Né d’un père polytechnicien d’origine finistérienne, Pierre Laurent, et d’une mère musicienne originaire de Nantes, Donatien Laurent fréquente durant ses années de lycée à Paris la diaspora bretonne, et découvre la culture celtique[3]. Il fait partie du mouvement scout breton Bleimor à Paris, puis intègre, à la suite de son frère Loeiz, le bagad Bleimor et en devient le penn-soner[4]. Sonneur de cornemuse aguerri, il suit en 1956 son ami Herri Léon dit « La Pie », à l’île de Skye pour suivre un stage d’été organisé par le College of Piping ; ils en sortent diplômés d'un certificat élémentaire. Tous les deux révolutionneront l'utilisation de la grande cornemuse écossaise dans les bagadoù, ce qui créera des conflits au sein de Bodadeg ar Sonerion[5].
Dans le cadre de son intérêt pour la musique bretonne, il commence dès l'adolescence, seul ou accompagné de ses amis bretons de Paris à faire des collectes sonores notamment dans le pays vannetais, ainsi que dans la Bretagne intérieure, notamment à Scaër et Glomel. Le premier enregistrement qu'il effectue seul, sur le terrain, date de l'été 1956, au Conquet, sur le magnétophone de son frère. Après un grave accident survenu en avril de l'année suivante, assorti de 18 jours de coma, les médecins l'ayant déclaré inapte à poursuivre des études, il décide de se consacrer à des recherches sur la culture bretonne[6]. Inscrit à la Licence libre d'Ethnologie de la Sorbonne à Paris, encadrée par André Leroi-Gourhan, il se voit proposer par ce dernier, en 1964, de faire du terrain ethnologique à Plozévet.
En 1965, il rencontre lors d'une enquête sa future épouse, Françoise Prigent[7]. Elle lui apportera un soutien actif dans la rédaction des Sources de Barz[8].
Avec le descendant de La Villemarqué, il retrouve les carnets de collecte originaux sur lesquels le littérateur avait recueilli les chants qui ont servi de base à la rédaction du Barzaz Breiz. Cette découverte, qui fera l’objet, dix ans plus tard, d'une thèse soutenue en 1974 (suivie d'une version publique publiée quinze ans plus tard, en 1989), permet de mieux comprendre et juger la valeur du travail du vicomte, un temps mise en doute. Les carnets montrent que La Villemarqué connaissait parfaitement la langue bretonne (contrairement à ce que supposait en 1959 Francis Gourvil dans sa thèse sur le Barzaz-Breiz). Ils montrent aussi que La Villemarqué avait pris de grandes libertés en constituant son recueil, arrangeant certaines pièces, supprimant les mots trop français, etc., mais les carnets montrent surtout que certains chants, considérés par Luzel, Ferdinand Lot, Arbois de Jubainville, Anatole Le Braz, Francis Gourvil comme ayant été inventés par La Villemarqué, avaient bel et bien été recueillis : c'est le cas de Merlin barde, Le Faucon, La Vassal de Duguesclin...
Donatien Laurent a dirigé le Centre de recherche bretonne et celtique de l'Université de Bretagne occidentale (Brest) pendant une douzaine d'années. En 2015, Dastum en partenariat avec le CRBC et avec l'aide de Donatien Laurent et Laurent Bigot, met en ligne une partie du travail de documentation du fonds numérisé de Donatien Laurent, soit cent trente-six enquêtes, réalisées principalement en Basse-Bretagne du milieu des années 1950 à la fin des années 1970[9].
Il meurt dans la nuit du 24 au 25 mars 2020 à Brest[10],[11].
Autour du Barzaz-Breiz : Le Faucon (Ar Falc'hon), BSAF, 1977
Aymar de Blois et les Premières Collectes de chants populaires bretons, 1977, Cahier de l'Iroise
Récits et contes populaires de Bretagne, réunis dans le pays de Pontivy ; P., Gallimard (coll. Récits et contes populaires), 1978.
Aux sources du Barzaz-Breiz : la mémoire d’un peuple, Ar Men, 1989, 335 p. Version publique de la thèse soutenue, quinze ans plus tôt, en 1974.
Chant historique français et tradition orale bretonne, dans Autour de l’œuvre de Patrice Coirault, Actes du colloque de Poitiers, novembre 1994, p. 64-83.
La Bretagne et la Littérature orale en Europe(en collaboration avec F. Postic), Actes du colloque de Quimperlé, mai 1995, CRBC-Manoir de Kernault, 293 p.
La Nuit celtique, entretiens avec Michel Treguer, Presses universitaires de Rennes, éd. Terre de Brume, Rennes, 1996
Herri Léon et le Scolaich beg an treis, Donatien Laurent en collaboration avec Anne-Marie Léon (la fille d'Herri Leon), Armel Morgant, Gilles Goyat, éditions Diwaskell ar big 2004
Chapitres
« Le juste milieu. Réflexion sur un rituel de circumambulation millénaire : la troménie de Locronan » dans Tradition et histoire dans la culture populaire: rencontres autour de l'oeuvre de Jean-Michel Guilcher, Centre alpin et rhodanien d'ethnologie, Grenoble, 1990, p. 255-292.
« La cime sacrée de Locronan » dans Hauts lieux du Sacré en Bretagne, Kreiz 6, 1996, p. 357-366.
Donatien Laurent : Parcours d'un ethnologue, Emgleo Breiz, 2012, 326 p. (ISBN978-2-35974-054-7)
Collectif et Fañch Postic (dir.), Bretagnes du cœur aux lèvres : Mélanges offerts à Donatien Laurent, Presses Universitaires de Rennes, coll. « Essais », , 421 p.
Articles
Ifig Flatrès, « Donatien Laurent. Parcours d'un chercheur passionné », Musique bretonne, no 171, mars 2002, p. 34-35, lire en ligne
Michel Treguer, « Chances et Génie d'un trépané. Aperçu sur la vie de Donatien Laurent» « Bretagnes du cœur aux lèvres », Fañch Postic (dir.) Presses universitaires de Rennes, 2009, [www.pur-editions.fr]
Interviews
Pierre Gallais, « Donatien Laurent : « Quelles que soient ses fonctions, la chanson bretonne est d'abord le témoin d'une identité » », Le Peuple breton, no 227,
Armel Morgant, « Rencontre avec Donatien Laurent », Ar Soner, no 342,
Florence Cassagnau, « Donatien Laurent. Le gardien de la tradition bretonne », Le Télégramme,
Nicolas Weill, « Donatien Laurent, le breton à l'oral », Le Monde,
Nathalie Couilloud, « Donatien Laurent. Aux sources de l'ethnologie bretonne et celtique », ArMen, no 134,
Documentaire
Qui a tué Louis Le Ravallec ? (2013), récit-documentaire de Philippe Guilloux, 1 h 30, produit par Carrément à l’Ouest, coproduit par Tébéo, Tébésud et TVR. extrait