Augustin-Pyramus de Candolle[1] ou Augustin Pyramus de Candolle[2],[3] né le à Genève et mort le dans la même ville, est un botanistesuisse.
Augustin-Pyramus de Candolle fut l'un des fondateurs de la géographie botanique en tant que discipline scientifique. Il fut également un descripteur et classificateur du monde végétal. Dans le cadre de ses travaux horticoles, il identifia comment se répartissaient quantitativement les caractères de la descendance chez le hêtre pourpre, devançant largement Gregor Mendel sur cette loi génétique de répartition des caractères, bien que limité par le temps de génération de son modèle, de 60 à 80 ans (contre moins d'un an pour le pois de Mendel)[4].
Augustin-Pyramus de Candolle descend d'une ancienne famille de la noblesse de Provence, dont la branche cadette subsistait alors encore à Marseille. Son chef, le marquis de Candolle, était consul à Nice en 1823.
Fuyant les persécutions religieuses du XVIe siècle, la branche calviniste de la famille s'expatrie. L'ancêtre, Pyramus de Candolle, après s'être converti au protestantisme, se réfugie en 1591 à Genève auprès de son oncle Bernardin de Candolle, qui avait été reçu bourgeois en 1555 et membre du Conseil des Deux-Cents en 1562. Pour services rendus, Pyrame de Candolle y est lui aussi reçu bourgeois et élu membre du Deux-Cents ; il fonde à Cologny, puis à Yverdon, l'imprimerie caldorienne qui a publié l'une des premières traductions françaises de Tacite et de Xénophon[5].
Quant à Augustin-Pyramus, initié à la botanique dès l'âge de 16 ans dans le jardin de la Société d'Histoire naturelle de Genève, il sait tirer parti d'enseignements aussi divers que ceux de Jean-Pierre Vaucher (1763-1841) et Jean Senebier (1742–1809) à Genève, puis de René Desfontaines (1750-1833) et Jean-Baptiste de Lamarck (1744–1829) à Paris, où il étudie la médecine à partir de 1798. Il donne dès 1799 une Plantarum Historia Succulentarum (Histoire des plantes grasses[6]), et en 1802 son Astragalogia, Il aide ensuite Lamarck à refondre la Flore française (1803-1815). Pendant ses études à Paris, il rachète avec le naturaliste neuchâtelois Paul-Louis-Auguste Coulon l'herbier de Charles Louis L'Héritier de Brutelle, Candolle conservant les plantes indigènes et Coulon les plantes exotiques[7]. En 1804, il obtient son titre de docteur en médecine à la Faculté de Paris avec un Essai sur les propriétés médicales des plantes.
Il s'est notamment intéressé à la botanique des dunes. S'étonnant que « les historiens romains, qui nous décrivent la Batavie, ne font nulle part mention des dunes qui auroient dû cependant mériter leur attention », et regrettant qu'on ne puisse les mettre en culture, il décide de se rendre sur place, et il parcourt à pied tout le littoral dunaire, depuis le Nord de la France (en visitant le hameau de Latann, où les pêcheurs ont réussi à faire pousser de l'orge et diverses plantes de potager, des pins et quelques arbres) jusqu'aux Pays-Bas (« depuis Dunkerque jusqu'à l'Isle du Texel ; je n'ai négligé aucune occasion d'examiner les essais qui ont été faits jusques à présent pour fertiliser ces sables. Dans le but de m'éclairer sur la végétation des dunes, j'ai ramassé avec soin les différens végétaux qui y croissent spontanémen »). Il tirera de ce voyage une riche information sur la flore dunaire. Le nombre et la diversité des plantes l'incitent à penser qu'une fertilisation des dunes serait possible :
« De Gorter, dans sa Flore des sept Provinces-Unies, indique cent trente espèces de plantes indigènes des dunes. M. J. Kops, secrétaire de la Commission sur les dunes, en a, depuis lors, trouvé cent cinquante-six espèces qui avoient échappé à de Gorter, et dont il a bien voulu me communiquer la liste. Moi-même, enfin, en herborisant dans les dunes, j'y ai rencontré quatre-vingt-cinq plantes qu'on n'y avoit pas encore indiquées, d'où l'on voit que le nombre des espèces qu'on sait croître dans les dunes s'élève à trois cent soixante-onze[8]. »
Il reçoit en 1806 la mission de parcourir tout l'Empire pour reconnaître l'état de l'agriculture et publie à son retour, dans les Mémoires de la Société d'agriculture1807-1813, trois importants rapports sur ce sujet. À la mort de Pierre Marie Auguste Broussonet (1761-1807), il obtient la chaire de botanique à la Faculté de Médecine de Montpellier. En 1813, il fait paraître sa Théorie élémentaire de la botanique[9], son chef-d'œuvre : il y enseigne les rapports naturels qu'ont entre elles les diverses parties de la plante et analyse la valeur de chacune de ces parties.
