Le , les manifestants envahissent Budapest au cours de la révolution des Asters (ou révolution des Chrysanthèmes, ou « révolution des Reines-marguerites »). L'ancien Premier ministreIstván Tisza est assassiné par un groupe de soldats au cours de l'un des rares actes de violence de la révolution[3]. Mihály Károlyi forme un gouvernement de coalition approuvé par l'archiduc Joseph puis, le 16 novembre, proclame la république[4].
La diplomatie française, qui envisage une intervention contre la Russie soviétique, ne laisse aux Hongrois aucune marge de manœuvre. Le 13 novembre, une convention militaire est signée à Belgrade, fixant la ligne de démarcation du front sud, celle du nord devant être négociée avec la Tchécoslovaquie. Mais la position française se durcit progressivement à l'égard de la Hongrie, le ministre des Affaires étrangères Stephen Pichon reprochant à Franchet d'Espèrey d'avoir traité avec le « prétendu État hongrois » plutôt qu'avec l'Autriche-Hongrie, qui a pourtant cessé d'exister[5]. Dès novembre, les troupes hongroises reprennent le contrôle du territoire slovaque et empêchent les fonctionnaires du nouvel État tchécoslovaque de prendre leurs postes[6]. En décembre, le royaume de Roumanie accepte l'union des Roumains de Transylvanie proclamée unanimement par les députés roumains à Alba Iulia, et après avoir reçu le feu vert du commandement allié, avance à l'ouest des Carpates.
Mihály Károlyi est élu chef de l'État le , tandis que Dénes Berinkey lui succède le 19 comme Premier ministre ; le gouvernement est plusieurs fois remanié. Károlyi tente d'instaurer un État de droit alors que le pays est en plein désordre et annonce une réforme agraire radicale, partageant même ses propres domaines. Mais il est pris entre le « marteau » des vainqueurs de la Première Guerre mondiale qui exigent toujours plus de concessions, et l'« enclume » des extrémistes hongrois, conservateurs qui entendent restaurer la monarchie, et révolutionnaires qui entendent établir un régime bolchevik, et qui se rejoignent sur le refus des concessions consenties par Károlyi[3].
Le 20 mars, le chef de la mission militaire de la Triple-Entente, le lieutenant-colonel Fernand Vix, remet à Károlyi une notification exigeant sous 24 heures un nouveau recul d'environ 100 km des forces hongroises dans le Körösvidék, comprenant le massif du Bihar et ses alentours. Ne pouvant accepter cet ultimatum, Károlyi et Berinkey démissionnent ; Károlyi annonce alors son intention de former un nouveau gouvernement social-démocrate. Mais une proclamation signée de son nom circule aussitôt, annonçant que le président « transmet le pouvoir au prolétariat ». Károlyi niera toujours avoir rédigé et signé cette note[7] mais le 21 mars, un nouveau gouvernement, formé par le Parti communiste hongrois et le Parti social-démocrate hongrois, qui ont fusionné la veille, proclame une république bolchevique. Confronté lui aussi à la présence des troupes alliées, Kun comprend l'impossibilité de retrouver les frontières hongroises d'avant 1918 et préfère soutenir la création de républiques-sœurs communistes[8] au Banat[9] et en Slovaquie[10].
↑Miklós Molnar, Histoire de la Hongrie, Hatier, 1996, p. 330-331
↑József Breit, (en) « Hungarian Revolutionary Movements of 1918-19 and the History of the Red War », Vol. I of Main Events of the Károlyi Era, Budapest 1929, pp. 115-16.
↑Jean-Paul Bled, art. « Le Banat : panorama historique » dans Études germaniques n° 267, vol. 3, 2012, pp. 415-419, doi=10.3917 - eger.267.0415, [1].
↑Michel Sturdza, ancien ministre des affaires étrangères de Roumanie, The Suicide of Europe, Western Islands Publishers 1968, p. 22, Belmont, Massachusetts, Library of Congress Catalog Card Number 68-58284. Printed in the United States of America et Tamás Szende, La Hongrie au XXe siècle : regards sur une civilisation, L'Harmattan, 2000, p. 14
↑Une lecture nationaliste et simplificatrice de ce conflit de cinq mois opposant le régime bolchevik de Béla Kun et ses deux républiques-sœurs à une coalition anticommuniste, en fait une guerre nationale et territoriale d'une durée de deux ans et demi (1918-1920) entre deux pays, la Hongrie et la Roumanie, ayant pour enjeu l'appartenance de la Transylvanie à la « Grande Hongrie » ou à la « Grande Roumanie » : c'est ainsi que maintes sources secondaires, notamment en langues hongroise, allemande et anglaise, le présentent : Ronald D. Bachman (dir.) « Greater Romania and the Occupation of Budapest » in Romania: a Country Study, GPO 1991, LOC, (OCLC470420391), [2] & Glen St. John Barclay, 20th Century Nationalism, Weidenfeld & Nicolson, London 1971, (ISBN9780297004783).
↑József Breit : Hungarian Revolutionary Movements of 1918-19 and the History of the Red War, Vol. I : Main Events of the Károlyi Era, Budapest 1929, pp. 115-16.