La démographie de la Tunisie se caractérise par l'uniformité de la population en matière de composantes culturelles ou religieuses. Ainsi, sur un fond phénicien[13] et après avoir assimilé à travers son histoire les Romains, les Vandales, les berbères les Turcs et les Européens ce sont les Arabes qui vont le plus marquer l'identité tunisienne, 93,8 % des Tunisiens sont arabes pour 1,4 % berbère[14]. La grande majorité des Tunisiens sont affiliés à des tribus arabes originaires d'Arabie[15] dont la plus grande est la tribu des banu Hudhayl (affiliée au banu sulaym)[16],[17].
97 % des Tunisiens étaient de confession musulmanesunnite en 2005[18]. Toutefois, il existait 250 000 non-musulmans (7 % de la population totale) à l'indépendance de la Tunisie en 1956 (dont un tiers de juifs). Durant 2 000 ans, au sud de Djerba, il existait également une forte population juive dont il ne reste plus qu'une minorité.
La Tunisie a dépassé le cap des dix millions d'habitants en 2005, ce qui correspond à un triplement de sa population depuis l'indépendance en 1956 (3 448 000 habitants) et à un doublement depuis le début des années 1970. Néanmoins, la croissance démographique ralentit, le pays accélérant sa transition démographique dans les années 1990. Ainsi la Tunisie possède la population la plus âgée d'Afrique[19].
La Tunisie est aussi un pays qui connaît un taux important d'émigration : le nombre de Tunisiens résidant à l'étranger est évalué à 885 000 personnes. 83 % d'entre eux résident en Europe dont 511 000 en France.
Évolution de la population
Entre 1960 et 2013, la population a augmenté de 6 665 799 habitants[20],[21].
Alors que la vaste majorité des Tunisiens s'identifient culturellement aux Arabes, certaines études tendent à indiquer qu'ils seraient génétiquement plus proches des Berbères mais aussi de certains Européens :
« Comparés avec d'autres communautés, notre résultat indique que les Tunisiens sont très liés aux Nord-Africains et aux Européens de l'Ouest, en particulier aux Ibériques, et que les Tunisiens, les Algériens et les Marocains sont proches des Berbères, suggérant une petite contribution génétique des Arabes qui ont peuplé la région au VIIe ou VIIIe siècle[25]. »
Certains groupes, descendants des Berbères, ont cependant su conserver leur langue et leurs coutumes, souvent en raison de leur enclavement géographique[28]. En effet, de nos jours, ils habitent souvent les régions de montagnes (Matmata, Tataouine, Gafsa, Makthar ou Sbeïtla).
Toutefois, les Berbères, qui représentent une forte minorité ethnique au Maroc et en Algérie, restent peu nombreux en Tunisie. Les quelques tribus nomades, minoritaires, sont pour la plupart intégrées et sédentarisées.
La majorité de la population se considère de confession musulmanesunnite de rite malikite. De la forte population juive qui a existé durant 2 000 ans, au sud de Djerba, il ne reste plus aujourd'hui qu'une infime partie, vivant principalement dans la région de Tunis, car la majorité des Juifs tunisiens ont en effet émigré vers Israël ou la France après l'indépendance du pays. Il existe également une petite population chrétienne.
Principaux pays d'origine des migrants internationaux en Tunisie[29]
Avec 2 643 695 habitants en 2014, le Grand Tunis (Tunis, Ariana, Ben Arous, Manouba) se classe au premier rang des zones les plus peuplées de Tunisie. La population du district représente 24 % de la population totale, et vit sur un territoire ne dépassant pas 2 % de la superficie du pays[31]. À l'opposé, le nord-ouest, particulièrement, les gouvernorats du Kef et de Siliana se vident selon le recensement de la population mené en 2004. La migration intérieure est en hausse et représente 27 % des mouvements totaux, principalement vers le gouvernorat de Tunis[31]. Les motifs en sont multiples : recherche d'emploi, études ou mariage. Ce phénomène a notamment des conséquences sur les constructions anarchiques, y compris aux abords des oueds et des canaux, ce qui provoque régulièrement des drames en cas d'inondations[31].
