Le Regulamentul Organic (appellation roumaine pour Règlement organique) est la dénomination de la variante particulière à l'histoire de la Roumanie, d'une loi organiquequasi-constitutionnelle initialement rédigée en français, alors langue diplomatique internationale, qui fut soumise à l'approbation du Conseil d’État de l'Empire russe à Saint-Pétersbourg, avant d'être l'objet de débat dans les Assemblées princières (Sfaturile boierești) de Bucarest et de Iaşi, capitales des deux Principautés roumaines de Valachie et de Moldavie[1]. La traduction en roumain a suivi l'adoption de cette loi dans sa version en langue française qui était « Règlements organiques » au pluriel[2],[3]. On suppose que le titre choisi Regulamentul Organic a été préféré à « Constitution » pour éviter le sens révolutionnaire de ce mot dans le contexte politique de l'époque.
Pour éviter de devenir simples provinces ottomanes et conserver leur autonomie interne dans le Dar el Ahd (« maison du pacte », en arabe : دار العهد), les deux principautés, depuis le Moyen Âge, devaient payer un tribut aux SultansOttomans, mais leur système de monarchie élective et le clientélisme pratiqué dans l'Empire ottoman permit à la « Sublime porte » de s'immiscer de plus en plus dans l'élection des hospodars, jusqu'à finir par les nommer elle-même[5]. Toutefois, à la suite des défaites ottomanes au cours des guerres russo-turques[6], depuis qu'une armée russe pénétra en Moldavie et que l'empereur Pierre Ier de Russie établit des liens avec les Valaques[6], le pouvoir ottoman fut de plus en plus contesté par les boyards roumains soutenus par la Russie, qui, en tant qu'empire chrétien orthodoxe revendiquait de l'héritage de l'Empire byzantin[7],[8]. Cela incita la « Sublime Porte » à faire de nombreuses concessions aux hospodarsphanariotes et aux boyards roumains, qui jouèrent ainsi sur les rivalités des empires absolutistes voisins pour augmenter progressivement leur autonomie[9].
Malgré l'influence des phanariotes arrivant dans les Principautés en tant que nouvelle bureaucratie et élite économique préférée par les Hospodars, et malgré le Regulamentul organic, les assemblées des boyards (Sfaturile boierești) gagnèrent du temps face aux attentes des réformistes et préservèrent encore quelques décennies leurs privilèges en jouant sur les rivalités entre les pouvoirs impériaux d'Istanbul et de Saint-Pétersbourg. Chronologiquement postérieur à la révolution de 1821 en Moldavie et Valachie et contemporain de celle de 1848, le Regulamentul organic constitue le cadre d'une évolution visant en même temps à éviter ces révolutions, à préserver l'ordre établi, et à moderniser les pays roumains. Il est également contemporain des débuts de l'industrialisation et prend fin alors que sont construits les premiers chemins de fer et que les armées moldo-valaques s'équipent d'une artillerie et d'une flottille danubienne modernes[13].
Constantin C. Giurescu, Istoria Bucureştilor. Din cele mai vechi timpuri pînă în zilele noastre, Ed. Pentru Literatură, Bucarest, 1966
Keith Hitchins, Românii, 1774–1866, Humanitas, Bucharest, 1998 (translation of the English-language edition The Romanians, 1774–1866, Oxford University Press, États-Unis, 1996)
Stevan K. Pavlowitch, Istoria Balcanilor, Polirom, Iaşi, 2002 (translation of the English-language edition A History of The Balkans 1804–1945, Addison Wesley Longman Ltd., 1999)
↑Constantin C. Giurescu, Istoria Bucureştilor. Din cele mai vechi timpuri pînă în zilele noastre, Ed. Pentru Literatură, Bucarest, 1966p. 123.
↑Keith Hitchins, Românii, 1774–1866, Humanitas, Bucarest, 1998 (traduction de The Romanians, 1774–1866, Oxford University Press, États-Unis 1996, p. 203