Les vestiges du château sont situés dans le centre ville d'Alençon, sur la rive gauche de la Briante, dans le département français de l'Orne. Il était un des éléments essentiels pour la défense du duché de Normandie sur sa frontière sud, contre d'éventuelles attaques angevines, et empêcher l'accès aux plaines de Normandie moyenne[3].
Historique
Le premier château d'Alençon, qui a complètement disparu, est construit au IXe siècle, sous le règne du duc de Normandie Richard Ier, et confié à la garde de la famille de Bellême[4], dont les deux premiers seigneurs connus de la ville, sont Yves de Bellême et son fils Guillaume Ier.
Sous le duc Robert Ier (v. 1010–1035), le château essuie un premier siège afin d'affirmer l'autorité et les droits du duc sur la forteresse[5], à la suite de la prise de la place par Guillaume de Bellême en rébellion contre l'autorité ducale[6]. Robert imposa au baron rebelle de faire amende honorable et de venir implorer son pardon nu-pieds sous le joug d'une selle de cheval[7].
Vers 1050, le duc de Normandie Guillaume le Bâtard vint assiéger le château des Bellême dont s'était emparé Geoffroy Martel[5], comte d'Anjou. Il est décrit : « Avait a cel terms un fossé, Haut e parfont e réparé ; Sur le fossé ont hériçon, E dedenz close une maison ; Entor ont bretesches levées, Bien planchies e Kernelées »[note 1],[8]. Lors de l’assaut, Guillaume, fit combler le fossé et incendier les défenses « Li bois fu secs, li feu s'esprent. Que par le feu qu'il alluma, Que par l'assaut qu'il lor dona, Les uns sont ars (brulés), li altre pris, E tel i a hunte occis[9] ». En 1087, Robert de Bellême alors qu'il chevauche vers Brionne, apprenant la mort du duc Guillaume, tourne bride et se dirige sur Alençon, surprenant la garnison locale et l'expulse[10].
En 1113, lorsque Henri Ier Beauclerc, roi d'Angleterre, duc de Normandie et troisième fils de Guillaume le Conquérant, prend Alençon, il élève un grand donjon roman[note 2] carré, analogue à ceux d'Arques, de Caen ou de Falaise.
En 1220, le château et le comté d'Alençon, sont rattachés au domaine royal à l'extinction de la famille de Bellême[5]. Saint Louis (1214-1270) les donnent à son cinquième fils, Pierre Ier d'Alençon, qui prend par la suite le titre de duc d'Alençon. Mort en 1283 sans descendants, le duché d'Alençon, devient un apanage du royaume. En 1285, c'est Charles de Valois, frère du roi de France Philippe IV le Bel, qui reçoit l'apanage.
En 1592, le château d'Alençon est en grande partie détruit sur la volonté d'Henri IV qui voyait d'un mauvais œil l'érection d’importantes forteresses, symboles du pouvoir individuel des seigneurs et de l'hétérogénéité du royaume, d'autant plus que la France venait d'être déchirée par les guerres de Religion.
Il ne reste alors que le donjon et le pavillon d'entrée. Les ducs d'Alençon abandonnent de fait le château pour résider dans l'hôtel de Guise[note 4].
Sous Louis XIII, le donjon doit servir comme carrière de pierre, mais la chambre des comptes donne son refus. En 1744, à la suite de l'incendie de l'église Notre-Dame on utilise pour sa reconstruction les pierres de couronnement du donjon. Sa destruction est suspendue, car en 1780 on aménage à l'intérieur des cachots qui ne serviront qu'un an, les murs s'étant lézardés à la suite de la poussée des voûtes construites à l'occasion. Les prisonniers seront évacués. En 1782, le donjon est à son tour détruit[note 5]. Il ne reste alors du château des ducs d'Alençon que le pavillon d'entrée.
En 1804, l'implantation de la maison d'arrêt d'Alençon dans l'édifice entraîne d'importants travaux liés à cette nouvelle affectation modifiant le bâtiment et ses abords (distribution intérieure et création de murs d'enceinte accueillant les cours de promenade). En 2010, la maison d'arrêt est transférée sur le site des Croisettes à Coulaines, près du Mans[11].
En 2018, la ville d'Alençon rachète le château à l'État après quatre ans de négociations[12]. L'année suivante, la ville commence l'aménagement des lieux afin de rendre l'accès au château et à un parc urbain à aménager[13].
Description
De l'importante forteresse, il ne subsiste de nos jours, que la tour Couronnée du XIVe siècle de deux étages, le corps de logis attenant à la tour, et le châtelet d'entrée flanqué de ses deux tours rondes jumelles de la fin du XIVe siècle, couronnées de mâchicoulis au XVe siècle[14]. L'impression que laisse ce dernier, avec ses deux tours jumelles, témoigne de la grandeur et de la somptuosité de l'ancien château. Quant à la tour couronnée, elle est composée de deux tours, l'une plus étroite surmontant l'autre à parapetcrénelé sur mâchicoulis[15].
Le château avant sa destruction se composait d'une enceinte fortifiée, englobant deux îles de la Briante, flanquée de grosses tours dont plusieurs semi-cylindriques : tour du Chevalier, tour Giroie[note 6] et la tour salée faisant office de magasin à sel[15]. Il ne reste rien de celles-ci, ni des fossés formés par la Briante, ou bien peu du parc gigantesque qui s'étendait jusqu'à la forêt d'Écouves, réduit aujourd'hui au parc des Promenades de 4 hectares. Quant à la barbacane, elle se dressait à l'emplacement du square de la Sicotière.
Notes et références
Notes
↑Le château construit en bois, est constitué d'un donjon que protègent des ouvrages en saillies crénelés, les bretèches, entouré d'une levée de pieux, le hérisson, et d'un fossé haut, profond et bien tranché.
↑Stéphane William Gondoin, « Les châteaux forts au temps de Guillaume le Conquérant », Patrimoine normand, no 94, juillet-août-septembre 2015, p. 41 (ISSN1271-6006).
↑Guy Le Hallé (préf. Hervé Morin, photogr. Yves Buffetaut), Châteaux forts de Basse-Normandie, t. II, Louviers, Ysec Éditions, , 160 p. (ISBN978-284673-215-4), p. 25.
↑Charles-Laurent Salch et Joseph-Frédéric Finó (photogr. Dominique Martinez), Atlas des châteaux forts en France, Strasbourg, Éditions Publitotal, , 19e éd. (1re éd. 1977), 834 p., p. 574 (cf. Alençon).
Charles-Laurent Salch, Dictionnaire des châteaux et des fortifications du Moyen Âge en France, Strasbourg, Éditions Publitotal, , 28e éd. (1re éd. 1979), 1304 p. (ISBN2-86535-070-3, OCLC1078727877), p. 18 (cf. Alençon).
Ouest-France, édition de l'Orne, jeudi 28 août 2008, page 9, Avant-après : le château des ducs. Consulté le 28 août 2008. Fichier audio