götz de Coire (en façade de l’aile Frédéric), représente l'histoire de cette dynastie avec beaucoup d'inspiration, si ce n'est que l'apparition de Charlemagne dans cette succession de princes est quelque peu douteuse.
Il fit édifier près du village de pêcheurs de Mannheim en 1606-07 la forteresse bastionnée de Friedrichsburg(de). Frédéric IV se montra particulièrement généreux avec sa ville-forteresse de Mannheim. Il accorda aux habitants des privilèges spéciaux comme l'exemption de la corvée. Pour faciliter le repeuplement du comté, il décréta que les immigrants seraient exonérés d'impôts les 20 premières années.
En 1608 il prit la tête de l'Union évangélique, à un moment où la tension avec les princes catholiques s'accroissait sensiblement.
Frédéric IV a laissé une réputation de gros buveur (de vin)[2] ; son intempérance faisait craindre à ses contemporains que, mourant avant l'âge, il ne laissât aucun héritier majeur à sa mort, précipitant ses sujets dans un nouveau conflit de succession. Du reste, il mourut en 1610 « des suites de son style de vie extravagant », et fut inhumé dans l'église du Saint-esprit de Heidelberg.
Wolfgang von Moers-Messmer: Heidelberg und seine Kurfürsten. Die große Zeit der Geschichte Heidelbergs als Haupt- und Residenzstadt der Kurpfalz. Verlag Regionalkultur, Weiher 2001. (ISBN3-89735-160-9)
Karl Kollnig: Die Kurfürsten von der Pfalz. 1993, (ISBN3-929295-04-0).