En 1807, il effectue une traversée d'est en ouest des Pyrénées, dans le but de répertorier la flore locale[10]. Il identifie notamment une fleur qui a été depuis nommée en son honneur, l'Orpin de Candolle, Sedum candollei. Cette traversée[11] a été rééditée en 1999[12] et 2007 pour remettre à jour les données scientifiques acquises.
Après avoir exposé les principes d'une nouvelle classification botanique dans sa Théorie élémentaire de la botanique, il entreprend en 1818 un travail titanesque : rédiger la description de toutes les plantes connues (tâche dont il reconnaîtra à la fin de sa vie qu'elle était beaucoup trop grosse pour lui[14]). Il en publie deux premières parties (Regni vegetabilis systema naturale, 1818-1821), mais, ne pouvant pas poursuivre ce projet, il le reprend dans un ouvrage abrégé, Prodromus Systematis Naturalis Regni Vegetabilis, continué après sa mort par son fils Alphonse Pyrame de Candolle (1806-1893) puis son petit-fils Casimir de Candolle (1836-1918) (17 vol. in-8o, 1824-1873). Il y travaille jusqu'à sa mort, notamment dans sa villa du bord du lac Léman, où Christian von Steven vint lui rendre visite en 1821. Cet ouvrage immense décrit 58 975 espèces de plantes. Augustin de Candolle a été un mentor pour le botaniste Jean-Louis Berlandier.
On lui doit encore l’Organographie (2 vol. in-8o, 1827) et la Physiologie végétale (3 vol. in-8o, 1832), ainsi que la Théorie élémentaire. Outre ces divers ouvrages, Candolle a produit un grand nombre de mémoires et d'articles détachés, parmi lesquels on remarque ses Expériences relatives à l'influence de la lumière sur les végétaux (1800) et son Essai élémentaire de Géographie botanique (1820), considéré par certains auteurs comme acte fondateur de la biogéographie historique [15].
N'ayant jamais adhéré à la possibilité d'une évolution biologique (seule la théorie de Lamarck avait été formulée à l'époque), il s'attache pourtant à découvrir les lois intimes de la morphologie végétale, en suivant les organes des plantes dans leurs transformations, et en formulant des explications aux anomalies qu'il y observe. Il fait triompher définitivement le principe de la méthode naturelle (à qui il faudra encore un siècle et demi pour pleinement atteindre ses objectifs) et met à profit son accès aux collections pour pousser aussi loin que possible la description de nouvelles espèces (à la fin de sa carrière, le nombre d'espèces végétales connues s'élève à 80 000). Candolle était associé étranger de l'Institut de France. Pierre Flourens a prononcé son Éloge à l'Académie des sciences, en 1842.
Il a laissé lui-même des Mémoires sur sa vie, qu'il a selon ses dires commencé à écrire en 1821 et qui seront publiées de manière posthume, en 1862, par son fils[16]. Il est lauréat de la Royal Medal en 1833 pour ses travaux de physiologie végétale.
(la) Augustin Pyrame de Candolle (vol. 1-7), Alphonse Pyrame de Candolle (vol. 8-17) et al., Prodromus Systematis Naturalis Regni Vegetabilis : sive, enumeratio contracta ordinum generum specierumque plantarum huc usque cognitarum, juxta methodi naturalis normas digesta, Paris, Sumptibus Sociorum Treuttel et Würtz, 1824-1873..
Flore française, ou Descriptions succinctes de toutes les plantes qui croissent naturellement en France, Paris, Desray, libraire, (BNF45331054, lire en ligne).
1845 - buste d'Augustin Pyrame de Candolle, par James Pradier, original en bronze placé dans l’ancien jardin botanique, devenu le parc des Bastions. À la suite des travaux du Monument international de la Réformation (dès 1909), une réplique est réalisée car l’original devait être déplacé et se dégradait, la réplique est inaugurée en 1914[17]. L’original se trouverait au Musée d'art et d'histoire[18]. Une réplique en fonte réalisée en 1979/1980 se trouve au Jardin botanique de Genève[19] (Fonds d'art contemporain de la Ville de Genève - FMAC). Les témoins de 1845, et en particulier la famille de Candolle, affirment que le portrait sculpté n'est en rien ressemblant[20].
