The ways of Zion do mourn selon l'incipit (« Les chemins de Sion sont en deuil », HWV 264, composition également connue en tant que Funeral Anthem for Queen Caroline[hd 1]), est une hymne composée en 1737 par Georg Friedrich Haendel à l'occasion du décès de la reine Caroline, épouse du roi d'Angleterre George II.
La reine Caroline, décédée le , connaissait Haendel depuis de très nombreuses années. Ils s'étaient rencontrés pour la première fois à Berlin, étant tous deux encore adolescents ; ils avaient à nouveau été en présence à Hanovre, et Haendel avait composé des duos en italien pour la jeune princesse qui allait épouser le Prince-Électeur futur roi d'Angleterre, et qui montrait un grand intérêt pour la musique. Elle avait toujours été un soutien fidèle, amie et protectrice du compositeur, qui fut personnellement très affecté lorsqu'elle mourut[hd 2]. De surcroît, cette princesse était une excellente chanteuse ayant reçu une bonne formation musicale[hd 3]. Il composa pour ce deuil personnel « le plus splendide et le plus émouvant des hommages funéraires » (J.F. Labie). L'admiration par les critiques est jusqu'ici nombreuse, tel Paul Henry Lang[hd 2].
Le compositeur réutilisa cette œuvre en faveur de la première partie de son oratorioIsraël en Égypte HWV54[1]. En fait, Haendel avait voulu, en 1738, reprendre l'hymne original pour le concert spirituel. Or, le roi George II refusa sa représentation. Le compositeur dut donc modifier le texte en tant qu’Un oratorio[3]. Pour ces deux œuvres, la composition musicale reste identique[2]. Si cette première partie fut remplacée par d'autres pièces en 1758 par un disciple de Haendel, de nos jours l'exécution de la composition originale de Haendel est bien rétablie en raison de cette qualité exceptionnelle de la version tenue en 1739, issue de l'hymne funéraire[2].
Il est certain que le compositeur employa beaucoup le style de l'homophonie, typique et facile pour le chœur des anglicans[1]. L'œuvre n'a pas besoin des musiciens virtuoses[1]. La plupart des compositions vocales sont soutenues par les instruments[1]. Or, un immense talent de Haendel donnait à cette œuvre une grande et profonde diversité qui permet de classer cette hymne dans les meilleurs chefs-d'œuvre du compositeur. La première pièce de chœur The ways of Zion do mourn se construit sur le cantus firmus traditionnel. Haendel enrichissait cette pièce avec plusieurs thèmes supplémentaires musicaux. La pièce suivante She put on righteousness est une polyphonie très développée, qui sauve cette hymne d'une simple homophonie. Il avait obtenu cette qualité de composition, à Rome, quand il était encore jeune (tel le Dixit Dominus). La But their name liveth evermore est une grande réflexion du motet funéral de Jacobus Gallus († 1591) Ecce quomodo moritur. En résumé, en faveur des obsèques de cette princesse si chère, Haendel met au bénéfice de l'œuvre tout son savoir-faire[4],[hd 4].
Il est remarquable que, sans récitatif en solo ni aria, le compositeur structurât cette œuvre tout entière en employant uniquement des matériaux choraux[hd 4]. À la célébration des obsèques de la reine, l'œuvre fut en effet entièrement chantée par le chœur, composé de 80 chanteurs mascluns[hd 5]. Jens Peter Larsen l'expliquait (1957). Dans cet hymne funéral, le chœur n'est pas une assemblée, mais chaque choriste doit exprimer ses émotions tout comme soliste, en participant aux obsèques de leur chère dame. Ici, le choral est donc bien capable de créer la variété, grâce à une immense diversité de cette œuvre[hd 5].
C'est la raison pour laquelle Harold Decker soulignait que personne n'était capable de composer, dans cette limite, ce type de chef-d'œuvre, hormis quelques musiciens parmi les plus talentueux dont Haendel[hd 1].
Ce n'est pas par hasard que le musicologue Charles Burney († 1814) classe en son temps cette composition dans le peloton de tête des œuvres de Haendel[4],[hd 2].
En dépit de l'immense unité de la structure musicale, les textes sont divisés en deux parties. La première se consacre au personnage de cette reine exceptionnelle, un hommage profond pour Elle. On peut affirmer que Haendel l'a composée en y investissant son émotion personnelle, pour rendre honneur à la mémoire de cette reine. La deuxième, à partir de The righteous shall be, est à la base de la tradition des obsèques britanniques[hd 1]. Le dernier mouvement est la bénédiction qui permet de conclure l'œuvre sur une note d'apaisement[hd 6].
1 - 15 : partition en réduction pour orgue ou piano, publiée par les Éditions Novello & Co. en 1900 (voir ci-dessous).
Publication
Pour la première fois, la partition fut publiée par J. Walsh en 1743, et intitulée The Anthem which was Parformed in Westminster Abbey for the Funeral of Queen Caroline[hd 1]. À partir de la publication de Samuel Arnold, tenue en 1786, la modification était fréquente dans l'optique d'adapter au goût de l'époque, avec les parties de solistes. Friedrich Chrysander suivit cette façon en divisant l'œuvre en deux parties de laquelle la deuxième se commence avec The righteous shall be had[hd 7]. De nos jours, ces modifications sont considérées comme ceux qui ne conforment pas la composition originale de Haendel[hd 4].
Références bibliographiques
Harold Decker, G. F. Handel's Funeral Anthem for Queen Caroline : A Neglected Masterpiece, dans le livre Five Centuries of Choral Music, Pendragon Press, Stuyvesant Town 1988 (ISBN978-0-918728-84-5) [lire en ligne]