Stéphane Sirkis[2] naît à Antony le ; lors de l'accouchement naît aussi son frère jumeau hétérozygote Nicolas Sirkis.
La famille Sirkis a pour religion le judaïsme et est originaire de l'Empire russe dont elle fuit l'antisémitisme. Elle part travailler quelques années dans un kibboutz en Israël puis vient s'installer modestement à Toulouse[3]. Jean Sirchis (1925-2021, né à Chișinău[4], en Bessarabie puis en Moldavie), père de Stéphane, est un très jeune actif au sein de la résistance juive sous l'occupation allemande en France où ses parents ont immigré alors qu'il n'avait que 5 ans. À la Libération, il est proche des doctrines communistes, avant de s'en désolidariser peu à peu, conservant cependant des opinions très sensibles envers les défavorisés. Stéphane n'aura connaissance qu'à sa majorité de l'origine juive de sa famille paternelle[3]. La famille maternelle de Christophe, Nicolas et Stéphane est vosgienne et catholique[3], traditionnellement militaire, marquée politiquement à droite, exprimant des opinions en faveur de l'Algérie française à ses petits enfants alors qu'ils sont encore très jeunes[5]. Le maréchal Pétain semble par ailleurs admiré[5].
Alors que Nicolas et Stéphane n'ont que deux ans, leur famille qui habite à Igny[3], déménage à Bruxelles en Belgique où leur père a été nommé ingénieur chimiste au sein d'Euratom. C'est donc dans une sphère plutôt bourgeoise qu'ils sont élevés, bercés par la musique classique qu'écoutent leurs parents. Les trois frères sont placés durant deux ans au collège et pensionnat St Jean Baptiste de la Salle à Estaimpuis, près de la frontière franco-belge[6]. La jeunesse de Stéphane, comme celle de ses deux frères, est perturbée par la séparation puis le divorce de leurs parents. Revenue en France, sa mère, Michèle Henry, s'installe ensuite avec ses trois enfants à Châtillon[7].
La vie privée de Stéphane Sirkis est rarement révélée au public. En 1987, il épouse Sophie avec qui il a une fille : Lou Sirchis, née le . Elle participe au concert d'Indochine au Stade de France le . Elle joue maintenant et chante dans son propre groupe, Toybloïd. Après son divorce, Stéphane reste très proche de sa fille.
Jusqu'à sa mort, il vit avec Éliette, une femme avec qui il ne s'est jamais présenté en public, dans un modeste pavillon à Bagneux (Hauts-de-Seine), au numéro 28 de la rue Salvador Allende.
Selon Nicola, la mort de Stéphane est due à « une hépatite C foudroyante »[10].
Selon son frère aîné Christophe, « Stéphane est mort non pas d'une hépatite fulminante comme cela a été maintes fois publié, mais d'une overdose constatée par l'urgentiste de l'hôpital Saint-Antoine. J'ai été informé plus tard que le geste aurait été volontaire après une période de convalescence totalement sobre »[11],[12]. Ce suicide aurait été provoqué au lendemain de l'évincement du groupe par un contrat signé par Nicola le 26 février, toujours selon son frère Christophe.
Au début des années 1970, après avoir manifesté un intérêt pour le jazz, Stéphane fonde son propre groupe, Light, influencé par le rock progressif et des formations comme Genesis, Yes ou Soft Machine[14]. Vers la fin de ces années, il formera avec Alain Dachicourt, camarade avec lequel il était relativement actif au sein de la Ligue Communiste Révolutionnaire (LCR), un embryon de groupe auquel se joindra rapidement Nicolas. Stéphane joue sur le petit amplificateur "Sound" de 10 watts que lui et Christophe se sont achetés en arrivant à Châtillon, brisant pour cela leur tirelire. Alain a son propre ampli sur lequel est branchée une boite à rythme rudimentaire. Nicolas chante devant le micro d'un petit enregistreur à cassette. Ainsi naîtront quelques titres dont Dizzidence Politik signé plus tard par Nicolas Sirchis / Dominique Nicolas et intégré au premier mini album du groupe Indochine[15].
