Le prince de Conti, âgé de 25 ans, a été quelques années auparavant l'un des meneurs de la Fronde. Un an avant ce mariage, il venait de faire sa soumission à Louis XIV. Ce mariage est donc à la fois le signe de son retour en grâce, et un moyen d'abaisser cette lignée de princes du sang en lui donnant pour épouse une jeune femme d'un rang inférieur.
Le prince de Conti souffrait d'une maladie vénérienne, probablement contractée à Montpellier à l' en suivant dans ses frasques libertines le comte d'Aubijoux, alors gouverneur de la ville. Le prince ne tardera pas à contaminer sa jeune épouse.
Dès , le prince doit laisser sa femme à Paris pour prendre le commandement en chef de l'expédition de Catalogne. La princesse se montre éprise, écrivant à son mari de nombreuses lettres. Elle ne le revoit que le , lorsqu'elle le rejoint dans son château de la Grange-des-Prés, à Pézenas, où le prince est allé ouvrir les États de Languedoc. Mais ils se quittent à nouveau dès le printemps 1657, le prince de Conti devant retourner combattre en Espagne.
La princesse est veuve dès 1666. Elle prend alors pour médecin le jeune Denis Dodart, qui s'attache aux Conti, et sera le médecin de ses descendants, de même que son fils Claude Jean-Baptiste Dodart. Elle se porte acquéreuse à Paris en avril 1670 de l'hôtel de Guénégaud, rive gauche, dans le cadre d'une opération d'échanges de biens immobiliers.
HIC JACET
Cor clarissimae & potentissimae Principis Annae-Mariae Martianozziae, viudae celsissimi & potentissimi Principis Armandi Borboni, Principis de Conti ; quod à media fui parte illuftrissimi ac charissimi comjugis obitu separatum, tantùm Christo gemuit, danec sponso & Deo redderetur, quemunum uterque amaverat. Nullum in eo mundi amor locum habuit. Hoc altare Deo sacrum nullo alio igne coluit, quàm Dei. Amor Christi, amor sponsi, amor liberorum & Ecclesiae illud sibi vindicárunt. Charitas hujus cordi natura est, postquám à Christo creatum est in operibus bonis, quibus plenum perfectè Deo vivere caepit, moriens mundo & sensibus, qui suam illi lucem abscondebant. Si cor Christianum moreretur, obiit prid. non. feb. 1672, aetatis 35[2].
Ses entrailles sont déposées dans l'église de Port-Royal des Champs. Lors de la destruction de l'abbaye janséniste, elles furent transférées dans la sépulture de Saint-André-des-Arts[3].
Son mausolée fut élevé au pilier du côté gauche du chœur. Composé d'une statue de marbre blanc en bas-relief, accompagnée des attributs de La Foi, de L'Espérance et de La Charité, encadrée d'ornements en marbre surmontés d'une urne en bronze le tout dessiné et sculpté par Girardon. L'épitaphe de la princesse était gravée au-dessous en lettres noires sur une plaque de marbre blanc :
À la gloire de Dieu
et a la mémoire eternelle
d'Anne Marie Martinozzi
princesse de Conty
qui detrompée dès l'aage de
XIX ans vendit toutes ses pierreries pour
nourrir durant la famine de M DC LXII,
les pauvres de Berry, de Champagne, et de
Picardie, pratiqua toutes les austerités que
sa santé put souffrir; demeurée veuve a
l'aage de XXIX ans, consacra le reste de sa
vie a élever en princes chretiens les princes
ses enfans, et à maintenir les loix tempo
relles et ecclesiastiques dans ses terres; se
reduisit a une depense tres modeste; restitua
tous les biens dont l'acquisition luy fut sus
pecte jusqu'à la somme de DCCC mil li
vres; distribua toute son epargne aux
pauvres dans ses terres et dans toutes les
parties du monde, et passa soudainement
a l'éternité, après seize ans de perseverance
le IV février M DC LXII, aagée de
XXXV ans
Priez pour elle.
Louis Armand de Bourbon, prince de Conty et François
Louis de Bourbon prince de La Roche-sur-Yon et ses enfants
ont posé ce monument[5].
Armoiries
« Parti, au 1 de France, au bâton de gueules péri en bande; au 2 coupé, a de gueules à deux fasces bretessées et contrebretessées d'argent, b d'azur à la hache consulaire d'argent, les verges d'or, liées d'argent, posée en pal; à la fasce de gueules chargée de trois étoiles d'or brochant sur le tout ».
↑Lors de la fermeture de l'église, ce monument fut recueilli par Alexandre Lenoir pour le dépôt des Petits-Augustins. Placé au musée des monuments français sous le no 193. Chaptal autorisa la sortie de celui-ci pour décorer La Malmaison qui fut effectif en 1809. Il existe une gravure par François Philippe Charpentier de ce monument, (grande planche BnF; Topographie de Paris).
Annexes
Bibliographie
Émile Raunié, Épitaphier du vieux Paris Imprimerie nationale, 1890-1901. 3 vol., p. 10-12.
Édouard de Barthélemy, La princesse de Conti d'après sa correspondance inédite : une nièce de Mazarin, Paris : Firmin-Didot et Cie, 1875 (en ligne)