Génétique
Lignée paternelle : l'ADN du chromosome Y
Les principaux haplogroupes du chromosome Y des Tunisiens varient selon les régions, l'étude de Ennafaa faite sur 5 groupes tunisiens principalement berbère porte une moyenne de : E-M81 (71 %) J-1 (30 % +) ce qui montre l'homogénéité globale[32].
La majorité des études sur le chromosome Y en Tunisie a été faite sur des groupes berbères ou des zones cosmopolites (Tunis par exemple), l'haplogroupe J1 reste donc minoritaire chez les populations berbères (de l'ordre de 17%).
Les arabes tunisiens testés sur les études sont en moyenne 36% J1 - 41% E-M81, un impact beaucoup plus significatif[33]. Les études menées sur l'ADN du chromosome Y dans les autres pays arabes montre que la Tunisie est dans la norme, les autres pays arabes étant approximativement équivalents[34].
E1b1b1b (E-M81), anciennement E3b1b et E3b2, est caractéristique des populations du nord-ouest de l'Afrique où sa fréquence moyenne est d'environ 50 %. Dans certaines parties isolées du Maghreb, sa fréquence peut culminer jusqu'à 100 % de la population. Cet haplogroupe se retrouve aussi dans la péninsule Ibérique (5 % en moyenne) et à des fréquences moins élevées, en Italie et en France.
J1 est un haplogroupe « sémitique » très fréquent dans la péninsule arabique, avec des fréquences avoisinant 70 % au Yémen. Des taux de 20 % se trouvent chez des Juifs du proche-orient.
Ces études faites majoritairement sur des groupes berbères ne concernent que le chromosome Y, mais pas l'ADN autosomal qui est pourtant un bon indicateur génétique.
Aussi, on remarque que l'ADN autosomal tunisien a été influencé dans une certaine mesure par les Phéniciens[38] et que la majorité des Tunisiens descendent non pas de "Berbères" mais de fermiers anatoliens, peuple indo-européen qui a immigré des steppes eurasiennes vers l'Anatolie et le Levant (8.500 - 3000 av. J-C)[39]. Les Berbères tunisiens, eux-mêmes, possèdent rarement une composante génétique berbère majoritaire, contrairement aux Berbères marocains[40]. Les Arabes tunisiens, quant à eux, possèdent généralement une composante génétique majoritairement arabe à 42 %[41],[42].
Lignée maternelle : l'ADN mitochondrial
De nombreuses études ont été menées au nord de l'Afrique pour des populations du Maroc[43],[44], d'Algérie[45], de Tunisie[46], ou plus globalement du Nord de l'Afrique[47]. Les auteurs montrent que la structure génétique mitochondriale générale des Tunisiens et des populations du Maghreb est composée :
majoritairement d'haplogroupes (H, J, T, V…) fréquents dans les populations européennes (de 45 à 85 %),
d'haplogroupes L (de 3 à 50 %) très fréquents dans les populations sub-sahariennes,
de l'haplogroupe M1 (de 0 à 15 %) détectés principalement dans les populations est-africaines,
de l'haplogroupe U6 (0 à 28 %), surtout présent en Afrique du Nord et également a des fréquences < 5 % dans la péninsule Ibérique,
et d'haplogroupes M, N ou X (de 0 à 8 %) détectés principalement en Eurasie.
↑Le taux de variation de la population 2020 correspond à la somme du solde naturel 2020 et du solde migratoire 2020 divisée par la population au 1er janvier 2020.
