Les « chauffeurs de pâturons » (en argot, « brûleurs de pieds ») ou simplement « chauffeurs » est un terme populaire utilisé pour désigner les bandes de criminels qui s’introduisaient la nuit chez les gens et leur brûlaient les pieds sur les braises de la cheminée pour leur faire avouer où ils cachaient leurs économies.
Base du « métier » de chauffeur
En cette époque troublée suivant la Révolution, ces bandes organisées écumaient les campagnes de Picardie et du Nord, chacun des membres connaissant sa tâche : faire effraction, escalader les murs, enfoncer les portes, lier, chauffer les pieds, tout cela à fin de vol. Partout c'était les mêmes moyens employés par les brigands dont il résultait subsidiairement d'autres forfaits et tortures de l'incendie au viol, jusqu’au meurtre.
Historique
On évoque ces pratiques criminelles dès la fin du XVIIe siècle[1]. Les forêts qui couvrent alors une grande proportion du territoire, protègent toutes sortes d’individus.
XVIIIe siècle
À l’époque, sévissent surtout les « Chauffeurs du Nord » dont les plus célèbres furent :
François Marie Salembier (né le à Isbergues - guillotiné à Bruges le ), qui sévit dans les départements de la Lys, de l’Escaut et du Nord. Il est le fils de Jacques Joseph et de Anne Isbergues Delmar ; Il épouse Marie Anne Françoise Carpentier le 4 octobre 1785 à Isbergues ;
Les Herbo terrorisent le village de Ghoy et sa région ;
Un certain Fontaine met Papignies et sa région sous sa coupe ;
Willocq, dit « Le Pire » ;
Les frères Massart rançonnent Biévène et ses environs et échappent aux gendarmes ;
Jean-Joseph Boulanger, dit « Quette-Marie-Maison », dit « L’Anglais », et sa bande pillent le canton de Lessines.
Dans d'autres régions ce sont :
Les « chauffeurs de la Beauce » ou « chauffeurs d'Orgères » dont les activités, de 1785 à 1792, s’étendent sur sept départements, particulièrement en Eure-et-Loir et dans le Loiret ;
Les « chauffeurs de (François) Robillard », actifs dans l'Eure et les départements voisins de 1793 à 1797[2].
Ces sinistres personnages, en général de paisibles ouvriers ou commerçants le jour, se masquent ou se maquillent le visage en noir la nuit pour aller dévaliser de pauvres gens. En cas de refus, ou même parfois pour ne pas laisser de témoins de leur passage, ces bandits assassinent leurs victimes.
Les chauffeurs arrêtés finissent, en général, à la guillotine.
Toujours en 1798 Antoine-Joseph Moneuse et son complice Nicolas-Joseph Gérin sont également guillotinés, à Douai, mais ces exécutions n’ont pu mettre fin aux agissements de toute une série de petits malfrats ;
Même si, pendant le XIXe siècle, il arrive parfois que de telles bandes se créent çà et là en France, c’est à la Belle Époque qu’on voit une réelle recrudescence de cette sorte de malfrats.
Ainsi, une bande en Aquitaine, la « bande Bouchery », du nom de son chef, tenancier de la buvette de la gare de Langon[3] ;
« Les Bandits d’Hazebrouck » dans le Nord et le Pas-de-Calais. Le , les meneurs de la bande d’Hazebrouck, Canut Vromant, Théophile Deroo, Auguste Pollet et son frère (et grand chef) Abel Pollet, sont guillotinés devant la prison de Béthune ;
Le , à Valence, trois membres des « Chauffeurs de la Drôme »[4], Octave David, Louis Berruyer et Urbain Liottard sont également guillotinés ;
Dans les années 1920, une nouvelle bande, les « Cagoulards », voit le jour dans la région de Lille. Les chefs seront arrêtés en 1924, et le chef, Henri Olivier dit « Le Tigre », est à son tour guillotiné à Lille le .
« Le Gang d’Albert », en Picardie, en sont les exemples les plus typiques ;
Les chefs de chacune de ces bandes furent exécutés : Nicolas Stéphan, chef des Romanis, à Chalon-sur-Saône le , et Raymond Perat, chef du « Gang d’Albert », à Laon le .
XXIe siècle
Dans la nuit du 16 au , l’élu LR Didier Bremond et son épouse sont violemment agressés dans leur villa de Saint-Maximin-la-Sainte-Baume (Var) où leurs agresseurs utilisent un procédé rappelant ceux qu’on dénommait autrefois les « chauffeurs » ou « brûleurs de pieds »[5].
Adrien Varloy, Les chauffeurs du Santerre, Paris, Bonvalot-Jouve, (réimpr. 1990, 2004 aux éd. Res Universis), 218 p.
J. Declercq, « Le brigandage dans le canton de Lessines – Nisolles et compagnie », Annales du Cercle d’Histoire de l’Entité Lessinoise, vol. II, (lire en ligne)
André Goudeau, Le Département de l'Eure sous le Directoire, Presses universitaires de Rouen et du Havre, 2012, p. 103-115 [1]