↑Félix Bovet, Paul-Louis-Auguste Coulon de Neuchâtel, Zurich, Schulthess, , 30 p.
↑Augustin Pyramus de Candolle (1803), Mémoire sur la fertilisation des Dunes ; extrait des Annales de l'Agriculture Françoise ; tome XIII (version numérisée par Google) Ed : Huzard, 1803.
↑Concernant la partie orientale des Pyrénées : J.J. Amigo, Le journal de voyage botanique de A.P. Candolle dans les Pyrénées Catalanes (1807), revue Terra Nostra n°51, Prades, 1984, 96 pages.
↑Voyage de Tarbes, 1807 : première grande traversée des Pyrénées ; Un voyage dans le Midi de la France, Augustin Pyramus de Candolle; Journal et lettres à Fanny transcrits, annotés et présentés par Alain Bourneton, Loubatières, Portet-sur-Garonne, 1999.
↑Charles Borgeaud, Histoire de l'Université de Genève, L'Académie et l'Université au XIXe siècle, 1814-1900, Genève, Georg, , 573 p., p. 31-34
↑Bungener, P., P. Mattille & M. W. Callmander (2017). Augustin-Pyramus de Candolle : une passion, un Jardin. Lausanne, Genève, éditions Favre & CJBG.
↑(en) J Hist Biol. 1978 Fall;11(2):269-305. From Candolle to Croizat: comments on the history of biogeography. Nelson G.
↑Augustin Pyramus de Candolle, Alphonse de Candolle 1862), Mémoires et souvenirs de Augustin Pyramus de Candolle, écrits par lui-même et publiés par son fils à Genève [1].
↑(en) René & Peter van der Krogt, « Augustin Pyrame de Candolle », Statues - Hither & Thither – Schweiz/Suisse, sur vanderkrogt.net, 2013? (consulté le ).
↑James Pradier et Douglas Siler (textes réunis, classés et annotés par), Correspondance, t. III, Droz, (ISBN978-2-600-03644-3, lire en ligne), p. 210-211. « Jean-François Macaire à Auguste De la Rive », lettre du 11 juillet 1845, note 5 : Alphonse de Candolle : « L'artiste n'a malheureusement fait aucun usage des modèles qu’on lui avait envoyés de sorte que la ressemblance est à peu près nulle ».
Source
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(Liste non exhaustive, classée par années d'éditions)
Pierre Flourens, Éloge historique de Pyramus de Candolle, lu à la séance publique du 19 décembre 1842, dans Mémoires de l'Académie des sciences de l'Institut de France, 1845, tome 19, p. I-XLVIII(lire en ligne)
Le Voyage de Tarbes, 1807, Première grande traversée des Pyrénées, en voyage dans le Midi de la France, Journal et lettres à Fanny transcrits, annotés et présentés par M. Alain Bourneton, première édition, Loubatières, Portet-sur-Garonne, 1999, (ISBN2-86266-297-6).
Ses Mémoires et Souvenirs (1778-1841) ont été réédités par Jean-Daniel Candaux, Jean-Marc Drouin, Patrick Bungener et René Sigrist en 2004 dans la collection Bibliothèque d'histoire des sciences chez Georg Éditeur : xv + 591 p. (ISBN2-8257-0832-1). L'édition est précédée d'une utile introduction et est enrichie d'un index. Un système de notes permet de replacer les très nombreux noms cités par Candolle.
(de) Flavio Häner, « Wie die Natur in die Städte kam. Augustin Pyramus de Candolle und die Entstehung der naturhistorischen Museen in der Schweiz », dans Patrick Kupper, Bernhard C. Schär (éd.), Die Naturforschenden. Auf der Suche nach Wissen über die Schweiz und die Welt, 1800-2015, Baden, Hier und Jetzt, (ISBN978-3-03919-338-7), p. 35-49.
Carole Christen et Pierre-Yves Kirschleger, « Augustin Pyramus de Candolle », in Patrick Cabanel et André Encrevé (dir.), Dictionnaire biographique des protestants français de 1787 à nos jours, tome 1 : A-C, Les Éditions de Paris Max Chaleil, Paris, 2015, p. 560-561 (ISBN978-2846211901).
P. Bungener, P. Mattille et M.W. Callmander, Augustin Pyramus de Candolle : une passion, un Jardin, Lausanne, Genève, éditions Favre & CJBG, , 256 p., 25 cm (ISBN978-2-8289-1644-2, présentation en ligne). Cet ouvrage retrace la vie du botaniste ainsi qu'une de ses fondations les plus marquantes, le Jardin botanique de Genève, ancêtre du Conservatoire et Jardin botanique de la Ville de Genève.