↑L'indicateur conjoncturel de fécondité (ICF) pour 2020 est la somme des taux de fécondité par âge observés en 2020. Cet indicateur peut être interprété comme le nombre moyen d'enfants qu'aurait une génération fictive de femmes qui connaîtrait, tout au long de leur vie féconde, les taux de fécondité par âge observés en 2020. Il est exprimé en nombre d’enfants par femme. C’est un indicateur synthétique des taux de fécondité par âge de 2020.
↑Le taux de mortalité infantile est le rapport entre le nombre d'enfants décédés à moins d'un an et l'ensemble des enfants nés vivants.
↑L'espérance de vie à la naissance en 2020 est égale à la durée de vie moyenne d'une génération fictive qui connaîtrait tout au long de son existence les conditions de mortalité par âge de 2020. C'est un indicateur synthétique des taux de mortalité par âge de 2020.
↑L'âge médian est l'âge qui divise la population en deux groupes numériquement égaux, la moitié est plus jeune et l'autre moitié est plus âgée.
↑Aounallah Samir, « L'Antiquité Tunisienne, De la fondation d’Utique à la chute de Carthage : Dix-huit siècles d’histoire (1101 avant J.-C. — 698 après J.-C.) », NIRVANA. Tunis, (lire en ligne, consulté le )
↑A. Hajjej, H. Kâabi, M. H. Sellami, A. Dridi, A. Jeridi, W. El Borgi, G. Cherif, A. Elgaâïed, W. Y. Almawi, K. Boukef et S. Hmida, « The contribution of HLA class I and II alleles and haplotypes to the investigation of the evolutionary history of Tunisians », Tissue Antigens, vol. 68, no 2, août 2006, p. 153–162
↑Selon Gabriel Camps (Les Berbères. Mémoire et identité, éd. Errance, Paris, 1995, p. 102), « en renforçant par leur présence la part de population nomade, les Arabes arrivés au Xe siècle ont été d'un poids insignifiant sur le plan démographique, mais déterminant sur le plan culturel et socio-économique ».
↑(en) Karima Fadhlaoui-Zid, Begoña Martinez-Cruz, Houssein Khodjet-el-khil et Isabel Mendizabal, « Genetic structure of Tunisian ethnic groups revealed by paternal lineages », American Journal of Physical Anthropology, vol. 146, no 2, , p. 271–280 (DOI10.1002/ajpa.21581, lire en ligne, consulté le )
↑(en) Sarra Elkamel, Sofia L. Marques, Luis Alvarez et Veronica Gomes, « Insights into the Middle Eastern paternal genetic pool in Tunisia: high prevalence of T-M70 haplogroup in an Arab population », Scientific Reports, vol. 11, no 1, , p. 15728 (ISSN2045-2322, DOI10.1038/s41598-021-95144-x, lire en ligne, consulté le )
↑(en) Hannah M. Moots, Margaret Antonio, Susanna Sawyer et Jeffrey P. Spence, « A Genetic History of Continuity and Mobility in the Iron Age Central Mediterranean », scientifique, , p. 2022.03.13.483276 (DOI10.1101/2022.03.13.483276v1.full, lire en ligne, consulté le )
↑(en) Rosa Fregel, Fernando L. Méndez, Youssef Bokbot et Dimas Martín-Socas, « Ancient genomes from North Africa evidence prehistoric migrations to the Maghreb from both the Levant and Europe », Proceedings of the National Academy of Sciences, vol. 115, no 26, , p. 6774–6779 (ISSN0027-8424 et 1091-6490, PMID29895688, PMCIDPMC6042094, DOI10.1073/pnas.1800851115, lire en ligne, consulté le )
↑Fadhlaoui-Zid et al., 2004 ; Cherni et al., 2005 ; Loueslati et al., 2006
↑Coudray et al., « Les lignées mitochondriales et l'histoire génétique des populations berbérophones du nord de l'Afrique », Antropo, no 18, 2009, p. 63-72
Bibliographie
Frédéric Sandron, La transition de la fécondité en Tunisie, éd. L'Harmattan, Paris, 2002 (ISBN2747533824)