Le salut fasciste est un salut exécuté par le bras et la main droite tendus, qui serait semblable au salut romain[1]. Signe de ralliement du fascisme italien, il fut ensuite adopté par le Parti national-socialiste des travailleurs allemands (NSDAP) d'Adolf Hitler, ce qui lui vaut d'être désormais fortement associé au nazisme. Il est, par conséquent, souvent désigné sous les noms restrictifs de salut nazi ou salut hitlérien. En Allemagne, l'usage du salut était fréquemment accompagné de la formule « Heil Hitler » (« Heil » signifiant « salut à » en allemand ; soit « Salut à Hitler », « Hommage à Hitler » ou, en substance, « Vive Hitler »). Le salut connaissait également, en Allemagne, une variante exécutée avec le bras replié et non tendu, d'ailleurs habituellement pratiquée par Hitler lui-même.
Le salut fasciste et le salut nazi reprennent le salut romain, bras tendu, remis au goût du jour au début du XXe siècle, notamment au cinéma[2].
Le film muet italien Cabiria (1914), un des premiers péplum de l'histoire du cinéma, est conçu sur un scénario (et avec des intertitres) de Gabriele D'Annunzio (1863-1938), un précurseur du fascisme, qui a contribué à réhabiliter un décorum paramilitaire lors de l'expédition de Fiume (1919-1920) : chemises noires, cri de ralliement, salut romain, culte de l'héroïsme, etc.
Usage
Pour des raisons obscures (probablement l'attrait pour la Rome antique que l'on retrouve aussi dans l'usage symbolique des faisceaux romains), le salut exécuté par le bras et la main droite tendus, est repris par les fascistes italiens, vers 1920. Le salut pourrait aussi avoir des origines militaires, indiquant une marque de respect entre un soldat et son supérieur hiérarchique.
À titre anecdotique, la délégation française a été très applaudie lors du défilé d'ouverture des Jeux olympiques de 1936 à Berlin, les spectateurs prenant le salut olympique pour un salut nazi et donc pour un hommage au Führer (Adolf Hitler)[3].
Le salut fasciste diffère du salut nazi. Pour les fascistes italiens et les franquistes, le bras est levé plus haut et le pouce est écarté des autres doigts[réf. nécessaire]. Sur certaines photo le salut apparait effectué avec le poignet cassé vers le haut.
À compter de 1938, le régime de Mussolini tenta, sans grand succès, d'imposer le salut fasciste au-delà de la sphère étatique et militante, en rendant le salut bras tendu obligatoire pour tous les Italiens en lieu et place de la poignée de main[5].
En Espagne, sous le régime de Francisco Franco, le salut fut utilisé en tant que salut franquiste par les sympathisants du régime issus notamment de la Phalange espagnole, mais devint progressivement obsolète.
En Allemagne, le salut hitlérien est considéré par les nazis comme « le » salut allemand, et donc dans certaines villes, il sera interdit aux Juifs, comme à Gotha en 1933[9] :
« La direction du parti nazi de la ville et du district de Gotha a publié l'avis suivant : “Il a été soulevé à plusieurs reprises de savoir si les Juifs devaient aussi rendre le salut allemand [hitlérien]. Afin de faire cesser dans l'avenir tout malentendu, nous affirmons par la présente que le salut allemand est un salut des Allemands qui non seulement n'est pas exigé des Juifs, mais n'est pas non plus désiré d'eux. Aussi la population est invitée à laisser tranquilles les Juifs qui n'effectueraient pas le salut allemand”. »
La Wehrmacht refuse d'adopter le salut hitlérien[10]. Il ne lui est d'abord imposé à partir du 19 septembre 1933 qu'en chantant le Horst-Wessel-Lied et l'hymne national, et lors de rencontres non-militaires dans et en dehors de la Wehrmacht (par exemple avec des membres du gouvernement)[10]. Cependant, le salut traditionnel n'était autorisé par le protocole de la Reichswehr et de la Wehrmacht que si la personne qui salue porte un couvre-chef réglementaire. Le salut hitlérien est donc utilisé pour tous les saluts à tête découverte, ce qui le rend de fait obligatoire dans la plupart des situations[11]. Il est imposé à l'armée le 24 juillet 1944, quelques jours après le complot du 20 juillet 1944[12],[13].