En 1976, Stéphane découvre le mouvement punk. Il est aussitôt séduit par la rébellion qu'il véhicule[16]. Les notions d'autonomie et de liberté promues par le mouvement punk et dans lesquelles il se reconnaît l'amènent à se détacher des organisations politiques militantes et hiérarchisées au sein desquelles il évoluait jusqu'alors. Cette version de son histoire est contredite par Alain Dachicourt et Gaëlle Creach, camarades militants de Stéphane qui témoignent de sa fidélité tant en amitié qu'envers la LCR, malgré la notoriété qui le touche dès les premiers succès du groupe Indochine. Christophe la contredit également, constatant que Stéphane est toujours resté fidèle à ses convictions.
Durant les prémices de ce qui deviendra le groupe Indochine, Stéphane s'absente régulièrement pour travailler comme agent d'exploitation de remontées mécaniques à La Plagne. Il est parfois moniteur de ski mais doit renoncer, faute de temps pour valider un diplôme officiel. En , Nicola Sirkis et Dominique Nicolas fondent le groupe Indochine avec l'aide de leur ami Dimitri Bodianski et enregistrent un premier disque en . Stéphane Sirkis observe les débuts du groupe de son frère, tout en s'inscrivant à la faculté de Malakoff pour suivre des cours de psychologie[17]. Il participe à la programmation d'Indochine puis rejoint officiellement le trio en . Il devient le guitariste d'Indochine et participe à la composition de plusieurs chansons dans les années 1980.
Son rôle dans la composition s'accroît après le départ du principal compositeur et membre fondateur du groupe, Dominique Nicolas, en 1995. En effet, après avoir envisagé d'abandonner le nom « Indochine » et de lancer un duo avec son frère, Stéphane et Nicola décident de maintenir l'existence du groupe[18] et de sortir l'album Wax en 1996. Stéphane est ainsi l'un des compositeurs principaux des albums Wax et Dancetaria, ce dernier album ayant été enregistré après sa mort, en 1999.
De 1985 à 1999, Stéphane Sirkis compose la musique de quinze chansons pour six albums du groupe :
En dehors d'Indochine, il a composé le second générique de l'émission musicale Platine 45 rebaptisée en 1985 et 1986 Super Platine, ainsi que la musique du film Les Keufs en 1987.
Stéphane Sirkis a envisagé de réaliser un album solo, projet resté à jamais inachevé.
Hommages
Dancetaria, album studio sorti le , est ainsi dédicacé par Nicola Sirkis : « Cet album est pour toi et pour Lou ». Paradize, neuvième album studio d'Indochine, sorti en 2002, lui est dédié : « In the memory of Stef », peut-on lire sur la dernière page du livret, en bas de la page. Sur cet album, Electrastar, une chanson d'Indochine est un hommage de Nicola Sirkis à son frère.
Dans le numéro 300 de du magazine Rock & Folk, Nicola Sirkis publia une lettre à Stéphane en hommage à son frère.
Pour le premier anniversaire du décès de Stéphane, le , un concert acoustique est donné en sa mémoire, le « stef concert ».
Le concert du est à l'origine de l'idée de la tournée acoustique « Nuits intimes », clôturée par la sortie de l'album éponyme, en 2001.
Starmustang, livre de Christophe Sirchis, son frère aîné, publié à compte d'auteur en 2009, retrace la vision de ce dernier quant à la vie et la mort de Stéphane Sirkis.
↑Le patronyme Sirkis était à l'origine écrit en alphabet cyrillique avec l'équivalent du k en alphabet latin, mais la famille Sirkis vivant en Moldavie, région annexée par la Roumanie, dut retranscrire son nom en roumain ; or le roumain ne connaît pas le k et utilise la graphie ch pour le retranscrire. Quand le père de Christophe Sirkis vint s'installer en France, il adopta l'orthographe avec ch bien que celle avec un k soit celle d'origine.