Un système de semi-Thue est donné par une relation binaire finie fixe entre mots sur un alphabet donné, dont les éléments sont appelés les règles de réécriture, et notées . La relation est étendue en une relation de réécriture entre tous les mots dans lesquels les parties gauche et droite d'une règle apparaissent en facteur, en d'autres termes on a la relation , pour une règle de et des mots , et quelconques.
Les systèmes de semi-Thue sont Turing-complets. Ils sont voisins des systèmes de Post. Axel Thue a étudié les systèmes de réécriture dans deux articles, l'un sur la réécriture de termes, l'autre sur la réécriture des mots ; c'est du deuxième que dérivent les systèmes de semi-Thue[1].
Le problème de décider de l'existence d'une relation entre deux mots est indécidable.
Définition
Un système de semi-Thue est un couple , où est un alphabet supposé en général fini, et où est une relation binaire finie entre mots sur , donc une partie finie Un élément est une règle de réécriture et est habituellement écrite sous la forme . Si la relation est symétrique, c'est-à-dire si implique , le système est appelé un système de Thue.
Les règles de réécriture sont étendues aux mots de en permettant le remplacement de facteurs selon les règles de . Formellement la relation est étendue par :
si et seulement il existe tels que , , et .
On rencontre aussi la notation , ce qui permet d'omettre l'indice . La relation de réécriture, notée , est la clôture réflexive et transitive de la relation ; elle est définie par une suite d'étapes
Congruence de Thue
Dans un système de semi-Thue, la relation est compatible avec l'opération de multiplication (concaténation) du monoïde libre , en d'autres termes implique pour tous les mots . Comme est un préordre, le couple forme un préordre monoïdal.
De même, la clôture réflexive transitive et symétrique de , parfois dénotée par , est une congruence, c'est-à-dire une relation d'équivalence compatible avec la concaténation. Cette congruence est appelée congruence de Thue engendrée par . Si le système de semi-Thue est symétrique, donc un système de Thue, la congruence coïncide avec la relation de réécriture.
Comme est une congruence, on peut définir le monoïde quotient du monoïde libre par la congruence de Thue, comme dans tout monoïde. Si un monoïde est isomorphe à , le système de semi-Thue est une présentation du monoïde . Par exemple, le système est une présentation du groupe libre à un générateur ; le système réduit à la seule règle est une présentation du demi-groupe bicyclique. De fait, on a[2] : Tout monoïde admet une présentation de la forme pour un système de semi-Thue, éventuellement sur un alphabet infini.
Le problème du mot
Le problème du mot pour un système de semi-Thue se formule comme suit : Étant donné un système de semi-Thue et deux mots , peut-on transformer en en appliquant des règles de ? Ce problème est indécidable. La première preuve est de Emil Post[3]. Une autre, pratiquement en même temps, par A. Markov[4]. Les preuves sont discutées dans le livre de Davis[5].
Connexions avec d'autres concepts
Un système de semi-Thue peut être vu comme un système de réécriture de termes dont les mots sont des termes d'arité 1[6]. Un système de semi-Thue est aussi un cas particulier d'un système de Post, et réciproquement tout système de Post peut être transformé en un système de semi-Thue. Les deux formalismes sont Turing-complets, et sont donc équivalents aux grammaires de type 0 de la hiérarchie de Chomsky qui parfois sont appelées grammaires de semi-Thue[7]. Une grammaire formelle diffère d'un système de semi-Thue par la séparation de l’alphabet en symboles terminaux et non terminaux et la présence d'un axiome. On rencontre aussi la définition d'un système de semi-Thue comme triple , où est appelé l'« ensemble des axiomes »[8].
↑Wolfgang Thomas, « "When nobody else dreamed of these things" – Axel Thue und die Termersetzung », Informatik-Spektrum, vol. 33, no 5, , p. 504–508 (ISSN0170-6012, DOI10.1007/s00287-010-0468-9)
Samson Abramsky, Dov M. Gabbay, Thomas S. E. Maibaum (ed.), Handbook of Logic in Computer Science: Semantic modelling, Oxford University Press, 1995, (ISBN0-19-853780-8).
Matthias Jantzen, « Basics of Term Rewriting », dans Grzegorz Rozenberg et Arto Salomaa (éditeurs), Handbook of Formal Languages, vol. 3 : Beyond Words, Springer, (ISBN3-540-60420-0), p. 269-337
Martin Davis (éditeur), The Undecidable : Basic Papers on Undecidable Propositions, Unsolvable Problems and Computable Functions, New York, Raven Press, , 414 p. (ISBN978-0-486-43228-1, lire en ligne) — Réimpression avec corrections par Dover en 2004.
Articles historiques
Axel Thue, « Die Lösung eines Spezialfalles eines generellen logischen Problems », Norske Vid. Skrifter I Mat.-Nat. Kl., Christiania, no 8, — réimpression dans les Œuvres mathématiques, p. 273–310
Axel Thue, « Probleme über Veränderungen von Zeichenreihen nach gegebenen Regeln », Norske Vid. Skrifter I Mat.-Nat. Kl., Christiania, no 10, — réimpression dans les Œuvres mathématiques, p. 493–524
Introduction par Carl Ludwig Siegel ; résumés en anglais des articles écrits en norvégien en fin de volume.
Emil Post, « Recursive unsolvability of a problem of Thue », Journal Symbolic Logic, vol. 12, no 1, , p. 1–11.
A. Markoff, « On the impossibility of certain algorithms in the theory of associative systems, », C. R. (Doklady) Acad. Sci. URSS (N.S.), vol. 55, , p. 583–586 (MR0020528)
Chaque classe de langages est strictement contenue dans la classe immédiatement au-dessus d'elle. Chaque automate et chaque grammaire d'une classe ont un équivalent dans la classe immédiatement au-dessus.