Origines de l'interjection « Heil Hitler »
Selon Ian Kershaw, dans sa biographie d'Hitler, le « Heil » du salut et le titre de « Führer » viendraient de Georg Ritter von Schönerer, violent antisémite viennois de la fin du XIXe siècle. Ce cri était utilisé par les partisans de ce nationaliste virulent qui inspira, en partie, l'idéologie du futur dirigeant nazi[14].
Le cri Sieg Heil (« Salut à la victoire », « Sieg » signifiant « victoire », et « Heil » signifiant « salut » dans le sens du salut de l’âme) accompagnait souvent le salut hitlérien. Après le complot du 20 juillet 1944, il est devenu obligatoire de le prononcer à tous les rassemblements militaires[réf. nécessaire].
Le film d'Ernst LubitschTo Be or Not to Be utilise également le salut de manière satirique, lorsqu'un acteur résistant qui se fait passer pour le dictateur répond aux ovations de ses partisans, sur un ton désabusé : « Heil moi-même. »
En France, le salut fasciste n'est pas directement interdit, à l'inverse des uniformes ou insignes nazis, qui le sont par l'article R645-1 du Code pénal.
Dans les faits il peut être considéré comme une incitation à la haine raciale[15],[16],[17].
Il est interdit dans un stade, par l'article L332-7 du Code du sport[18],[19].
Le , la cour de cassation milanaise a délibéré que le salut fasciste n'est pas condamnable dans la situation où le geste se fait dans un contexte non-violent et commémoratif. Il s'agit alors d'une manifestation idéologique[22]. C'est à la suite de la manifestation organisée par le parti Fratelli d'Italia en 2014 que deux militants de CasaPound ont été poursuivis pour apologie du fascisme[20], ils ont été disculpés à la suite de la décision[22].
Proche du salut fasciste, le salut bras droit replié puis tendu sur le côté[23] fut choisi par Pierre de Coubertin comme salut olympique pour les athlètes des Jeux olympiques à partir des Jeux d'Anvers en Belgique en 1920, date où il est adopté par les athlètes du groupe sportif de l'armée française, le bataillon de Joinville, et connu alors aussi sous le nom de salut de Joinville.
Le , la commission exécutive du Comité international olympique (CIO), à la demande de M. Poplimont, du comité olympique belge, décide que le salut olympique, lors des manifestations d’ouverture des Jeux (1924, 1928, 1932, 1936), est changé « afin d’éviter toute confusion avec d’autres saluts de triste mémoire »[24]. En raison de sa ressemblance au salut nazi, le salut olympique est donc abandonné après la Seconde Guerre mondiale[25].
Salut de Bellamy
Aux États-Unis, dès 1892, le salut de Bellamy accompagne le serment d'allégeance au drapeau des États-Unis.
En 1942, en raison de sa proximité avec le salut hitlérien, il est remplacé par le président Franklin Roosevelt par le nouveau salut, la main posée sur le cœur, par amendement du Flag Code le , par le Congrès américain .
Bibliographie
Tilman Allert (trad. Jefferson Chase), The Hitler Salute: On the Meaning of a Gesture, Picador, (ISBN9780312428303)
Notes et références
↑« Ave (Nom de l'empereur) », soit « Salut Empereur »
↑(en) Martin M. Winckler, The Roman salute : cinema, history, ideology, Columbus, Ohio State University Press, (ISBN978-0-8142-0864-9).
↑ a et b(it) « Milano, tutti prosciolti per i saluti romani durante cerimonia per Ramelli di un anno fa », Repubblica.it, (lire en ligne, consulté le )
↑(it) « Legge Scelba 645 1952 Divieto di riorganizzazione del disciolto partito fascista », MioLegale.it, (lire en ligne, consulté le )
↑ a et b(it) « Saluto fascista, la Cassazione: "Non è reato se commemorativo" e conferma due assoluzioni a Milano », Repubblica.it, (lire en ligne, consulté le )